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nant déjà, elle est si étendue, si riche et si variée-relativement parlant, bien entendu qu'elle se sent assez forte pour se soustraire résolument à la tutelle de son aînée, qu'elle est sur le point de prendre son essor, de s'émanciper et de contrôler elle même, jusqu'à un certain point toutefois, sa marche dans l'avenir.

Nous disons jusqu'à un certain point, parce qu'il sera toujours nécessaire que nos écrivains aillent chercher leurs inspirations chez les grands maîtres français, qu'ils étudient leurs œuvres et les approfondissent, comme les beaux-arts modernes et la littérature elle-même vont encore puiser aux sources artistiques intarissables de la Grèce et de Rome; d'ailleurs notre littérature se rapproche de la française par des liens très-étroits, car l'une est née de l'autre, et elles ont toutes deux la même carrière à parcourir, la même fin à atteindre.

Nous avons un public instruit qui lit de plus en plus, qui se plaît à reconnaître les mérites de nos écrivains et commence à les encourager; nous avons une histoire féconde en faits glorieux et en légendes merveilleuses qui prêtent admirablement bien à la poésie lyrique et épique, au théâtre et au roman; nous avons nos historiens, nos publicistes, nos poètes, nos romanciers, nos mœurs, nos traditions: que faut-il de plus pour constituer une littérature nationale?

Loin de ralentir leurs efforts, nos écrivains travaillent avec un courage à toute épreuve; ces ouvriers de la pensée sont animés d'une ardeur infatigable, et au lieu de se reposer complaisamment sur leurs premiers lauriers, au lieu de jouir, avec une satisfaction trop facile et prématurée, de leurs premiers triomphes, ils semblent multiplier leurs sacrifices en raison de leur succès et de la faveur avec laquelle leurs œuvres sont ac-cueillies. De sorte que nos bibliothèques s'enrichissent presque chaque jour d'ouvrages nouveaux, dont plusieurs jouissent d'une réputation européenne, malgré que, dans ce pays, les écrivains rencontrent des obstacles de toutes sortes, malgré qu'ils aient à surmonter les difficultés les plus sérieuses et qu'ils perdent souvent de l'argent au lieu d'en moissonner.

La Revue de Montréal, récemment fondée et rédigée avec science, imprimera un mouvement sensible à la marche de notre littérature nationale, nous en sommes persuadé.

Comme elle s'est engagée à rendre compte à ses lecteurs de toutes les nouvelles publications, il sera réservé dans ses colonnes une petite place à la bibliographie.

La littérature canadienne-française est en pleine floraison; depuis peu de temps il a été publié un bon nombre d'ouvragesde mérite, tels que les Biographies et Portraits de M. L. O. David, les Echos de Québec de N. Legendre, les Evénements de 3738 de Carrier, l'Instruction Publique en Canada de M. Chauveau, les Chroniques de M. H. Fabre, etc. N'oublions pas les œuvres de M. B. Sulte, ni les poésies de M. L. H. Frechette qui seront

publiées incessamment. Aujourd'hui, nous nous occuperons d'un recueil de poésies éminemment canadiennes, paru il y a déjà quelque temps; il est décoré d'un joli titre: Les Québecquoises, qui plaira à tout le monde; il est si galant, si national et si poétique en lui-même !

L'auteur de cet ouvrage, M. W. Chapman, de St. François de la Beauce, était déjà favorablement connu du public lettré par les pièces de vers qu'il avait insérées dans différentes Revues, entr'autres l'Opinion Publique; mais nous pensons que son volume ajoutera à sa réputation d'homme de lettre et lui assignera aussitôt une place marquante parmi nos littérateurs.

M. Ghapman a une imagination vive et féconde, et il a écrit un grand nombre de poésies; mais il a choisi les meilleures d'entr'elles dont plusieurs sont inédites-pour en faire le joli recueil dont nous parlons. Nous avons lu avec plaisir et intérêt Les Quebecquoises, et nous sommes heureux d'en pouvoir faire un éloge mérité. Nous sommes bien loin d'être un critique consommé, et notre jugement n'est pas d'un grand poids: aussi n'avons-nous pas la prétention de diriger l'opinion publique en écrivant les quelques remarques suivantes, touchant le livre de M. Chapman; mais du moins nous nous efforcerons d'être sincère et impartial, en ne perdant pas de vue ceci, que la critique a pour but d'étudier les qualités et les défauts d'un ouvrage, afin d'en déterminer le mérite, et non pas de le déprécier ou de le louanger sans discernement, comme cela arrive trop souvent. De sorte que j'aurai la double satisfaction de remplir un devoir vis-à-vis du public, et de rendre à l'auteur un service réel en lui signalant ses défauts- puisque rien n'est parfait en ce monde- ce à quoi je ne pourrais pas parvenir à coups d'encensoir avec la meilleure volonté du monde. Pour accomplir notre tâche, nous nous autoriserons de cette maxime très-vraie: "Il est plus facile de critiquer que de faire."

