Obrazy na stronie
PDF
ePub

homme. J'écris avec tant de civilité contre lui, que je l'ai demandé lui-même pour examinateur de cette Préface, où je tâche de lui prouver fon tort à chaque ligne, il a lui-même approuvé ma petite Differtation polémique. Voilà comme les Gens de Lettres devroient fe combattre voilà comme ils en useroient, s'ils avoient été votre école ; mais ils font plus mordants d'ordinaire que des Avocats, plus emportés que des Janfeniftes. Les lettres humaines font devenuës très-inhumaines. On injurie, on cabale on calomnie, on fait des couplets. Il eft plaifants qu'il foit permis de dire aux gens par écrit ce qu'on n'oferoit pas leur dire en face. Vous m'avez appris, mon cher Pere, à fuir ces bassesses, & à fçavoir vivre, comme à fçavoir écrire.

Les Mufes, filles du Ciel,

Sont des fœurs fans jaloufie,
Elles vivent d'ambrofie,

Et non d'abfynthe & de fiel;

Et quand Jupiter appelle

Leur affemblée immortelle,

Aux Fêtes, qu'il donne aux Dieux

Il défend que le Satyre

Trouble les fons de leur lire

Par fes fons audacieux.

[ocr errors]

A Dieu, mon cher & Révérend Pere, je fuis

6 LETTRE AU PERE PORÉE.

pour jamais à vous aux vôtres, avec la tendre reconnaissance que je vous dois, & que ceux qui ont été élevés par vous ne confervent pas toujours.

à Paris,
te 7 Janvier 17294

粥粥

光光光光光

PRÉFACE

D'UNE ÉDITION D'ŒDIPE

LODIPE

DE 1729

DIPE, dont on donne cette nouvelle Edition, fut représenté pour la prémiere fois au commencement de l'année 1718. Le Public le reçut avec beaucoup d'indulgence. Depuis même, cette Tragédie s'eft toujours foûtenuë fur le Théatre, & on la revoit encore avec quelque plaifir malgré fes défauts; ce que j'attribue en partie à l'avantage qu'elle a toujours eu d'être très-bien repréfentée, & en partie à a pompe & au pathétique du spectacle même.

Le Pere Folard Jéfuite, & M. de la Motte de l'Académie Française, ont depuis traité tous deux le même fujet, & tous deux ont évité les défauts dans lefquels je fuis tombé. Il ne m'ap→ partient pas de parler de leurs Piéces; mes critiques & même mes louanges paraîtroient également fufpectes.

Je fuis encore plus éloigné de prétendre donner une Poëtique à l'occafion de cette Tragédie; je suis persuadé que tous ces raisonnemens

* Monfieur de la Motte donna deux Edipes en 1726, l'un en rimes, & l'autre en profe non

rimée. L'Edipe en rimes fut joué quatre fois, l'autre n'a jamais été joué,

délicats, tant rebattus depuis quelques années, ne valent pas une fcéne de génie, & qu'il y a bien plus à apprendre dans Polyeucte & dans Cinna, que dans tous les préceptes de l'Abbé d'Aubignac. Sévere & Pauline font les véritables Maîtres de l'Art. Tant de Livres faits fur la Peinture par des connaiffeurs n'inftruiront pas tant un éleve, que la feule vûë d'une tête de Raphaël.

Les principes de tous les Arts, qui dépendent de l'imagination, font tous aifés & fimples, tous puisés dans la nature & dans la raison. Les Pradons & les Boyers les ont connus auffi-bien que les Corneilles & les Racines; la différence n'a été & ne fera jamais que dans l'application. Les Auteurs d'Armide & d'Iffé, & les plus mauvais Compofiteurs, ont eu les mêmes regles de Mufique. Le Pouffin a travaillé fur les mêmes principes que Vignon. Il paraît donc auffi inutile de parler de regles à la tête d'une Tragédie, qu'il le feroit à un Peintre de prévenir le Public par des Differtations fur fes Tableaux, ou à un Muficien de vouloir démontrer, que fa Mufique doit plaire.

Mais puifque Mr. de la Motte veut établir des regles toutes contraires à celles qui ont guidé nos grands Maîtres, il eft jufte de défendre ces anciennes Loix, non pas parce qu'elles font anciennes ; mais parce qu'elles font bonnes & néceffaires, & qu'elles pourroient avoir dans un homme de fon mérite un adverfaire redoutable.

M. de la Motte veut d'abord profcrire l'unité d'action, de lieu & de temps.

Les Français font les prémiers d'entre les Nations modernes, qui ont fait revivre ces fages regles du Théatre; les autres Peuples ont été

long-temps fans vouloir recevoir un joug qui paraiffoit fi févere; mais comme ce joug étoit jufte, & que la raison triomphe enfin de tout ils s'y font foumis avec le temps. Aujourd'hui même en Angleterre, les Auteurs affectent d'avertir au devant de leurs Piéces, que la durée de l'action est égale à celle de la repréfentation; & ils vont plus loin que nous, qui en cela avons été leurs Maîtres.

Toutes les Nations commencent à regarder comme barbares les temps où cette pratique étoit ignorée des plus grands génies, tels que Don Lopez de Vega & Shakespear. Elles avouent l'obligation qu'elles nous ont de les avoir retirées de cette barbarie. Faut-il qu'un Français se serve aujourd'hui de tout son esprit pour nous y ramener?

Quand je n'aurois autre chofe à dire à M. de la Motte, finon que Meffieurs Corneille, Racine, Moliere, Addiffon, Congreve, Maffey, ont tous obfervé les Loix du Théatre, c'en feroit affez pour devoir arrêter quiconque voudroit les violer: Mais Mr. de la Motte mérite qu'on le combatte par des raisons plus que par des autorités.

Qu'est-ce qu'une piéce de Théatre? La repréfentation d'une action. Pourquoi d'une feule & non de deux ou trois? C'eft que l'efprit humain ne peut embraffer plufieurs objets à la fois; c'est que l'intérêt, qui fe partage, s'anéantit bientôt ; c'eft que nous fommes choqués de voir même dans un tableau deux événemens ; c'eft qu'enfin la nature feule nous a indiqué ce précepte, qui doit être invariable comme elle.

Par la même raifon l'unité de lieu eft effentielle; car une feule action ne peut fe paffer en plufeurs lieux à la fois, Si les perfonnages que je

« PoprzedniaDalej »