186. Pourquoi Dieu nous cache-t-il ainsi nos progrès dans la vertu ?

Dieu nous cache, par miséricorde, nos progrès dans la vertu, et les couvre du voile de nos imperfections, afin que notre trésor spirituel soit moins exposé à nous être enlevé par une complaisance orgueilleuse en nous-mêmes.

Communion tiède.

187. Qu'est-ce que la communion tiède?

La communion tiède est celle qui est faite en état de grâce, mais avec peu de préparation et de dévotion.

188. Quelle est la cause ordinaire de la communion tiède?

L'habitude des fautes vénielles délibérées et les affections déréglées pour les créatures.

189. Quelles sont les suites de la communion tiède?

C'est 1o de mettre obstacle à la communication surabondante de l'Esprit de Jésus-Christ; 2° d'exposer l'âme au danger d'une rupture avec ce divin Esprit.

« Quand même, dit Bossuet, nous ne serions pas tout à fait indignes de cette indignité qui nous rend coupables du corps et du sang du Sauveur, nous pourrions nous rendre indignes des grandes grâces sans lesquelles nous ne pourrons vaincre les grandes faiblesses ni les grandes tentations, dont la vie est pleine. Nous pourrions nous rendre indignes de cette parfaite communication avec l'Époux, et causer entre lui et nous, sinon la rupture, du moins ces froideurs qui sont des dispositions à la rupture même 1. »

Communion indigne.

190. Qu'est-ce que la communion indigne ?

C'est la communion faite sciemment avec une conscience souillée par le péché mortel.

191. Ceux qui communient indignement reçoivent-ils dans la communion le corps et le sang de Jésus-Christ?

Oui, ils reçoivent réellement et véritablement le corps et le sang de Jésus-Christ, mais seulement d'une manière sacramentelle, dit le concile de Trente, et non d'une manière spirituelle.

192. Est-ce un grand péché de communier sans être en état de grâce? Oui, c'est le péché de Judas; c'est un horrible sacrilège. Celui qui le commet se rend coupable de crime contre le corps et le sang du Seigneur 2.

193. Quelle est la malice de ce crime?

1o C'est un crime de profanation et de sacrilège; car le coupable, ne faisant pas le discernement qu'il doit du corps du Seigneur 1, le traite comme une chose vile et profane, et prend comme une nourriture ordinaire la chair sacrée et sanctifiante du Fils de Dieu.

2o C'est un crime de perfidie et de trahison; parce que, comme Judas, il lui donne un baiser d'ami dans le temps même où il le sacrifie à sa passion criminelle.

3o C'est un crime d'outrage cruel; parce que, comme les juifs déicides, il livre de nouveau Jésus-Christ, autant qu'il est en lui, aux opprobres et au supplice de la croix.

<< Je soutiens sans hésiter, je soutiens sans crainte de dépasser les bornes de la vérité la plus exacte, que si le Sauveur était encore dans une chair passible et mortelle, et qu'il dût comme autrefois endurer une seconde passion et une seconde mort, rien de toutes les cruautés qu'exercèrent sur lui les bourreaux, ni de tous les tourments qu'il souffrit par la haine et la barbarie des Juifs, ne lui serait plus odieux et en ce sens plus douloureux que le crime d'un chrétien qui, par un sacrilège, profane son corps et son sang.» (BOURDALOue.)

194. Quel est l'effet de la communion indigne?

Celui qui communie indignement « mange et boit sa propre condamnation a», dit saint Paul 2; c'est-à-dire qu'il mange et boit l'arrêt qui le condamne, qu'il se l'incorpore, qu'il en est pénétré; que le corps de Jésus-Christ qui lui est donné pour être le gage de son salut éternel, devient au contraire le gage de sa perte éternelle, et que ce pain céleste préparé pour le nourrir et le vivifier est changé, par son crime, en un poison mortel.