La poésie de M. Chapman est belle, les vers sont généralement bien faits; mais, pour parler sincèrement, nous ajouterons que nous pourrions en reproduire quelques-unes qui pèchent plus ou moins gravement par l'hémistiche, la césure ou quelquefois même par l'hiatus, Par exemple, ce vers-ci est incorrect: De nos mères que nous avions si loin laissées

puisque l'hémisticlie coupe les deux mots inséparables. Nous avons remarqué quelques inversions risquées:

De ton rivage ouir les bruits harmonieux.

On peut aussi accuser de négligence plusieurs strophes tout entières; dans deux ou trois pièces on remarquera de plus des pensées sublimes qui ne sont pas rendues dans un style assez élevé, assez riche, des idées qui ne sont pas exprimées avec précision et avec la clarté et la force qu'elles exigent. L'Algonquine est un poëme invraisemblable. L'idée en est excellente et prête

à l'éloquence la plus entraînante; mais l'auteur n'a pas su tirer parti de son sujet. Cependant nous devons dire en toute justice qu'il y a de beaux passages.

Maintenant que la partie la plus difficile et la plus délicate de notre tâche est terminée, c'est avec un bien grand plaisir que nous constaterons que les beautés renfermées dans les poésies de M. Chapman suffisent pour racheter les ombres légères que nous venons de signaler. Nous aimons à le répéter, les vers sont bien faits et très-coulants, les strophes élégamment construites et harmonieuses; la rime est presque toujours riche et toujours aisée: on reconnaît là le vrai poëte.

Le sentiment qui domine dans Les Québecquoises, c'est la mélancolie. Ces poésies sont pleines de pensées touchantes et élevées. Le poëte aime la nature et y cherche Dieu; il entend sa voix paternelle dans les flots de mélodie qu'il a répandus à profusion dans l'air et les bois, sur les lacs, les montagnes et dans les solitudes. Il aime le murmure de la brise et le chant des oiseaux; il aime ce langage mystérieux, ces hymnes aériens qui s'élèvent sans cesse vers le ciel comme l'encens et la prière. Il unit sa voix à la grande voix de la nature pour célébrer la bonté et la grandeur infinies du Créateur. Une fleur lui rappelle un souvenir, un nuage dans le ciel remplit son cœur d'une tristesse résignée. Toutes ses élégies se ressentent des impressions qu'il reçoit; elle sont douces et charmantes.

Les vers suivants sont pleins de fraîcheur:

Depuis longtemps je laisse errer ma rêverie,

Comme au souffle du vent l'enfant, dans la prairie,

Livre son cerf-volant,

Comme la forêt fait flotter sa chevelure,

Comme la source épanche une onde claire et pure
Sur le galet roulant.

Laissant ployer mon front sous la mélancolie
Je parcours un par un les feuillets de ma vie,
J'évoque le passé,

Et je me ressouviens de mes blondes années,
Frèles fleurs que le vent du malheur a fanées
De son souffle glacé.

J'étais enfant. Avec mes petits camarades,
J'allais souvent jouer sous les vertes arcades
Des bosquets embaumės...............

Nous ornions nos chapeaux de roses, de pervenches,
Des oiseaux, nous allions, en écartant les branches,
Chercher les nids aimés.

A force de sueurs, de peines, de fatigues,
Dans le lit des ruisseaux nous élevions des digues
Où le flot bouillonnait,

Et, sous le jet d'argent d'une fraiche cascade,
Eparpillant dans l'air sa joyeuse roulade,
Un beau moulin tournait.

Là-bas, sous les novers, au bord de la falaise,
Nous bâtissions avec le galet et la glaise

Des tours et des châteaux,

L'été, sur les étangs nous possédions des flottes,
L'hiver, nous nous creusions dans la neige des grottes
Pleines de blancs cristaux.

Puis il fallait nous voir organiser des joutes,

Nous ranger en deux camps, charger quelqus redoutes
Qu'un groupe défendait !

Nous pourrions citer bon nombre d'autres passages pour le moins aussi beaux, et nous avons beaucoup remarqué les pièces suivantes: Un soir de Mai, La Vengeance Huronne, Ayez Pitié! Stabat Mater Dolorosa, etc.

