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Le clergé antinational ne tenait, en effet, aucun compte du décret sur la liberté des cultes; il disait la messe dans les églises qui lui étaient interdites et prêchait ouvertement le royalisme.

La loi du 21 février fut donc encore prématurée, puisque la révolte contenue éclata plus violemment que jamais. Cependant, la République, pour ne point exaspérer les esprits et pour faire cesser la guerre civile, mit toutes les églises non aliénées à la disposition des prêtres qui feraient acte de soumission aux lois du pays. Mais ce nouveau serment, le clergé ne voulut pas le prêter, et il considéra cette formalité comme un prétexte pour mettre encore en mouvement ses compagnies d'émeutiers. La Convention dut encore voter des lois de bannissement et compléter la loi sur la police des cultes.

Les prêtres gallicans, par contre, protestent de leur égal respect pour l'autorité civile et pour l'autorité papale; mais leurs efforts pour apaiser la lutte de l'Eglise romaine et monarchique contre la République n'aboutirent pas. Les prêtres réfractaires violerent chaque jour la loi sur la police des cultes. Le Directoire, pour anéantir les ennemis de la nation se résout alors à attaquer directement la papauté; contre les prêtres insoumis il vote des lois de salut public. Mais les Anciens ne le suivent pas dans cette voie; ils désiraient plutôt l'indulgence à l'égard des révoltés; et, le 5 septembre 1796, les prêtres étaient admis à prendre jouissance des biens qui avaient appartenu à l'Eglise d'autrefois.

D'un autre côté, par l'intermédiaire du général Bonaparte, le Gouvernement fait pressentir le pape pour le décider à prêcher aux réfractaires la soumission à l'Etat. Le Saint-Siège, qui apercevait dans la République de sérieux symptômes de désagrégation, ne se hâtait point d'acquiescer; le triomphe de la

contre-révolution l'assurait d'un meilleur avenir. En effet, elle était déjà triomphante. Les réfractaires, par la loi du 24 août étaient solennellement amnistiés; il fallut que la République, dans un sursaut d'énergie, se défendît par la loi du 19 fructidor, véritable coup d'Etat révolutionnaire. Le clergé insoumis et le pape subirent les durs effets de cette loi. Celui-là, par des prescriptions en masse, rapides et sans conditions; celui-ci par la lutte qu'il eut à soutenir dans sa ville pour empêcher que ne se dresse, en face de son pouvoir, un gouvernement démocratique.

A Rome, on ne recula point devant l'assassinat de l'ambassadeur Basseville et du général Duphot; et la République dut lancer contre son ennemi une armée qui fit prisonnier celui dont la Révolution avait tant à redouter.

Mais le régime de fructidor ne fut pas sans réveiller le fanatisme. Partout, ce sont des insurrections; les provinces sont travaillées par les prêtres qui, bien que bannis, viennent de nouveau ensanglanter la France. Plus qu'aux périodes troublées que le pays vient de vivre, la passion contre-révolutionnaire fanatise les esprits et devient, cette fois invincible. Le Directoire était au-dessous de sa tâche. Bonaparte s'offrit en sauveur.

Il voulut d'abord la restauration religieuse. Rien n'était plus politique pour l'accomplissement de ses ambitions. Un clergé gallican ne pouvait être utile à Bonaparte, puisque ce clergé, en dehors de Rome, était sans autorité sur le pays. Il était done de toute nécessité que les relations avec le Saint-Siège fussent reprises. Mais un tel acte devait se produire à son moment. Bonaparte n'apporta aucune hâte malencontreuse dans la poursuite de ses desseins.

La pacification religieuse, il l'obtint par des mesures pondérées, où les concessions mutuelles s'équili

braient habilement. Son ambition n'était, semblait-il, que d'assurer la plus complète liberté des cultes; il y arriva sans secousses. Que lui demander de plus? Le clergé constitutionnel se passait de Rome. Le clergé autrefois réfractaire entretenait librement avec le Saint-Siège les relations qui lui convenaient. Sous ce régime, la France revenait au calme.

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Le concordat de 1801. Toutefois, Bonaparte poursuivait son idée. Pour exercer sur le pays le pouvoir du maître, il avait besoin de rétablir en France les pratiques religieuses d'autrefois; de plus, pour la complète réussite de ses ambitions politiques, il fallait qu'il pût mettre à leur service la complaisance, sinon la complicité du souverain pontife.

Dès la nomination du nouveau pape, le 14 mars 1800, le premier consul commença ses avances. Du premier coup, il offrait à Pie VII ses anciens Etats. Par la même occasion, il lui demandait son avis sur l'état de choses ecclésiastiques en France. Mais le gouvernement consulaire ne paraissait pas suffisamment stable au Saint-Siège pour qu'il engageât d'emblée des négociations.

