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IMPRIMERIE DE Mme Ve CAMILLE MELLINET,

Imprimeur de la Société Académique.

1855.

Dunning nigh

3.14 33 26766

LA BRETAGNE

AU XVI SIÈCLE,

APRÈS LA RÉUNION.

CHAPITRE TROISIÈME.

On a dit que la Bretagne, depuis la réunion, était endormie sur ses franchises et gardée par ses États; qu'elle s'habituait au repos sous le sceptre des Valois, quand elle fut réveillée, comme en sursaut, par la réforme. Ces assertions sont également erronées, car l'union de la province à la France n'avait pas été populaire en Bretagne; le mécontentement était général au XVIe siècle dans toutes les classes de la population contre le gouvernement faible et despolique des Valois. Les franchises du pays étaient souvent violées; les États ne cessaient de faire entendre leurs plaintes, mais inutilement. L'agitation était grande dans les conseils bourgeois des villes; elle se propageait dans les châteaux des gentilshommes, fatigués du

repos, avides d'émotions et de combats; elle troublait même l'enceinte des Cours de Justice, du Parlement, de la Chambre des Comptes, etc. Le sentiment de l'indépendance bretonne vivait toujours au fond des cœurs, et l'espoir de la voir renaître n'avait pas encore disparu la guerre sans doute ne désolait pas la province; mais les esprits n'étaient pas calmes et ne s'habituaient pas au repos (1).

Les passions religieuses de la dernière moitié du siècle contribuèrent à développer l'agitation, mais ne la créèrent pas seules; elles donnèrent une force nouvelle au mécontentement populaire, aux antipathies contre la France; mais elles ne réveillèrent pas la province, comme en sursaut. La Bretagne, en effet, est la partie du royaume qui s'est le moins ressentie des guerres civiles, causées par le protestantisme. S'il y a eu des calvinistes dans la province, ils ont toujours été très-peu nombreux, et jamais ils n'ont pu former un parti, combattre les catholiques, leur inspirer même quelques sérieuses inquiétudes. Pendant que sept guerres civiles affligent le reste de la France, la Bretagne n'est le théâtre d'aucun combat, d'aucun engagement la province est entièrement restée fidèle au catholicisme; les exceptions n'ont aucune valeur. Plus tard, lorsque la guerre deviendra surtout une guerre politique et sociale; lorsque la royauté, lorsque l'unité française qu'elle représente, sera sérieusement attaquée ; à l'époque de la Ligue, le bruit des armes retentira dans toute la province; toutes les classes de la population prendront part à la lutte; mais ce ne sera pas uniquement pour défendre la cause de la religion catholique, qui n'aura jamais été mise en question dans la Bre

(1) Voir la première partie de cette étude dans les Annales de la Société Académique de 1854, p. 393, 445.

tagne d'autres croyances, d'autres passions pousseront les Bretons au combat. C'est ce qu'il est nécessaire de bien distinguer, pour comprendre le caractère des guerres de la Ligue dans la province.

En général, lorsqu'il s'est agi de porter un jugement sur le XVIe siècle, les appréciations des historiens ont été tranchantes et exclusives, parce qu'ils n'ont souvent envisagé que d'un côté cette époque si remarquable. Elle est loin cependant d'avoir ce caractère d'uniformité et de simplicité, qui permettrait de la juger, au point de vue d'une seule théorie, d'un système préconçu jamais peut-être les esprits ne furent plus troublés, jamais les passions de toute nature ne furent plus violemment excitées en sens divers; ce fut le malheur du XVIe siècle : c'est là aussi sa gloire et sa grandeur. Alors, les intérêts politiques viennent se mêler sans cesse aux intérêts religieux, et les souvenirs, les regrets des temps du moyen-âge entrent sans cesse en lutte avec les aspirations et les espérances de la vie des temps modernes.

La réforme avait introduit une situation toute nouvelle dans l'état religieux des populations deux croyances sont en présence, nécessairement ennemies l'une de l'autre ; car s'il est une vérité que tous semblent admettre et proclamer au XVIe siècle, c'est que deux religions ne peuvent exister simultanément dans le même pays. Aussi, chacun des deux grands partis s'efforce de conquérir le pouvoir, pour écraser son adversaire. Tous les moyens fournis par la passion sont employés pour arriver à cette fin. Protestants et catholiques s'arment tour à tour des mêmes principes, pour emporter la victoire, invoquent tour à tour les droits des peuples et les droits des rois, la liberté et l'autorité. L'accord ne pouvait venir de la foule passionnée : toutes les tentatives de réconciliation pacifique devaient échouer. Cependant, les protestants avaient tou

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