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MESSA LA.

Parlez-lui, croyez-moi.

TITUS.

Je fuis perdu, c'eft elle.

321

SCENE III.

TITUS, MESSALA, TULLIE,
ALGIN E.

ALGINE.

ON vous attend, madame.

TULLIE.

L'ingrat me touche encor,

Ah fentence cruelle!

& Brutus à mes yeux

Paraît un dieu terrible armé contre nous deux. J'aime, je crains, je pleure, & tout mon cœur s'égare.

Allons.

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Ah! dans ce jour affreux,

Je fais ce que je dois, & non ce que je veux;
Je n'ai plus de raison, vous me l'avez ravie.
Eh bien, guidez mes pas, gouvernez ma furie;
Régnez donc en tyran fur mes fens éperdus;
Dictez, fi vous l'ofez, les crimes de Titus.

Théatre. Tom. I.

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Non, plutôt que je livre aux flammes, au carnage, Ces murs, ces citoyens, qu'a fauvés mon courage; Qu'un père, abandonné par un fils furieux,

Sous le fer de Tarquin...

TULLI E.

M'en préfervent les dieux!

La nature te parle, & fa voix m'eft trop chère;
Tu m'as trop bien appris à trembler pour un père;
Raffure-toi; Brutus eft déformais le mien;
Tout mon fang eft à toi, qui te répond du fien:
Notre amour, mon hymen, mes jours en font le gage;
Je ferai dans tes mains, fa fille, fon ôtage.
Peux-tu délibérer? Penfes-tu qu'en fecret
Brutus te vit au trône avec tant de regret?
Il n'a point fur fon front placé le diadême;
Mais fous un autre nom n'eft-il pas roi lui-même ?
Son règne eft d'une année, & bientôt... mais hélas!
Que de faibles raisons, fi tu ne m'aimes pas !
Je ne dis plus qu'un mot. Je pars... & je t'adore.
Tu pleures, tu frémis, il en eft tems encore;
Achéve, parle, ingrat, que te faut-il de plus?
TITUS.

Votre haine : elle manque au malheur de Titus.
TULLIE.

Ah! c'est trop effuyer tes indignes murmures,
Tes vains engagemens,, tes plaintes, tes injures;
Je te rens ton amour, dont le mien eft confus,
Et tes trompeurs fermens, pires que tes refus.
Je n'irai point chercher au fond de l'Italie
Ces fatales grandeurs que je te facrifie,

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Et pleurer loin de Rome entre les bras d'un roi,
Cet amour malheureux que j'ai fenti pour toi.
J'ai réglé mon deftin; Romain, dont la rudeffe
N'affecte de vertu que contre ta maîtreffe,
Héros pour m'accabler, timide à me fervir,
Incertain dans tes vœux, apprens à les remplir.
Tu verras qu'une femme, à tes yeux méprifable,
Dans fes projets au moins était inébranlable;
Et par la fermeté dont ce cœur eft armé,
Titus, tu connaîtras comme il t'aurait aimé.
Au pied de ces murs même où régnaient mes ancêtres,
De ces murs que ta main défend contre leurs maîtres,
Où tu m'oses trahir, & m'outrager comme eux,
Où ma foi fut féduite, où tu trompas mes feux;
Je jure à tous les dieux, qui vengent les parjures,
Que mon bras dans mon fang effaçant mes injures,
Plus jufte que le tien, mais moins irréfolu,
Ingrat, va me punir de t'avoir mal connu;
Et je vai....

TITUS l'arrêtant.

Non, madame, il faut vous fatisfaire. Je le veux, j'en frémis, & j'y cours pour vous plaire. D'autant plus malheureux, que dans ma paffion Mon cœur n'a pour excufe aucune illufion; Que je ne goûte point dans mon défordre extrême, Le trifte & vain plaifir de me tromper moi-même; Que l'amour aux forfaits me force de voler; Que vous m'avez vaincu fans pouvoir m'aveugler; Et qu'encor indigné de l'ardeur qui m'anime, Je chéris la vertu, mais j'embraffe le crime.

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Haïffez-moi, fuyez, quittez un malheureux,
Qui meurt d'amour pour vous,

& détefte fes feux,

Qui va s'unir à vous fous ces affreux augures,
Parmi les attentats, le meurtre & les parjures.

TULLI E.

Vous infultez, Titus, à ma funefte ardeur;
Vous fentez à quel point vous régnez dans mon cœur.
Oui, je vis pour toi feul, oui, je te le confeffe;
Majs malgré ton amour, mais malgré ma faibleffe,
Apren que le trépas m'inspire moins d'effroi,
Que la main d'un époux qui craindrait d'être à moi,
Qui fe repentirait d'avoir fervi fon maître,
Que je fais fouverain, & qui rougit de l'être.
Voici l'instant affreux qui va nous éloigner.
Souvien-toi que je t'aime, & que tu peux régner.
L'ambaffadeur m'attend; confulte, délibère ;
Dans une heure avec moi tu reverras mon père.
pars,
& je reviens fous ces murs odieux,
Pour y rentrer en reine, ou périr à tes yeux.

Je

TITUS.

Vous ne périrez point. Je vai.

TULLIE.

Titus, arrête;

En me fuivant plus loin, tu hazardes ta tête;
On peut te foupçonner: demeure, adieu, réfous
D'être mon meurtrier, ou d'être mon époux.

SCENE

TU

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U l'emportes, cruelle, & Rome eft affervie. Revien régner fur elle, ainfi que fur ma vie ; Revien, je vai me perdre, ou vai te couronner; Le plus grand des forfaits eft de t'abandonner. Qu'on cherche Meffala. Ma fougueufe imprudence A de fon amitié laffé la patience.

Maîtreffe, amis, Romains, je pers tout en un jour.

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TITUS.

Sers ma fureur enfin, fers mon fatal amour;

Vien, fui-moi.

MESSA LA.

Commandez, tout eft prêt; mes cohortes Sont au mont Quirinal, & livreront les portes. Tous nos braves amis vont jurer avec moi, De reconnaître en vous l'héritier de leur roi. Ne perdez point de tems; déja la nuit plus fombre Voile nos grands deffeins du fecret de fon ombre. TITUS.

L'heure approche; Tullie en compte les momens...

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