Ce fut seulement au lendemain de Marengo, que le pape, s'attendant à voir l'Italie envahie par les troupes françaises, fit entendre à Bonaparte qu'il était prêt à entamer des pourparlers. Selon le désir du premier consul, c'est à Paris qu'ils s'ouvrirent. L'archevêque Spina, bien que délégué officiel du pape était néanmoins sans pouvoirs pour traiter quoi que ce fût. Mis en face du représentant du Gouvernement, il exposa, d'une façon si casuistique les prétentions du Saint-Siège que l'accord entre eux ne put s'établir.

Le plan de Bonaparte n'était pas compliqué.

- L'Etat salarie les ministres du Culte. On fait table rase réfractaires et constitutionnels donnent leur démission. Le premier consul désigne les titulaires;

le pape donne l'institution canonique. Les évêques nomment les curés. L'Eglise accepte la confiscation des biens ecclésiastiques. Tout le clergé prête serment de fidélité au Gouvernement.

Sur ces bases, l'entente est possible.

Mais Rome a d'autres visées.

En premier lieu, elle veut qu'il soit proclamé que le catholicisme est religion d'Etat en France. Quant aux réfractaires, aux ennemis de la République, ils avaient trop mérité de l'Eglise pour que le SaintSiège pût les contraindre à lonner leur démission. Quant aux évêques constitutionnels, il exigeait que tous reconnussent publiquement leurs erreurs.

D'autre part, le pape s'opposait aux règlements de police, quels qu'ils fussent. L'Etat civil n'avait aucun droit de commandement, de surveillance sur l'Eglise omnipotente. Enfin, en ce qui concerne les biens, il faisait abandon de ce qui avait été aliéné; mais il voulait que l'6glise pût recevoir des biensfonds par voie de legs ou de donation.

Tels étaient les desiderata du pape en face de ceux du premier Consul. Bonaparte aima mieux attendre l'écrasement de l'Autriche avant de conclure avec Rome. De son côté, le pape désirait connaître les résultats de la guerre avant de prendre de sérieux engagements avec le Gouvernement français.

Mais, après le traité de Lunéville, alors que les armées françaises occupaient tout le territoire de l'Eglise, Pie VII, par la force des choses, dut négocier avec le premier consul. Le délégué de Rome réclama Ferrare, Bologne et Ravenne. Il n'eut rien. Napoléon ne voulait point entendre parler de restitutions tant que le concordat, tel qu'il l'avait conçu et rédigé, n'aurait pas obtenu l'agrément du pape. Et, pour brusquer les choses, le premier consul expédia à Rome le diplomate Cacault, qui avait pour mis

sion de forcer la main au pape. Mais il n'aurait pu y parvenir. Le pape avait fait dresser un contre-projet par une congrégation de cardinaux, et il se préparait à connaître la réponse qu'allait lui faire le premier consul, quand il reçut un avis officiel qu'un délai de cinq jours lui était accordé pour accepter le concordat présenté par la France.

Aussitôt le pape envoie à Paris un négociateur, muni de pleins pouvoirs, le cardinal Consalvi, qui, voyant sur place combien les hommes du Gouvernement et des hautes fonctions étaient contraires à l'idée d'un concordat, eut la crainte de laisser échapper l'occasion de traiter avec Bonaparte s'il ne lui faisait pas de pénibles, mais nécessaires concessions.

On ne parla plus d'une religion d'Etat; il fut question d'une religion catholique a qui est celle de la majorité des Français ». Sur tous les autres points, Napoléon resta intraitable. Il exprima même le désir de voir l'Eglise soumise, sans arrière-pensée, à un règlement de police.

Le cardinal Consalvi ne se permit aucune objection. Le 15 juillet 1801, le Concordat était signé, mais il ne fut mis en vigueur qu'au mois d'avril 1802, après l'établissement de la législation à la police des cultes.

Il est indiscutable que le mécontentement contre le premier consul fut très vif dans toutes les sphères politiques fidèles aux principes de la Révolution. Le Conseil d'Etat même le désapprouva par son silence. Le clergé constitutionnel, qui voyait de nouveau s'ouvrir l'ère des bulles pontificales et, qui, en sa qualité, n'ignorait pas tout ce dont étaient capables la rouerie et l'astuce du Gouvernement romain, fit part à Napoléon de ses justes alarmes. Le Sénat, le corps législatif souffraient pour la dignité nationale, car, alors même que le Concordat était favorable aux intérêts de l'Etat français, il n'en restait pas moins

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