Plains, Zaïre, plains-moi, l'heure approche; ces pleurs, Du fang qui va couler font les avant-coureurs CORASMIN. 'Ah! je tremble pour vous. OROSMANE. Frémis de mes fouffrances, Frémis de mon amour, frémis de mes ven geances. Approche; viens ; j'entends... je ne me trompe pas. CORAS MIN. 1 Sous les murs du Palais quelqu'un porte ses pas. OROSMAN E. Va faifir Néreftan; va, dis-je, qu'on l'enchaîne, Que tout chargé de fers à mes yeux on l'entraîne. OROSMANE, ZAYRE ET FATIME, marchant pendant la nuit dans l'enfoncement du Théatre. ZAYRE. VIENS, Fatime. OROSMAN E. Quentends-je! Eft-ce là cette voix Dont les fons enchanteurs m'ont féduit tant de fois ? Cette voix qui trahit un feu fi légitime? ... quoi! c'eft-elle? Il tire fon poignard. Zaïre! ah Dieu... ce fer échappe de ma main, ZAYRE à Fatime. C'est ici le chemin ; viens, foûtiens mon courage. Il va venir. FATIME. OROSMANE. Ce mot me rend toute ma rage. ZAYRE. Je marche en friffonnant, mon cœur eft éper du.... Eft-ce vous, Nérestan, que j'ai tant attendu ? OROSMANE courant à Zaire. C'est moi que tu trahis: tombe à mes pieds, parjure. ZAYRE tombant dans la coulisse. Je me meurs: ô mon Dieu ! OROSMAN E. J'ai vengé mon injure. Otons-nous de ces lieux. Je ne puis... Qu'ai-je fait ?. Rien que de jufte... Allons, j'ai puni fon forfait. Ah! voici fon amant que mon deftin m'envoie Pour remplir ma vengeance & ma cruelle joie. De m'ôter pour jamais ce qui me fut fi cher, Va, le prix en est prêt, tu peux t'y préparer Avez-vous ordonné fon fupplice ? CORASMIN. Oui, Seigneur. OROSMANE. Il commence déjà dans le fond de ton cœur. Tes yeux cherchent par tout & demandent en core Ma perfide qui t'aime & qui me deshonore. NER ESTA N. Que dis-tu ? Quelle erreur. cà OROSMANE. Regarde-là, te dis-je. NERESTAN. Ah! que vois-je? Ah, ma fœur! Zaire!... Elle n'eft plus. Ah, monstre! Ah, jour horrible! OROSMANE. Sa fecur! Qu'ai-je entendu? Dieu, feroit-il po fible? NÉRESTAN. Barbare, il est trop vrai: viens épuiser mon flanc Du refte infortuné de cet augufte fang. Rappeller des Chrétiens le culte încorruptible. OROSMANE. Zaïre!... Elle m'aimoit? Eft-il bien vrai, Fa Cruel! voilà fon crime. Tigre altéré de fang, tu viens de maffacrer Celle qui malgré foi conftante à t'adorer Se flatoit, efpéroit que le Dieu de fes peres Recevroit le tribut de fes larmes finceres, Qu'il verroit en pitié cet amour malheureux, Que peut-être il voudroit vous réunir tous deux. Hélas! à cet excès fon cœur l'avoit trompée De cet efpoir trop tendre elle étoit occupée, Tu balançois fon Dieu dans fon cœur alarmé. OROSMANE. Tu m'en as dit affez. O Ciel! j'étois aimé ! Cruel! qu'attends-tu donc pour assouvir ta rage? coups, Tu m'as fait éprouver le plus cruel de tous. Mais la foif de mon fang qui toujours te dévore, Permet-elle à l'honneur de te parler encore? En m'arrachant le jour, fouviens-toi des Chré tiens Dont tu m'avois juré de briser les liens ; OROSMANE allant vers le corps de Zaire. 'Zaïre! CORAS MIN. Hélas! Seigneur, où portez-vous vos pas? Rentrez; trop de douleur de votre ame s'empare, Souffrez que Nérestan... |