195. Comment Dieu punit-il souvent, même en ce monde, la communion indigne ?

Au point de vue temporel, par la perte des biens, de l'honneur, de la santé, de la vie; et, au point de vue spirituel, par l'aveuglement de l'esprit, l'endurcissement du cœur et même par l'impénitence finale.

C'est pour cette raison qu'il y a parmi vous beaucoup de malades et de languissants, et qu'il en meurt beaucoup 3.

Allusion à l'habitude qu'avaient les anciens de faire manger au condamné à mort, avant de l'exécuter, sa propre sentence écrite sur un morceau de parchemin.

196. Celui qui aurait eu le malheur de communier indignement, doit-il désespérer de la miséricorde de Dieu ?

Non, mais il doit se repentir de son crime et se purifier au plus tôt par une bonne confession.

Communion spirituelle.

197. Qu'est-ce que la communion spirituelle?

C'est le pieux désir de recevoir Jésus-Christ, lorsqu'on n'a pas le bonheur de faire la communion sacramentelle.

<< Ceux-là font la communion spirituelle, dit le catéchisme du concile de Trente, qui, animés de cette foi qui opère par la charité, se nourrissent de ce pain céleste par des désirs et des vœux ardents. >>

198. Quand peut se faire la communion spirituelle?

Elle peut se faire en tout temps et en tout lieu, mais surtout à la sainte messe et dans les visites au très saint Sacrement.

199. Est-il avantageux de communier spirituellement?

La communion spirituelle est une pratique très agréable à Notre-Seigneur; elle nous mérite ses grâces et nous prépare efficacement à la communion sacramentelle.

<«< La communion spirituelle est d'un grand mérite quand le désir est grand, et que vous êtes disposé à recevoir alors autant de grâces que Notre-Seigneur veut vous en communiquer, » (B. J.-B. DE LA SALLE.)

9. Des effets de l'eucharistię.

200. Quels sont les effets de l'eucharistie?

L'eucharistie produit deux sortes d'effets: des effets spirituels et des effets corporels.

Effets spirituels.

201. Quels sont les effets spirituels de la sainte eucharistie ?

Comme l'eucharistie est par rapport à l'âme ce que le pain et le vin sont par rapport au corps, on peut dire d'une manière générale, avec saint Thomas, qu'elle produit pour la vie de l'âme des effets analogues à ceux que ces aliments produisent pour la vie du corps, c'est-à-dire qu'elle nourrit, qu'elle répare, qu'elle sou. tient, qu'elle fait croître et qu'elle délecte.

Ces effets spirituels peuvent se ramener à trois principaux : 1o la nutrition spirituelle de l'âme; 2o la rémission des péchés véniels et la préservation du péché mortel; 3° l'union ineffable avec Jésus-Christ.

202. En quoi consiste la nutrition spirituelle de l'âme?

Elle consiste, soit dans l'augmentation de la grâce sanctifiante, soit dans le droit aux grâces actuelles nécessaires pour conserver la charité et l'union avec Jésus-Christ.

La sainte eucharistie a cela de commun avec les autres sacrements des vivants, qu'elle augmente la grâce sanctifiante; mais son effet propre est d'apporter cette augmentation de grâce pour nourrir l'âme spirituellement, et rendre plus parfaite son union avec Jésus-Christ, suivant sa parole même ; « Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi, et moi en lui 1. »

Levez-vous et mangez, car il vous reste un grand chemin à faire. S'étant levé, il (le prophète Élie) mangea et il but; et s'étant fortifié par cette nourriture, il marcha quarante jours et quarante nuits jusqu'à Horeb, la montagne de Dieu 2.

203. Comment savons-nous que l'eucharistie nourrit l'âme?

Par les paroles mêmes du Sauveur : « Ma chair est véritablement nourriture, et mon sang est véritablement breuvage. »

204. Pourquoi l'eucharistie remet-elle les péchés véniels?

1° Parce qu'étant un aliment, elle doit réparer les pertes spirituelles que subit l'âme.

