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des plus héroïques vertus et des plus brûlants désirs d'y atteindre. Le martyr chantait cette gloire éternelle sur son bûcher comme le prix réservé à ses souffrances; dans les ténèbres sacrées des catacombes, les premiers chrétiens se préparaient à soutenir l'éclat du dernier jour, et se pénétraient loin du monde des impressions du céleste amour. Toujours les saints vécurent d'espérances éternelles, toujours ils répétèrent Que la terre est vile quand je regarde le ciel! Les plus sages, les plus vertueux, les plus calmes, les plus instruits parmi les hommes aspirèrent avec ardeur au ciel et à la possession de Dieu. Fait immense, universel, aussi ancien que le monde; les patriarches ne parlaient que de leur pèlerinage, dies peregrina— tionis meæ; les poëtes en consacraient l'existence dans leurs chants: nous le rencontrons partout où apparaît la vertu. Ah! c'est qu'il tient au fond de notre être; car nous y trouvons avec la connaissance, avec le désir et le besoin de Dieu, la possession de Dieu luimême.

Et ce fait, Messieurs, qui tient une si grande place dans l'histoire de l'homme, que signifie-t-il à son tour, sinon encore la destination unique et dernière, divine et surnaturelle de l'homme à la vision et à la gloire des cieux ?

CINQUANTE-TROISIÈME CONFÉRENCE

ÉCONOMIE DE L'ORDRE SURNATUREL

OU PLAN DU CHRISTIANISME

MONSEIGNEUR,

Quelle bouche a pu faire entendre ici-bas ces étonnantes paroles rapportées dans l'Évangile : « Je suis la voie, la vérité, la vie! » Quel homme sur la terre a pu se croire en droit de se nommer ainsi lui-même la voie qu'il fallait suivre, la vérité qu'il fallait croire, la vie qui devait animer nos cœurs et les remplir de grâce et de vertu ?

Celui que le monde, à peine sorti des mains du Créateur, dut saluer de loin comme son réparateur, par un culte de foi et d'espérance; cet enfant d'Abraham qui devait apporter à toutes les générations l'abondance des bénédictions divines; cet illustre rejeton de la tribu royale, promis comme chef et législateur de l'univers, l'attente des nations et le désir des collines éternelles; le prophète plus grand

La religion est bien aussi la part du cœur. Quand une croyance le rend tranquille, satisfait, lui inspire la vertu jusqu'à un généreux renoncement, le porte avec humilité à une confiance entière en Dieu, en sa providence, en son autorité; quand cette croyance est la grande, l'unique consolation de nos maux, le sentir, en remplir son âme, c'est déjà, je le pense, un grand pas de fait dans la voie de la vérité.

Ainsi en est-il de la croyance à la vision intuitive de Dieu enseignée par l'Église; elle est en rapport, en

harmonie avec notre cœur et tout notre être. Ouvronsnous donc à ses bénignes influences, gardons-nous de la repousser, de la dédaigner, parce qu'elle porte en soi le caractère du surnaturel.

La nature ne saurait y parvenir par ses forces, il faut des secours surnaturels, il faut la grâce; mais Dieu la promet, il l'offre à tous, sachez-le bien : je l'exposerai plus tard. Aujourd'hui il suffit à mon dessein de vous dire que l'Église, dans ses plus solennels conciles, a déclaré dès l'origine que les seules forces de la nature ne peuvent produire les œuvres méritoires de la vie éternelle; que l'âme ne peut être ni devenir d'elle-même et naturellement bienheureuse par la vision intuitive; qu'il lui faut l'élévation surnaturelle de la lumière et de la gloire divines 1. Elle parlait avec saint Paul : « La vie éternelle est une grâce de Dieu.» Gratia Dei vita æterna. Oui, c'est un fruit de sa grâce, et non pas de la nature.

Ainsi l'homme, destiné à une fin surnaturelle, a

1 Concile de Vienne sous Clément V, 1311, c. Beguard.

pour y tendre dans son état présent des moyens proportionnés et surnaturels : il est donc déjà par là même dans un état surnaturel. Nul doute à cet égard.

Et qui connaît l'essence de Dieu, sinon Dieu luimême et Dieu seul? Saint Paul l'affirmait comme chose évidente: Quæ Dei sunt, nemo cognovit nisi spiritus Dei. Pénétrer en Dieu, scruter ses profondeurs, vivre de l'intuition même divine, en sorte que le regard de l'âme aille atteindre et toucher, pour ainsi dire, Dieu en lui-même pour se nourrir de son Verbe et de son Esprit, c'est ce qui est au-dessus de toute nature intelligente. Si la vie murée de chacun de nous, si l'intérieur de l'homme est impénétrable à toute force naturelle, que dire de l'intérieur même de l'infini, océan sans fond et sans rive, abime incommensurable?

Peut-être un jour, Messieurs, essaierons-nous devant vous quelques recherches prudentes sur cet état sublime, sur cette consommation dernière de nos espérances; aujourd'hui trois choses demeurent établies, comme nous nous étions proposé de le faire :

L'homme est destiné à la béatitude et à l'union divine. Cette union, suivant la foi, est la vision même intuitive de Dieu.

La vision intuitive de Dieu est surnaturelle.

Ainsi la destination dernière de l'homme est surnaturelle.

Mais ce qui est si convenable pour la raison, et si positivement enseigné par la foi, devient aussi une

1 I Cor. II, 11.

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