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Crainte de Dieu.

U'EST-CE que la crainte du Seigneur? C'est aujourd'hui l'objet de mes réflexions.

N'ai-je pas été, dès mon enfance, imbu de fausses idées sur ce sentiment? Le mot crainte n'était-il pas accompagné, dans mon esprit, d'une sorte d'adversion? Je me rappelle que je craignais les êtres méchans, les êtres qui me faisaient du mal. La crainte du Seigneur ne saurait être une semblable crainte. Dieu est amour, et peut-on trembler devant l'amour! Non, la crainte de Dieu est un tout autre sentiment.

L'inquiétude d'agir contre la volonté de celui qu'on aime, voilà la crainte dans sa pureté; craindre ce qui est contraire à l'amour divin, c'est la crainte pure et salutaire, c'est la crainte de l'amour. C'est ainsi et non autrement que je veux vous craindre, ô mon Dieu! Vous ne ressemblez point aux grands de la terre. Ils ont des esclaves rampans à leurs pieds, qui tremblent en recevant leurs ordres. Mais vos relations avec les mortels sont celles d'un père avec ses enfans, l'amour et la confiance forment la chaîne qui vous unit avec les hommes.

Pardonnez, ô mon Dieu! si je vous ai reconnu si tard. Je suis innocent; il vous ressemblait si peu le portrait du Dieu de mon enfance. Si un orage se formait dans les airs, si les nuages s'obscurcissaient Entends-tu le tonnerre qui gronde, c'est Dieu qui est irrité; voilà le langage de ceux qui m'entouraient. Mon âme tremblait, en étendant vers vous ses mains innocentes; je vous craignais comme un ennemi, je me cachais devant vous, vous considérant comme les hommes qui ont leurs bons et leurs mauvais momens. Pardonnez, Dieu de bonté, je vous méconnaissais, je vous croyais un Dieu puissant et terrible; à peine osais-je élever mes regards vers vous; je vous comparais aux grands de la terre, dont l'élévation nous cause des vertiges. Pardonnez, ô mon père! si je vous ai long-temps méconnu, mon cœur n'est point coupable. Combien de fois, dans mes promenades solitaires, au milieu des campagnes, n'admirai-je pas les indices de votre bonté! La simple fleur des champs me la rappelait. La rose épanouie inspirait la confiance à mon cœur; la violette parfumée du vallon annonçait votre bienfaisance. Tombais-je dans une faute, et voulais-je recourir à vous, comme un enfant à son père, on m'arrêtait par la crainte; on vous mettait la verge de punition en main; on vous armait du tonnerre, et vous

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deveniez un vengeur cruel des erreurs de l'humanité.

Que j'avais alors le cœur serré! à peine osaisje lancer un regard fugitif vers le ciel; je tremblais, en apercevant un nuage, et déjà j'imaginais voir votre foudre me réduire en poussière. J'avais recours aux offrandes, croyant que vous ressembliez aux hommes qui se laissent apaiser par les présens. Quelquefois désolé, étendu sous un arbre, je me dérobais aux rayons bienfaisans du soleil, m'abandonnant à ma tristesse. Tout-à-coup j'apercevais un jeune oiseau folâtrer au milieu des plaisirs de la nature; je le voyais sautiller de branche en branche, je l'entendais vous adresser son cantique de louanges et je me disais : C'est vous qui le nourrissez, c'est vous qui lui avez donné cette légèreté, cette gaîté pour le faire jouir de son existence; alors je reprenais courage; un ange inspirait à mon cœur de plus doux sentimens; je me rapprochais de vous, et je retrouvais un père; puis, lisant vos saintes écritures, j'y puisais du soulagement et de la consolation, pour mon cœur, avec la persuasion que le mal, suite naturelle des mauvaises actions, n'est qu'un avertissement qui doit nous rapprocher de la vérité et de la bonté, dans lesquelles consiste le vrai bonheur de l'homme. Je compris que vous ne châtiez point, comme les

hommes, par haine ou par caprice; mais que vos châtimens ne sont qu'amour, ne sont que des avertissemens pour notre bonheur. Quelle joie inondait mon âme à cette pensée ! de quels doux sentimens ne se remplissait pas mon cœur! Quelle satisfaction pour moi, si j'avais pu presser contre mon sein tous mes semblables courbés sous le poids de la douleur, et répéter à chacun d'eux : Ne tremble point, ne crains point le père des hommes, retourne à lui, retourne dans ses bras; il pardonne, car il ne cesse jamais d'être amour.

Offenser Dieu.

FFENSER Dieu! que signifie cette expression? Je sens toute l'importance de ce sujet; on m'en a souvent parlé: rectifions nos idées à cet égard. J'imaginai longtemps qu'on pouvait vous offenser, ô mon Dieu ! comme l'on offense un mortel. Je vous considérais comme un maître qui donne des ordres dans sa maison, et qui s'irrite, qui prend de l'humeur, quand ils ne sont point exécutés. Je sens que ces idées étaient fausses; vous n'êtes point homme; ainsi vous offenser n'est point une offense comme celle commise envers un

homme. Cet objet mérite des réflexions plus sérieuses. Qu'appelle-t-on offenser Dieu? Pécher, violer les commandemens de Dieu, en voilà le sens ordinaire.

Mais que signifie ce mot offense? Faire injure à quelqu'un. Ainsi donc en violant les commandemens de Dieu, je fais injure à Dieu. Y a-t-il de la justesse dans cette expression? Je ne saurais vous représenter à mon esprit comme un homme; mais tel que vous êtes, comme un Dieu, comme le plus pur amour. Vous nous aimez; ainsi vos commandemens sont les desseins de votre amour; vous nous avez donné vos commandemens pour nous rendre heureux; en ne les observant point, j'agis contre vos desseins, et pour me servir d'une expression humaine, je fais injure à votre amour. Comment rendre cette définition plus sensible à mes faibles lumières? Je m'examine moimême. J'aime l'enfant que vous m'avez donné, et, par conséquent, je veux tout ce qui peut rendre mon enfant heureux. Ne touche point à ce fruit, dis-je à mon enfant, le suc en est mortel, tu en souffrirais. L'imprudent en mange cependant et se donne la mort. Mon fils agit en ce moment contre les desseins de mon amour pour lui, il fait injure à mon amour.

C'est de la même manière que l'homme agit contre l'amour divin, en violant ses comman

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