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son contraire, l'un n'est qu'à la condition que l'autre soit en même temps. Voilà leurs rapports dans l'ordre de l'acquisition de nos connaissances (1). »

Cependant M. Cousin distingue ailleurs deux ordres d'acquisition de nos idées; l'ordre logique et l'ordre chronologique. Considérés dans l'ordre logique, l'un des deux termes de l'idée fondamentale, l'unité, l'infini, la cause, la substance, etc., précèdent logiquement la variété, le fini, l'effet, le phénomène, etc.; tandis que dans l'ordre chronologique c'est à ce dernier terme que l'antériorité doit appartenir; ce qui n'empêche pas cependant que les deux termes ne se présentent simultanément à l'esprit avec le rapport nécessaire qui les unit. Ainsi, bien que tous les éléments de la raison soient acquis en même temps, l'élément absolu est la condition togique de l'élément relatif, tandis que ce dernier est la condition chronologique du précédent.

M. Cousin passe ensuite à la nature des idées. fondamentales :

Quelle est la nature des idées ? Les idées sont-elles de simples signes, qui n'existent que

(1) Cours de 1828, leçon 4.

dans le dictionnaire, de purs mots, et faut-ik être nominaliste? Nullement; car les noms, les mots, les signes à l'aide desquels nous pensons, nous ne pouvons les admettre qu'à la condition de les comprendre, et nous ne pouvons les comprendre qu'à la condition générale de comprendre, de nous entendre avec nous-mêmes, c'est-à-dire précisément à la condition de ces trois idées qui gouvernent et dirigent toute opération de la pensée.....

» Si on repousse le nominalisme, faut-il donc être réaliste? faut-il admettre que les idées sont des choses qui existent comme tout le reste?...... pas davantage, messieurs. Non, les idées ne sont pas des choses comme les autres. Qui est-ce qui a vu des idées? qui est-ce qui a touché des idées? Si, ce dont je doute fort, les réalistes ont voulu parler de l'existence extérieure des idées, ils sont tombés dans la plus évidente absurdité...... Pour y échapper nous adresserons-nous aux conceptualistes, afin de parcourir le cercle connu des trois grandes écoles françaises du moyenâge, sur la question des idées? C'est à quoi on s'est généralement arrêté. Entendons-nous, messieurs. Je suis prêt à accorder que les idées ne sont que des conceptions de la raison, de l'intelligence, de la pensée, si on veut bien s'er

tendre avec moi sur la nature de la raison, de l'intelligence, de la pensée (1)........... »

....

M. Cousin montre ensuite que la raison qui conçoit les idées fondamentales ne nous appartient pas, qu'elle ne nous est point personnelle, qu'elle est au-dessus de la puissance de notre volonté, qu'en un mot elle est absolute.

« La raison, dit-il, est-elle humaine à parler rigoureusement, ou bien n'est-elle humaine seulement que parce qu'elle fait son apparition dans l'homme? La raison vous appartient-elle ? Est-elle vôtre? Qu'est-ce qui vous appartient? Qu'est-ce qui est vôtre en vous? C'est la volonté et ses actes....

» La raison n'est donc pas individuelle; donc elle n'est pas nôtre, elle ne nous appartient pas, elle n'est pas humaine; car, encore une fois, ce qui constitue l'homme et sa personnalité intrinsèque, c'est son activité volontaire et libre; tout ce qui n'est pas volontaire et libre est ajouté à l'homme, mais n'est pas partie intégrante de l'homme; si on veut admettre ceci, j'accorderai, messieurs, que les idées sont des conceptions de cette raison universelle et absolue que nous ne constituons pas, mais qui ap

(1) Cours de 1828, leçon 5o.

paraît en nous et qui est la loi de tous les individus; cette raison, que Fénélon retrouvait toujours au bout de toutes ses recherches, dont il essayait en vain de faire abstraction sans pouvoir jamais s'en séparer, et qui, revenant sans cesse, malgré tous ses efforts, dans toutes ses pensées les plus hautes ou les plus vulgaires, lui arrachait ce soupçon sublime: O raison, raison! n'es-tu pas celui que je cherche. Si on veut l'entendre ainsi, nulle difficulté, et les idées seront des conceptions, non de la raison humaine, mais de la raison en soi..... »

Les vérités fondamentales se rapportent non à la raison faillible, personnelle de l'homme; « mais à la raison non encore tombée dans l'humanité, à la raison universelle, absolue, infaillible, à la raison éternelle, hors de l'espace et du temps, et de tout contact avec le relatif, le contingent et l'erreur, à cette intelligence dont la nôtre, ou plutôt celle qui fait son apparition en nous, est un fragment, à la pensée pure et incorruptible que la nôtre réfléchit. C'est la théorie de Platon et celle de Leibnitz, théorie que j'ai moi-même adoptée.....

» Les idées ne sont donc pas de purs mots, ce ne sont pas non plus des êtres. Ce sont des conceptions de la raison humaine; et même la

rigueur de l'analyse force de les rapporter au principe éternel de la raison humaine, à la raison absolue; c'est à cette raison seule qu'elles appartiennent; elles ne sont que prêtées en quelque sorte à toutes les autres raisons. C'est là qu'elles existent; mais de quelle manière? Il ne faut pas chercher bien loin: elles existent de l'existence de l'esprit ; elles ne sont pas autre chose que la manière d'être de la raison éternelle.....

» Résumons-nous. Il y a dans la raison humaine deux éléments et leur rapport, c'est-àdire trois éléments, trois idées. Ces trois idées ne sont pas un produit arbitraire de la raison humaine; loin de là, dans leur triplicité et dans leur unité, elles constituent le fondement de cette raison; elles y apparaissent pour la gouverner, comme la raison apparaît dans l'homme pour le gouverner. Ce qui était vrai dans la raison humainement considérée subsiste dans la raison considérée en soi; ce qui faisait le fonds. de notre raison fait le fonds de la raison éternelle, c'est-à-dire une triplicité qui se résout en unité, et une unité qui se développe en triplicité (1).....

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(1) Cours de 1828, leçon 5o,

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