M. Chapman n'a pas ces mouvements, ces élans fougueux, ni même ce cachet d'élégance qui distinguent M. L. H. Fréchette. Cependant son style est généralement pur et d'une fécondité exubérante. C'est en termes chaleureux et enthousiastes qu'il chante les grands jours de l'histoire canadienne.

Les Quebecquoises sont de charmantes poésies. Elles suffisent pour établir une réputation littéraire dans ce pays, où la littérature ne fait que naître, et même on sait que le célèbre poëte français François Coppée a paru les estimer beaucoup. Cet ouvrage devrait se trouver dans toutes les bibliothèques.

L'auteur des Québecquoises demeure à St. François de la Beauce, beau pays accidenté, campagnes poétiques s'il en est! Il est le fils de M. Georges W. Chapman, marchand, et neveu de feu Réal Angers, avocat et littérateur distingué.

M. W. Chapman, ayant fini son cours d'études, se mit à étudier le Notariat. Mais son imagination ardente ne trouvait pas son compte avec les froids axiomes de Pothier et la prose savante des jurisconsultes. Il mit de côté la loi et prit une lyre dont le son harmonieux exaltait ses sens. Il vit maintenant sous le toit paternel, où il se livre à la littérature et consacre tous ses moments aux muses. Agé seulement de 25 ans, il offre au public un volume qui contient la fleur de ses mélopées. Nous espérons que son dévoûnent à la littérature ne se relâchera pas, et si son premier volume est bien bon, nous sommes persuadé que les autres seront encore supérieurs !

LÉON LORRAIN.

Nous reproduisons ici, selon notre promesse, le décret que la sacrée Congrégation du Concile a porté, le 20 janvier dernier, relativement à la formule de profession de foi, ainsi que cette profession de foi elle-même, selon la forme prescrite par Pie IV et Pie IX.

Nous prenons aussi la liberté d'attirer l'attention de nos lecteurs sur l'allocution du Saint-Père, que nous insérons immédiatement après, tout entière.

C'est une page éloquente de l'histoire contemporaine de l'Eglise.

Comme on le voit, pour donner place à ces documents sans rien retrancher aux matières propres à notre Revue, nous avons -ajouté 16 pages à la présente livraison, et l'avons portée à 80.

C'est ce que nous tâcherons de faire toutes les fois que nous croirons devoir publier quelque document de grande importance, espérant nous rendre par là utile et agréable à nos lecteurs, et leur donner une preuve de notre bonne volonté.

DECRET RELATIF A LA FORMULE DE PROFESSION DE FOI

Quod a priscis Ecclesiae temporibus semper fuit in more, ut chistifidelibus serta proponeretur ac determinata formula, qua fidem profiterentur, atque invalescentes cuiusque aetatis haereses solemniter detestarentur, idipsum, sacrosancta Tridentina Synodo feliciter absoluta, sapienter præstitit Summus Pontifex Pius IV, qui Tridentinorum Patrum decreta incunctanter exequi properans, edita Idibus Novembris 1564 Constitutione iniunctum Nobis, formam concinnavit professionis fidei recitandam ab iis, qui cathedralibus et superioribus Ecclesiis præficiendi forent, quive illarum dignitates, canonicatus, aliaque beneficia ecclesiastica quæcumque curam animarum habentia essent consecuturi, et ab omnibus aliis, ad quos ex decretis ipsius Concilii spectat: nec non ab iis, quos de monasteriis, conventibus, domibus, et aliis quibuscumque locis regularium quorumcumque Ordinum, etiam militarium, quocumque nomine vel titulo provideri contingeret. Quod et alia Constitutione edita - eodem die et anno incipiente In sacrosancla salubriter præterea extendit ad omnes doctores, magistros, regentes, vel alios cuiuscumque artis et facultatis professores, sive clericos sive laicos, vel cuiusvis Ordinis regularis, quibuslibet in locis publice vel privatim quoquomodo profitentes, seu lectiones aliquas habentes vel exercentes, ac tandem ad ipsos huiusmodi gradibus decorandos. Iam vero, cum postmodum coadunatum fuerit sacrosanctum Concilium Vaticanum, et ante eius suspensionem per Litteras Apostolicas Postquam Dei munere diei 20 Octobris 1870 indictam, binae ab eodem solemniter promulgatæ sint dogmaticæ Constitutiones, prima scilicet de Fide Catholica, quæ incipit Dei Filius, et altera de Ecclesia Christi, quæ incipit Pastor æternus, non solum

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