Obrazy na stronie
PDF
ePub

gloire si naturel aux âmes nobles, l'envie de plaire à son Prince et de mériter son affection, l'empressement de signaler cette valeur invincible, ce courage héroïque qu'il avait reçu comme par héritage de ses ancêtres, l'exemple de tant d'autres Seigneurs qui quittaient tout par les mêmes motifs, firent voler Philippe Pot au secours de Constantinople assiégée, et fortement pressée par les Turcs.

La fortune ne seconda point la valeur de ce jeune Héros, ou plutôt sa valeur fut inutile contre une nombreuse troupe de Janissaires dont il se vit tout-à-coup environné et accablé ; il combattit cependant long-temps avec une intrépidité qui charmait ses ennemis mêmes, il succomba enfin sous l'effort de la multitude: on l'arrêta prisonnier, mais il leur vendit bien cher sa liberté.

Les Janissaires crurent qu'ils ne pouvaient mieux témoigner leur zèle à Mahomet II, leur Empereur, qu'en lui conservant un prisonnier tel que Philippe : ils racontèrent au Sultan la manière dont il avait combattu et défendu sa liberté et sa vie. Ce Prince admira l'air noble, et sur-tout la valeur de son nouvel Esclave, et conçut en même temps l'espérance de pouvoir l'attirer à son service. Croyant

réussir dans ce dessein, il ordonna que Philippe serait séparé des autres Esclaves, qu'il serait traité plus doucement, chargé de chaînes moins pesantes, et dispensé des travaux auxquels ces barbares enploient ceux qui tombent dans leurs fers. Les promesses les plus magnifiques, les caresses les plus sensibles, les espérances les plus flatteuses furent vainement mises en usage. On fit succéder les menaces les plus effrayantes, les peines les plus humiliantes, enfin les traitemens les plus cruels; mais rien ne put ébranler Philippe : et quelque fureur que Mahomet fit éclater contre lui, il n'en fut que plus ferme dans sa foi ; enfin, lui dit le Sultan, si tu peux vaincre l'ennemi que je t'opposerai; je te promets la liberté, et je te renverrai dans ta patrie.

Mahomet, tout inhumain qu'il était, aimait la valeur, parce qu'il en était luimême rempli; et jamais Prince ottoman n'a étendu si loin ses conquêtes, et porté à un plus haut degré la gloire de cet Empire que Mahomet II. Ainsi il ne put jamais se résoudre à faire mourir un jeune homme en qui il connaissait tant de vertus et de bravoure. Cette proposition combla de joie Philippe. Appuyé sur la confiance qu'il avait en Notre-Dame de Bon-Espoir, dont il portait l'image sur lui, il se pré

pare au combat, il en attend le moment avec impatience.

Le jour destiné pour ce spectacle arrivé, Philippe est conduit dans une espèce de cirque, où le Sultan était avec toute sa Cour. L'ennemi qu'on opposa à Philippe était un lion affamé. A la vue d'un tel ennemi, notre Héros saisit un sabre qu'on lui avait donné pour se défendre, et levant les yeux au Ciel, il s'écrie avec un ton qui répondait de la victoire, Tant L vaut. Le lion, avec des yeux étincelans, approche et s'élance sur Philippe, qu'il regardait déjà comme sa proie; mais Philippe, d'un coup de sabre, coupe les deux pieds de devant du lion : l'animal tombe, écume, effraie tous les assistans par ses rugissemens, excepté Philippe, qui s'élance à son tour surson ennemi, et d'un autre coup il lui enlève la langue, et lui perce enfin le cœur. Plein de joie et de reconnaissance, il s'écrie à l'instant: Tant Lvaut, publiant parlà, que ce n'était qu'à celle qu'il avait invoquée, qu'il était redevable d'un si heureux succès.

Charmé d'un tel courage et d'une si grande adresse, Mahomet descend dans le cirque, embrasse le vainqueur, se dépouille du baudrier d'où pendait son cimeterre, le met lui-même au col de Philippe, et après l'avoir honoré des éloges

que méritait un si grand courage, il lui rendit la liberté, et lui accorda la permission de retourner dans sa patrie.

Philippe n'y fut pas plutôt arrivé, que pour perpétuer les marques de sa reconnaissance, il fit peindre Notre-Dame de Bon-Espoir sur un tableau (1), il y est représenté à genoux aux pieds de la Vierge, sa devise Tant Lvaut sortant de sa bouche. A côté on lit cette Hymne en rondeau :

MERE de Dieu, très glorieuse,
Belle, plaisanté et saicoureuse:
Zaphis qui jamais fut sur terre,
Très-humblement je viens requerre
Ta sauve-garde précieuse.

Tu m'a préservé jusques ici
L'honneur, la vie et la santé,
Sous l'espoir de ta grand merci,
Je me rends à ta volonté.
Sauve-moi, Dame glorieuse,
De la prison tant rigoureuse
Où l'on ne voyait que cruauté;
Garde-moi d'y être bouté,
Car à chacun tu es piteuse,
Mère de Dieu!

Tant L vaut et a valu

A celui qui a recouru

A celle pour qui dit ce mot,
Te suppliant, Philippe Pot,
Qui de tout mal l'a secouru.

TANT L VAUT.

(1) Ce tableau était à Notre-Dame; il n'y a que soixante-six ans environ qu'il n'y est plus

Mais Notre-Dame de Bon-Espoir fut encore plus favorable à la ville de Dijon, assiégée par les Suisses en 1513; tous leurs Cantons, excités par les ennemis de la France, croyaient profiter, et de l'éloignement des troupes du Roi; et de l'impossibilité où LOUIS XII se trouvait de secourir la Bourgogne, pour venir fondre sur cette Province, la désoler, la piller et la réduire sous leur obéissance. Ils se hâtèrent de lever une armée considérable, qui fut bientôt grossie par les secours que leur donnèrent, et l'Empereur et les

Comtois.

Le Roi, informé de leurs desseins dès

il était à Barbirey, chez madame de Santaucours, qui l'avait demandé, parce qu'elle descendait de ce grand homme. C'est cette dame qui a communiqué l'histoire de cette action, décrite par un Religieux de Cîteaux, contemporain de Philippe Pot qui mourut au mois de Septembre de l'an 1494, et fut inhumé à Cîteaux, dans la chapelle de Saint-Jean, où il était représenté sur un beau mausolée que lui érigea sa famille, et sur lequel on lisait une épitaphe de quarante-huit vers élégiaques, composée par le même Religieux, qui fit un Mémoire de sa vie, conservé dans les archives de cette Abbaye, jusqu'au moment où elles ont été dispersées au commencement de nos trou bles. Le mausolée de Philippe Pot a été transféré à Dijon, et se trouve aujourd'hui rétabli au Musée lapidaire de M. Richard de Vesvrotte.

« PoprzedniaDalej »