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naire n'a pû être compofé que par un homme d'efprit, & n'écoutant que fa jufte averfion les gens d'efprit, fe perfuade que cet article doit abfolument prouver le matérialisme de fon ame; il dénonce donc cet article comme impie, comme Epicurien, enfin, comme l'ouvrage d'un philofophe.

Il fe trouve que l'article, loin d'être d'un philofophe, eft d'un docteur en Théologie, qui établit l'immatérialité, la fpiritualité, l'immortalité de l'ame de toutes fes forces; il eft vrai que ce docteur encyclopédifte ajoutait aux bonnes preuves que les philofophes en ont apportées, de très mauvaises qui font de lui; mais enfin la cause est fi bonne qu'il ne pouvait l'affaiblir; il combat le matérialifme tant qu'il peut; il attaque même le fyftême de Loke, fuppofant que ce fystème peut favorifer le matérialisme; il n'entend pas un mot des opinions de Loke; cet article, enfin, est l'ouvrage d'un écolier ortodoxe, dont on peut plaindre l'ignorance, mais dont on doit estimer le zèle, & approuver la faine doctrine. Nôtre convulfionnaire défére donc cet article de l'ame, & probablement fans l'avoir lû. Un Magiftrat accablé d'affaires férieufes, & trompé

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trompé par ce malheureux, le croit fur fa parole; on demande la fupreffion du livre; on l'obtient, c'est-à-dire, on trompe mille foufcripteurs qui ont avancé leur argent, on ruïne cinq ou fix libraires confidérables qui travaillaient fur la foi d'un privilège du Roi, on détruit un objet de commerce de trois cent mille écus. Et d'où eft venu tout ce grand bruit, & cette perfécution? de ce qu'il s'eft trouvé un homme ignorant, orgueilleux & paffionné.

aux yeux

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Voilà, Monfieur, ce qui s'est paffé, je ne dis pas aux yeux de l'Univers, mais, au moins de tout Paris. Plufieurs avantures pareilles que nous voyons affez fouvent, nous rendraient les plus méprifables de tous les peuples policés, fi d'ailleurs nous n'étions pas affez aimables. Et dans ces belles querelles, les partis fe cantonnent, les factions fe heurtent, chaque parti a pour lui un folliculaire *; maître Aliboron, par exemple, eft le folliculaire de Mr. de l'Empirée; ce maître Aliboron ne manque pas de décrier tous fes camarades folliculaires, pour mieux débiter fes feuilles; l'un gagne à ce mé

tier

Faifeur de feuilles.

tier cent écus par an, l'autre mille, l'autre deux mille; ainfi l'on combat pro focis. Il faut bien que je vive, difait l'Abbé Des Fontaines à un Miniftre d'Etat ; le Miniftre eut beau lui dire qu'il n'en voyait pas la néceffité; Des Fontaines vécut ; & tant qu'il y aura une piftole à gagner dans ce métier, il y aura des Frérons qui décrieront les beaux arts & les bons artistes.

L'envie veut mordre, l'intérêt veut gagner; c'est là ce qui excita tant d'orages contre le Taffe, contre le Guarini en Italie, contre Driden, & contre Pope en Angleterre ; contre Corneille, Racine, Moliére, Quinault, en France. Que n'a point effuié de nos jours vôtre célèbre Goldoni! & fi vous remontez aux Romains & aux Grecs, voyez les prologues de Térence, dans lefquels il apprend à la postérité, que les hommes de fon temps étaient faits comme celui du nôtre: - tutto l' mondo è fatto com' è la noftra famiglia. Mais remarquez, Monfieur > pour la confolation des grands artistes, que les perfécuteurs font affurés du mépris & de l'horreur du genre humain, & que les bons ouvra ges demeurent. Où font les écrits des ennemis. de Térence, & les feuilles des Bavius qui infultèrent

tèrent Virgile? où font les impertinences des rivaux du Taffe, & des rivaux de Corneille & de Moliere?

Qu'on eft heureux, Monfieur, de ne point voir toutes ces mifères, toutes ces indignités, & de cultiver en paix les arts d'Apollon, loin des Marfias & des Midas! Qu'il eft doux de lire Virgile & Homère en foulant à fes pieds les Ba vius & les Zoiles ; & de fe nourrir d'ambrofie, quand l'envie mange des couleuvres !

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Defpréaux difait autrefois en parlant de la rage des cabales:

Qui méprise Cotin, n'eftime point son Roi,
Et n'a, felon Cotin, ni Dieu, ni foi, ni loi.

Le grand Corneille, c'est-à-dire, le premier homme par qui la France littéraire commença à être eftimée en Europe, fut obligé de répondre ainfi à fes ennemis littéraires, (car les auteurs n'en ont point d'autres. ) Je déclare que je foumets tous mes écrits au jugement de l'Eglife, je doute fort qu'ils en faffent autant.

On pourait prendre la liberté de dire ici la même chofe que le grand Corneille, & il ferait agréa

agréable de le dire à un Sénateur de la feconde ville de l'Etat du St. Père; il ferait doux encor de le dire dans des terres auffi voifines des hérétiques que les miennes.

Quant à quelques Meffieurs, qui fans être Chrétiens, inondent le public depuis quelques années de fatyres Chrétiennes, qui nuiraient, s'il était poffible, à nôtre religion, par les ri dicules appuis qu'ils ofent prêter à cet édifice inébranlable, enfin, qui la deshonorent par leurs impoftures: fi on faifait jamais quelque attention aux libelles de ces nouveaux Garafses, on pourrait leur faire voir qu'on eft auffi ignorant qu'eux, mais beaucoup meilleur Chrétien qu'eux.

C'est une plaifante idée qui a paffé par la tête de quelques barbouilleurs de nôtre fiécle, de crier fans ceffe que tous ceux qui ont quelque efprit ne font pas Chrétiens! Penfent-ils rendre en cela un grand fervice à nôtre religion? Quoi! la faine doctrine, c'est-à-dire, comme vous croyez bien, la doctrine Apoftolique & Romaine, ne ferait-elle, felon eux, que le partage des fots? Sans penfer être quelque chofe, je ne penfe pas être un fot; mais il me fem

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