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secondant de son autorité les efforts des savants partout où leur propre zèle ne pouvait suffire pour obtenir les résultats désirés. On rendra un compte exacte de ces travaux qui ont servi de base à l'essai présent.

Malheureusement ces recherches fécondes, commencées sous des auspices si heureuses, furent trop tôt abandonnées par suite des évènements politiques de 1815 qui donnèrent pour long-temps une toute autre direction aux esprits, de sorte que ce n'est que depuis quelques années seulement que des voix puissantes ont rappelé de nouveau l'attention vers cette matière intéressante. Ces voix elles-mêmes cependant ne sont que l'organe de cette décentralisation intellectuelle dont les symptômes se manifestent de plus en plus en France par le journalisme local et les nombreuses sociétés scientifiques et artistiques fondées dans les provinces et dont les succès ont déjà forcé plus d'une fois la capitale à leur accorder ses suffrages et à reconnaître leur indépendance. Après cela on ne s'étonnera plus de la grande velléité de vie que montrent de nos jours les idiomes locaux, dont la littérature n'a été cultivée avec plus de zèle à aucune des époques précédentes.

Malgré cela, la nature de ces idiomes et surtout leur littérature originale, leurs formes grammaticales et leurs articulations souvent si riches et si variées sont encore, dans leur totalité, à peu près inconnues au

au grand public parce que tous les ouvrages qui en ont traité ont constamment porté un caractère trop exclusif, en n'offrant ou que des monographies capables seulement d'intéresser le savant, ou bien des apologies ingénieuses et brillantes, à la vérité, mais trop vagues pour fournir des notions bien positives.

C'est donc pour revendiquer aux patois français une place dans la lecture de toutes les personnes instruites et pour en mettre enfin la connaissance à la portée des étrangers, qui en ignorent souvent jusqu'à l'existence, même après avoir voyagé en France, que j'ai entrepris le travail présent. J'ai essayé d'y ébaucher une esquisse du tableau animé de ces idiomes que j'eus l'occasion de voir de près et dont il m'était permis de puiser les traits caractéristiques aux meilleures sources, grace en partie aux avis obligeants de plusieurs de mes Confrères de la Société de l'Histoire de France, qui suppléèrent par leurs communications intéressantes à tout ce qui pouvait me manquer pour compléter le cadre que je m'étais tracé. Je leur dois surtout plusieurs morceaux curieux de l'Anthologie qui forme la seconde partie de ce volume. Quant aux notices sur les formes grammaticales et sur les articulations, je les ai obtenues presque entièrement en observant attentivement le langage parlé des indigènes. Elles ne renferment que ce qu'il y a de plus indispensable à savoir pour se former une idée générale

de ces idiomes, mon intention ne pouvant être de donner une grammaire complète, qui aurait dépassé de beaucoup les limites étroites de cet essai sans servir essentiellement à atteindre le but que je m'étais proposé.

La partie anthologique contient des morceaux en vers et en prose dans toutes les principales nuances des dialectes français et romans qui se parlent sur le territoire de la France, avec les notes et les éclaircissements nécessaires à leur intelligence. Ce recueil est terminé par un petit nombre de versions de la Parabole de l'Enfant prodigue en plusieurs nuances subordonnées qui ne possèdent pas de morceaux originaux ou pour lesquelles au moins je n'en avais pu trouver d'autres. Enfin j'ai cru qu'il ne serait pas peut-être sans intérêt de trouver au nombre de ces versions celles en basque des vallées cispyrénéennes et en basbreton, quoique ces deux langues ne fassent guère partie des dialectes de la langue française.

Il ne m'appartient pas de rien dire ici sur l'opportunité de cette publication; mais il me sera permis d'espérer que dans un temps où on lit et recueille les productions de la muse populaire de presque toutes les nations, où les héros de la littérature anglaise ont trempé leurs pinceaux avec tant de succès dans ces couleurs toutes chaudes de réalité, où l'on ne se contente plus de juger de l'esprit des langues et des peuples uniquement

par les phrases savamment cadencées des grands écrivains, il me sera permis, dis-je, d'espérer que dans un tel temps, on ne trouvera peut-être pas tout à fait oiseux un travail qui tend à montrer dans son ingénuité rustique et libre de la bride académique cette langue française qu'on n'est que trop accoutumé à voir seulement dans ses habits de parade.

J. F. S.

Introduction.

'n peut dire de toute langue cultivée ce que le Dante a dit de la langue italienne: elle se trouve dans toutes les provinces d'un pays, sans appartenir à aucune en particulier. Car la langue cultivée, la langue écrite d'un peuple, n'est autre chose, quant à ses éléments, que le son primitif et naturel des paroles, artistement fixé et représenté par un signe dans une de ses différentes articulations. C'est une oeuvre d'homme.

La langue parlée, au contraire, est un être organique à part dans l'organisation humaine, dont elle est l'attribut exclusif et essentiel. C'est une oeuvre de Dieu.

Certains organes du corps humain étant seuls capables d'en former les articulations, il en résulte qu'à raison de la diversité incalculable dont la formation des organes est susceptible, l'émission de ces sons doit nécessairement se nuancer à l'infini.

Ces nuances, semblables à des couleurs qui se confondent, moins sensibles à des points rapprochés, ne laisseront pas de montrer des différences caractéristiques à des distances plus grandes.

Voilà pourquoi, de village en village, tous les hommes se comprennent; non seulement les habitants d'un même pays, ou ceux de différents pays dont les langues appartiennent à la même famille, mais, en suivant certaines lignes, presque tous les peuples du monde; et il ne serait pas trop difficile de le prouver. Rapprochons au contraire deux villageois de la même nation, de la

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