formé; car on voulait orner le portail de deux tours fort élevées, et faire un dôme de la tour où sont à présent les cloches. Ce dôme était déjà commencé, et comme il fallait une dépense considérable, on se flattait que la charité des enfans serait aussi ardente, aussi abondante que celle des pères, que les neveux acheveraient ce que leurs ancêtres avaient commencé avec tant de générosité; mais la rareté de l'argent, les impôts dont les ducs de Bourgogne étaient obligés de charger leurs Sujets pour fournir aux frais des guerres, avaient beaucoup ralenti le zèle des Paroissiens et tari les ressources sur lesquelles on avait compté, pour donner à cette Eglise la perfection que s'étaient proposé ceux qui en avaient jeté les premiers fondemens: il faut avouer qu'ils avaient moins consulté leurs facultés que leur zèle pour l'honneur et la gloire de Dieu et de sa très-Sainte Mère. Pour ranimer cette première ardeur, les Papes, en différens temps, accordèrent des Indulgences, et ouvrirent tous les trésors de l'Eglise à ceux qui contribueraient à achever cette fameuse Basilique; mais il fallait que les finances fussent absolument épuisées, que tout l'argent eût été absorbé, et que les Peu ples n'eussent plus que de la bonne volonté, comme il arrive ordinairement dans les Etats fatigués par de longues guerres, puisque la foi aux Indulgences, qui n'a jamais été plus vive ni plus efficace que dans ces temps où elle n'avait pas encore trouvé de contradicteurs, ne put cependant rien obtenir de nos Concitoyens. On s'efforça d'embellir ce qui était déjà fait, à la vérité, selon le goût qui régnait alors on décora les portes par lesquelles on entre du péristile dans l'église, de toutes ces figures que l'on y voyait encore avant nos troubles: elles représentaient les Patriarches, les Prophètes, les Pontifes et les Rois de l'Ancien et du Nouveau Testament, qui ont rapport avec Jésus-Christ; les uns, parce qu'ils l'ont figuré, les autres, parce qu'ils l'ont annoncé ; ceuxci, parce qu'il descend d'eux selon la chair; ceux-là, parce qu'ils ont défendu son Culte et sa Foi: tous les Mystères de Dieu fait Homme y étaient représentés aussi bien que toute l'histoire de la Sainte Vierge chaque figure était accompagnée d'un emblême, ou de l'attribut, qui faisait connaître ce qu'elle représentait. Toutes les statues qui étaient dans les cintres étaient dorées: on y lisait beaucoup d'inscriptions en lettres très-gothi ques, toutes tirées de l'Ecriture: les unes étaient à la gloire de Jésus-Christ, autres à l'honneur de sa Mère. les Parmi ces figures, on y voyait, comme je l'ai déjà remarqué, la statue d'un Duc et celle d'une Duchesse: selon toutes les apparences, c'était EUDES IV, avant dernier duc de Bourgogne de la première Race, et Jeanne de France son épouse fille de Philippe-le-Long, roi de France; car c'est pendant leur règne que l'Eglise fut achevée. Les Bouchers de cette Ville firent construire la Chapelle que l'on voyait à droite en entrant dans le même péristile: ils la consacrèrent à Saint Antoine, abbé, qu'ils choisirent pour leur Patron: les armes du duc de Bourgogne étaient attachées à la voûte de la Chapelle. Tel était l'amour qu'on avait pour ces Princes: on plaçait leurs armes par-tout: leurs personnes étaient encore plus fortement imprimées dans le cœur de leurs Sujets : jamais Souverains n'ont été plus chéris des Peuples que les ducs de Bourgogne. Le VicomteMaïeur, les Echevins et le Conseil de la ville se sont assemblés souvent dans cette Chapelle pour délibérer des affaires les plus importantes, surtout dans le seizième siècle; du moins voit-on plusieurs délibérations datées de ce lieu. Peut-être s'y assemblait-on, parce que la tour gauche du portail était occupée par les chartres (1) de la ville, les Magistrats l'ayant choisie pour y déposer les titres de la commune de Dijon, convaincus de tout temps qu'ils ne pouvaient en conserver plus sûrement le trésor, qu'à l'ombre de la Sainte Vierge, dans un lieu qui lui est, consacré, et qu'elle favorise d'une protection si particulière. Philippe-le-Hardi, le premier des Ducs de la dernière Race, voulut aussi contribuer à l'ornement de cette Eglise. Il venait de châtier les rebelles de Flandre: Courtrai sur-tout, livré au pillage, consumé par le feu, avait appris aux autres villes le terrible sort qui les menaçait, si elles persistaient dans leur révolte contre leur Souverain. Il y avait dans cette ville une magnifique horloge: le duc de Bourgogne la fit démonter; il l'envoya avec le timbre à l'église Notre-Dame de Dijon, comme un monument et un trophée que sa reconnaissance érigeait à la Sainte Vierge: il fit placer cette horloge (2) à l'endroit où nous la voyons aujourd'hui. (1) Ces chartres déposées dans cette tour depuis plusieurs siècles furent transférées en 1765, aux archives de l'Hôtel-de-Ville.. (2) Cette Horloge ainsi que les figures en fer Quand Salomon eut achevé de bâtir le Temple du Seigneur, il y établit des Lévites pour chanter les louanges du TrèsHaut, des Prêtres pour offrir des Sacrifices, des Docteurs pour expliquer la Loi; il assigna à chacun, des fonds et des revenus pour subsister; il y conduisit l'Arche du Seigneur, qu'il renferma dans le Sanctuaire ; ensuite il fit la Dédicace du Temple avec cette magnificence qui est décrite dans le second Livre des Paralippomènes. C'est ce que firent nos ancêtres avec un zèle auquel on ne peut donner trop de louanges: l'Eglise n'était pas encore achevée, que plusieurs avaient déjà consacré une partie de leurs biens pour y fonder des Prêtres, et au milieu du quatorzième siècle, le nombre des Bénéficiers était déjà très-considérable. L'abbé de SaintEtienne envoya un Vicaire pour y faire les fonctions de Curé; Vicaire qu'il changeait quand il le jugeait à propos, parce qu'il en était le Curé primitif. Les Vicaires alors, et jusqu'à la fin du dix-septième siècle, n'étaient que des espèces d'Economes qui affermaient les revenus de la battu, que nous voyons encore à présent, ne sont plus les mêmes, que celles qui furent amenées de Courtrai; il n'y a que la cloche qui n'a point été changée. |