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17/12/9

I.

Après dix-huit siècles de christianisme, quel spectacle nous offre le monde intellectuel et moral? Une moitié du genre humain est encore plongée dans les ténèbres du polythéisme et de l'idolâtrie. La religion chrétienne est divisée en communions ennemies et rivales. Au sein de la plus haute culture et d'une civilisation brillante, la philosophie se sépare de la reli- · gion; la science fait divorce avec la foi; la politique ne peut plus diriger les hommes vers leurs destinées supérieures; les plus nobles aspirations de notre nature restent sans objet déterminé ; l'âme humaine est flottante au gré des doctrines et des tendances les plus contraires.

Dans cet état de division de la pensée humaine, dans ces profondes perturbations de l'ordre moral, le scepticisme et les doctrines de l'universelle négation peuvent prendre, prennent en effet un ascendant redoutable sur la raison obscurcie, sur la volonté affaiblie. Alors se soulèvent, du plus bas fond de notre nature, les mauvais instincts, les mauvaises passions; alors l'ordre social se trouve ébranlé jusque dans ses fondements; et si la force ne contenait le torrent dévastateur, il n'y aurait pas de lendemain pour nos sociétés vieillies.

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Tout le monde souffre de cette situation violente, et ceux qui gouvernent, et ceux qui sont gouvernés; le prêtre comme le philosophe; l'homme de foi comme l'homme de science; le citoyen paisible et obscur qui veut renfermer sa vie dans le sanctuaire domestique, comme celui qui prend part au gouvernement difficile de la chose publique; l'artiste comme le littérateur; l'agriculteur comme l'industriel. Les pompes sociales, les fêtes splendides, les plaisirs séduisants, les somptueuses demeures, toutes les recherches d'un luxe prodigieux ne sont pas le remède efficace à l'indigence de l'âme humaine; et l'appât de ces choses n'est propre qu'à enflammer de plus en plus les convoitises ardentes des déshérités de la fortune.

Qu'est-ce qui fait défaut à notre civilisation puissante et raffinée? Qu'est-ce qui manque à la science et à l'art? Qu'est-ce qui manque à la vie et à la politique ? Qu'est-ce qui manque à la famille et à la société? Disons-le sans détour: c'est Dieu, Dieu luimême ! Sa place est presque vide dans les esprits et dans les cœurs! Devons-nous nous étonner que les ténèbres et la douleur y établissent leur demeure?

Au déclin des sociétés antiques, l'Évangile et la croix de Jésus-Christ sauvèrent le monde d'une ruine irréparable en replaçant Dieu dans l'âme humaine. Un rayonnement prodigieux de vérité, de justice, de paix et d'amour vint régénérer la pauvre humanité, et lui préparer des destinées nouvelles.

Alors commencèrent à se dérouler, au milieu des résistances du vieux monde et de celles de notre im

parfaite nature, les richesses de tout ordre que l'Évangile de Jésus-Christ portait dans son sein. Combien elle aurait été pure, noble, brillante et heureuse l'humanité, si elle s'était laissé entièrement pénétrer par cette séve de vie divine! Ce n'est pas ici le lieu de rechercher et d'énumérer les causes qui ont empêché la civilisation chrétienne d'atteindre à son apogée, ni de signaler celles qui ont amené, en partie, sa décadence. Ayons seulement le courage de dire que si l'unité chrétienne a été déchirée, que si la science a voulu se séparer de la foi, que si la liberté a voulu régner sans la religion, une part terrible de responsabilité dans ces malheurs incombe aux hommes qui ont représenté, dans le monde chrétien, et l'unité, et la foi, et la religion!

Mais quelles que soient les causes, leurs effets n'en sont pas moins réels, vivants, à jamais déplorables. Cet état ne peut se prolonger et durer sans s'aggraver encore; et l'aggravation de cet état, que serait-ce, sinon la dissolution de tout ordre moral, le règne des plus funestes doctrines, des plus mauvaises passions? Si Dieu, dans son infinie miséricorde, ne prend encore en pitié notre faible nature, l'humanité semble courir au plus profond des abîmes. L'athéisme et le matérialisme seront la religion des masses; l'anthropothéisme et l'anthropolâtrie seront la philosophie et le culte des esprits délicats, des dilettanti de la pensée. Y a-t-il des couleurs capables de peindre ces abaissements et ces misères?

Une impulsion divine, suite de celle qui sauva

a.

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l'humanité au jour de sa régénération, semble nécessaire. Elle seule peut conserver le christianisme, et lui faire porter les plus beaux fruits.

Cette impulsion salutaire vient d'être donnée à l'Église, dépositaire des vérités et des forces dont l'humanité a besoin pour sortir victorieuse de la crise redoutable qu'elle traverse. Le Vicaire de Jésus-Christ a pris, dans sa sagesse et son amour pour les hommes, une de ces mesures décisives qui peuvent efficacement combattre le mal et faire triompher le bien.

Après trois siècles d'interruption de ces saintes assemblées, un concile général a été convoqué par la bulle ÆTERNI PATRIS pour le huit décembre de cette année. Voici dans quels termes le Souverain Pontife expose le but de cette réunion solennelle :

« Ce concile œcuménique aura donc à examiner avec le plus grand soin et à déterminer ce qu'il convient le mieux de faire, en ces temps si difficiles et si durs, pour la plus grande gloire de Dieu, pour l'intégrité de la foi, pour la beauté du culte divin, pour le salut éternel des hommes, pour la discipline du clergé régulier et séculier et son instruction salutaire et solide, pour l'observance des lois ecclésiastiques, pour la réformation des mœurs, pour l'éducation chrétienne de la jeunesse, pour la paix commune et la concorde universelle Il faudra aussi travailler de toutes nos forces, avec l'aide de Dieu, à éloigner tout mal de l'Église et de la société civile, à ramener dans le droit sentier de la vérité, de la justice et du salut, les malheureux qui se sont égarés,

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