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Je demande en tremblant une grace de vous.

OROSMANE.

Une grace! ordonnez, & demandez ma vie.

ZAYRE.

Plût au Ciel qu'à vos jours la mienne fut unie! Orofmane Seigneur permettez qu'au

...

jourd'hui,

...

Seule, loin de vous-même, & tout à mon ennui,

D'un œil plus recueilli contemplant ma fortune, Je cache à votre oreille une plainte importune.. Demain tous mes fecrets vous feront révélés.

OROSMANE.

De quelle inquiétude, ô Ciel, vous m'accablez! Pouvez vous ? ...

ZAYRE.

Si pour moi l'amour vous parle encore, Ne me refusez pas la grace que j'implore.

OROSMANE.

Eh bien, il faut vouloir tout ce que vous voulez,
Jy confens; il en coûte à mes fens défolés.
Allez, fouvenez-vous que je vous facrifie
Les momens les plus beaux, les plus chers de

ma vie.

ZAYRE.

En me parlant ainfi, vous me percez le cœur.

OROSMANE.

Eh bien, vous me quittez, Zaïre ›

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AH!

OROSMAN E.

I! c'eft trop-tôt chercher ce folitaire afyle, C'est trop-tôt abuser de ma bonté facile, Et plus j'y penfe, ami, moins je puis concevoir Le fujet fi caché de tant de défefpoir.

Quoi donc, par ma tendreffe élevée à l'Empire, Dans le fein du bonheur que fon ame defire, Près d'un amant qu'elle aime, & qui brûle à fes pieds,

Ses yeux remplis d'amour, de larmes font noyés ?...

Je fuis bien indigné de voir tant de caprices. Mais moi-même après tout ai-je eu moins d'injuftices?

Ai-je été moins coupable à fes yeux offenfés ? Eft-ce à moi de me plaindre ? On m'aime, c'eft affez.

Il me faut expier par un peu d'indulgence, De mes transports jaloux l'injurieufe offense; Je me rends, je le vois, fon cœur eft fans dé

tours,

La nature naïve anime fes difcours.

Elle eft dans l'âge heureux où regne l'innocence, A fa fincérité je dois ma confiance ;

Elle m'aime fans doute; oui, j'ai lu devant toi Dans les yeux attendris, l'amour qu'elle a pour

moi,

Et fon ame éprouvant cette ardeur qui me touche,

Vingt fois pour me le dire a volé fur fa bouche. Qui peut avoir un cœur affez traître, affez bas Pour montrer tant d'amour, & ne le fentir pas?

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CETTE lettre, Seigneur, à Zaïre adreffée,

Par vos Gardes faifie, & dans mes mains laif

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Un de ces Chrétiens

Dont vos bontés, Seigneur, ont brisé les liens :
Au Sérail, en fecret, il alloit s'introduire,
On l'a mis dans les fers.

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CORASMI N.

CETTE lettre, Seigneur,

Pourra vous éclaircir, & calmer votre cœur.

OROSMAN E.

Ah! lifons, ma main tremble, & mon ame étonnée

Prévoit que ce billet contient ma destinée. Lifons...» Chere Zaïre, il eft temps de nous voir.

» 11 eft vers la Mofquée une fecrette iffuë, » Où vous pouvez fans bruit, & fans être apperçuë,

» Tromper vos furveillans, & remplir notre

efpoir:

» Il faut vous hazarder: vous connaissez mon

zéle;

» Je vous attends, je meurs, fi vous n'êtes

fidelle.

Eh bien, cher Corafmin, que dis-tu ?

COR ASMIN.

Moi, Seigneur ›

Je suis épouvanté de ce comble d'horreur.

OROSMAN E.

Tu vois comme on me traite.

CORASMIN.

O trahifon horrible!

Seigneur, à cet affront vous êtes infenfible? Vous, dont le cœur tantôt fur un fimple foupçon D'une douleur fi vive a reçu le poison?

Ah! fans doute l'horreur d'une action fi noire Vous guérit d'un amour qui bleffoit votre gloire.

OROSMAN E.

Cours chez elle, à l'instant; va, vole, Corafmin. Montre-lui cet écrit... qu'elle tremble... & foudain

De cent coups de poignard que l'infidelle meure; Mais avant de fraper... ah! cher ami, demeure!,

Demeure, il n'eft pas temps. Je veux que ce Chrétien

Devant elle amené... non... je ne veux plus rien

Je me meurs... je fuccombe à l'excès de ma

rage.

CORAS MIN.

On ne reçut jamais un fi fanglant outrage.

OROSMANE.

Le voilà donc connu, ce fecret plein d'horreur ?
Ce fecret qui pefoit à fon infame cœur !
Sous le voile emprunté d'une crainte ingénuë,
Elle veut quelque temps fe fouftraire à ma vûë.
Je me fais cet effort ; je la laiffe fortir;
Elle part en pleurant. & c'est pour me trahir.

Quoi, Zaïre!

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CORASMIN.

Tout fert à redoubler fon crime

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