« Nous prenons chaque jour le pain céleste, pour remédier à nos infirmités de chaque jour. » (S. AMBROISE.)

2o Parce qu'un effet de la charité actuelle que l'eucharistie produit en nous, est de détruire les péchés véniels.

La charité couvre la multitude des péchés1.

205. La sainte eucharistie remet-elle tous les péchés véniels?

« La communion détruit par son effet direct tous les péchés véniels passés qui sont encore dans l'âme et qu'une affection du communiant ne soustrait point à son action. » (SUAREZ.)

206. Les péchés véniels commis dans l'acte de la communion empêchent-ils l'augmentation de la grâce sanctifiante?

« Les péchés véniels commis dans l'acte même de la communion, comme des pensées de vanité, des distractions volontaires, n'empêchent point l'effet principal de l'eucharistie, qui est une augmentation de la grâce sanctifiante; mais ils empêchent l'effet secondaire, qui est la douceur de la réfection spirituelle. » (S. THOMAS).

1

3

1 Jean, vi, 57. 2 III Rois, XIX, 7, 8. — Jean, vi, 56.

4 I Pierre, IV, 8.

207. L'eucharistie remet-elle quelquefois les péchés mortels?

Elle peut les remettre indirectement et par accident, lorsqu'on la reçoit avec un péché mortel dont on n'a ni la conscience ni l'affection; car le fidèle qui n'a pas une contrition suffisante, peut, dit saint Thomas, en s'approchant avec respect et dévotion de l'eucharistie, obtenir la grâce de la charité, qui augmentera son repentir et lui méritera la rémission de son péché. »

208. Comment l'eucharistie préserve-t-elle du péché mortel?

Elle préserve du péché mortel: 1o en augmentant la grâce sanctifiante qui fortifie l'âme pour le combat et la rend moins sensible à l'attrait des joies vaines ou mauvaises; 2o en lui donnant droit à des grâces actuelles spéciales; 3° en mettant en fuite les démons.

Voici le pain qui est descendu du ciel, afin que celui qui en mange ne meure point1.

209. L'eucharistie remet-elle la peine du péché?

En tant que sacrement, l'eucharistie remet une partie plus ou moins grande de cette peine, selon la ferveur et la dévotion du fidèle, non pas directement, comme le sacrifice de la messe, mais en vertu de la charité actuelle par laquelle s'opère l'union entre Jésus-Christ et l'âme qui se nourrit de lui.

210. Pourquoi l'eucharistie nous unit-elle intimement à Jésus-Christ? Parce que comme l'effet de la nourriture est de s'unir intimement au corps et de devenir une même chose avec lui, ainsi l'eucharistie, nourriture de l'âme, nous incorpore à Jésus-Christ, en sorte que nous devenons une même chose avec lui par la communication de son esprit, aussi bien que par la participation de sa chair sacrée et de son précieux sang.

211. Comment Jésus-Christ nous a-t-il fait connaître cette union?

En nous disant que par l'eucharistie non seulement il demeure en nous et nous en lui 2, mais qu'il vit en nous et que nous vivons par lui. Voilà pourquoi ceux qui reçoivent cet adorable sacrement peuvent dire, dans un sens très véritable, ces admirables paroles de saint Paul : « Je vis, ou plutôt, ce n'est plus moi qui vis, mais c'est Jésus-Christ qui vit en moi 3. »

Comme mon Père qui m'a envoyé est vivant, et que je vis par mon Père; de même celui qui me mange, vivra aussi par moi1.

212. Quelle différence y a-t-il toutefois entre la nourriture corporelle et l'eucharistie?

C'est que nous changeons la nourriture corporelle en notre

1 Jean, vi, 50.

2

Jean, vi, 57. 3 Gal., 11, 20. 4 Jean, vi, 57.