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Mais je n'ai plus trouvé qu'un horrible mélange
D'os et de chairs meurtris et traînés dans la fange;
Des lambeaux pleins de sang et des membres affreux,
Que des chiens dévorans se disputoient entre eux.

Il seroit mal - aisé de décider ici entre Virgile et Racine. Ce qu'on voit de certain, c'est que les deux songes sont pris également à la source des différentes religions des deux poëtes. Virgile est plus mélancolique, Racine plus terrible. Le dernier eût manqué son but, et auroit mal connu le génie sombre des dogmes hébreux, si, comme le premier, il eût amené le rêve d'Athalie dans une heure pacifique. Comme il va tenir beaucoup, il promet beaucoup par ce vers :

C'étoit pendant l'horreur d'une profonde nuit.

Dans Racine, il y a concordance, et dans Virgile, contraste d'images.

La scène annoncée par l'apparition d'Hector, c'est-à-dire, la nuit fatale d'un grand peuple et la fondation de l'Empire romain, seroit plus magnifique que la chûte d'une seule reine, si Joas, en rallumant le flambeau de David, ne nous montroit dans le lointain le Messie et la révolution de toute la terre.

La même perfection se remarque dans les vers des deux auteurs toutefois la poésie

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de Racine nous semble la plus belle. Quel Hector paroît au premier moment devant Enée, quel il se montre à la fin. Mais la pompe, mais l'éclat emprunté de Jésabel,

<< Pour réparer des ans l'irréparable outrage», suivi tout-à-coup, non d'une forme entière, mais

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de lambeaux affreux » Que des chiens dévorans se disputoient entr'eux ». est une sorte de changement d'état, de péripétie, qui donne au songe de Racine une beauté qui manque à celui de Virgile. Enfin, cette ombre d'une mère qui se baisse vers le lit de sa fille, comme pour s'y cacher, et qui se transforme tout-à-coup en os et en chairs meurtris, est une de ces beautés vagues, de ces circonstances terribles, de la vraie nature du fantôme.

2.

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CHAPITRE XII.

Suite des MACHINES POÉTIQUE S.

Voyage des Dieux Homériques. Satan allant à la découverte de la Création.

NOUS

ous touchons à la dernière des machines poétiques, c'est-à-dire, aux voyages des êtres surnaturels. C'est une des parties du merveilleux, où Homère s'est montré le plus sublime. Tantôt il raconte que le char du dieu vole avec la rapidité de la pensée d'un voyageur qui se rappelle, en un instant, tous les lieux qu'il a parcourus; tantôt il dit :

Autant qu'un homme assis aux rivages des mers
Voit d'un roc élevé d'espace dans les airs,
Autant des immortels les coursiers intrépides
En franchissent d'un saut (1).

Quoi qu'il en soit du génie d'Homère et de la majesté de ses dieux, son merveilleux et toute sa grandeur vont encore s'éclipser devant le merveilleux du christianisme.

Satan, arrivé aux portes de l'Enfer, que le péché et la mort lui ont ouvertes,

(1) Boileau dans Longin.

se

prp are à aller à la découverte d'un monde nouvellement créé.

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« Les portes de l'enfer s'ouvrent..... vomissant comme la bouche d'une fournaise, des flocons de fumée et des flammes rouges. Soudain aux regards de Satan, se dévoilent tous les secrets de l'antique abîme; océan sombre et sans bornes, où les temps, les dimensions et les lieux viennent se perdre; où l'ancienne Nuit et le Chaos, aïeux de la nature, maintiennent une éternelle anarchie, au milieu des rugissemens d'une éternelle guerre, et règnent par la confusion. Satan, arrêté sur le seuil de l'enfer, regarde dans le vaste gouffre, berceau et peut-être tombeau de la nature; il pèse en lui-même les dangers du voyage. Bientôt déployant ses vastes ailes, et repoussant du pied le seuil fatal, il s'élève dans des tourbillons de fumée. Porté sur ce siége nébuleux, long-temps il monte avec audace; mais la vapeur graduellement dissipée, l'abandonne au milieu du vide. Surpris, il précipite en vain le mouvement de ses ailes; et comme un poids mort, il tombe.

» L'instant où je chante verroit encore sa chûte, si l'explosion d'un nuage tumultueux rempli de souffre et de flamme, ne l'eût élancé à des hauteurs égales aux profondeurs qu'il avoit parcourues. Jeté sur des terres molles et tremblantes, à travers les élémens épais ou subtils.... il marche, il vole, il il vole, il nage, il rampe. A

(1) Par. Lost. Book II. v. 888-1050; Book III. v. 501544. Des vers de passés çà et là.

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l'aide de ses bras, de ses pieds, de ses ailes, il franchit les syrtes, les détroits, les montagnes. Enfin, une universelle rumeur des voix et des sons confus viennent avec violence assaillir son oreille. Il alonge aussitôt son vol de ce côté, résolu d'aborder l'Esprit inconnu de l'abîme, qui réside dans ce bruit, et d'apprendre de lui le chemin de la lumière.

» Bientôt il apperçoit le trône du Chaos, dont le sombre pavillon s'étend au loin sur le gouffre immense. La Nuit revêtue d'une robe noire, est assise à ses côtés : fille aînée des Etres, elle est l'épouse du Chaos. Le Hasard, le Tumulte, la Confusion, la Discorde aux mille bouches sont les ministres de ces divinités ténébreuses. Satan paroît devant eux sans crainte.

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Esprits de l'Abime, leur dit-il, Chaos, et vous antique Nuit, je ne viens point pour épier les secrets de vos royaumes. apprenez-moi le chemin de la

lumière, etc.

....

Le vieux Chaos répond en mugissant: « Je te connois, ô étranger!... Un monde nouveau pend au-dessus de mon empire, du côté où tes légions tombèrent. Vole, et hate-toi d'accomplir tes desseins. Ravages! dépouilles ! ruines! vous êtes les espérances du Chaos ».

Il dit: Satan plein de joie . .. s'élève avec une nouvelle vigueur; comme une pyramide de feu, il perce l'atmosphère ténébreuse . Enfin l'influence

sacrée de la lumière commence à se faire sentir. Parti des murailles du ciel, un rayon pousse au loin, dans le sein des ombres, une douteuse et tremblante aurore: ici la nature commence, et le Chaos se retire. Guidé par ces mobiles blancheurs, Satan, comme un vaisseau long-temps battu de la tempête, reconnoît le port avec joie, et glisse plus doucement sur les vagues calmées.. A mesure qu'il avance vers le jour, l'empyrée avec ses

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