Nous l'attendons encor, fa générofité ZAYRE. Peut-être fa promeffe a paffé fa puiffance. rage Des fermens indifcrets pour fortir d'esclavage. Il n'y faut plus penfer. FATIME. Mais s'il étoit fidele ; S'il revenoit enfin dégager les fermens, Ne voudriez-vous pas ? ... Va, c'eft trop te céler le deftin de Zaïre: On te fit du Jourdain abandonner les rives, Le Ciel, pour terminer les malheurs de nos jours, D'une main plus puiffante a choifi le fecours, Ce fuperbe Orosmane... FATIM E. Eh bien ? ZAYRE. Ce Soudan même; Ce Vainqueur des Chrétiens... chere Fatime... il m'aime. Tu rougis... je t'entends penfer ... gardes-toi de Qu'à briguer fes foupirs je puiffe m'abaiffer, Que d'un Maître abfolu la fuperbe tendreffe M'offre l'honneur honteux du rang de fa Maîtreffe, Et que j'effuye enfin l'outrage & le danger Plutôt que jufques là j'abaiffe mon orgueil, I FATIME. Vos appas, vos vertus, font dignes de ce prix, Mon cœur en eft flaté plus qu'il n'en eft fur pris. Que vos félicités, s'il fe peut, foient parfaites, Je me vois avec joie au rang de vos fujetes. ZAYRE. Sois toujours mon égale, & goûte mon bonheur, Avec toi partagé je fens mieux fa douceur. FATIME. Hélas! puiffe le Ciel fouffrir cet hymenée ! Puiffe cette grandeur qui vous est destinée, Qu'on nomme fi fouvent du faux nom de bonheur Ne point laiffer de trouble au fond de votre cœur ! N'eft-il point en fecret de frein qui vous rètienne ? Ne vous fouvient-il plus que vous futes Chrétienne ? ZAYRE. Ah! que dis-tu? Pourquoi rappeller mes ennuis? Chere Fatime, hélas ! fçai-je ce que je fuis? Le Ciel m'a-t-il jamais permis de me connaître? Ne m'a-t-il pas caché le fang qui m'a fait naître ? FATIME. Néreftan qui naquit non loin de ce féjour, Vous dit que d'un Chrétien vous reçutes le jour; Que dis-je? Cette Croix qui fur vous fut trouvée, Parure de l'enfance avec foin confervée, Ce figne des Chrétiens que l'art dérobe aux yeux. Sous ce brillant éclat d'un travail précieux, Cette Croix, dont cent fois mes foins vous ont parée, Peut-être entre vos mains est-elle demeurée, Comme un gage fecret de la fidélité, ZAYRE. Je n'ai point d'autre preuve; & mon cœur qui s'ignore, Pourrait-il fuivre un Dieu que mon amant ab- La coûtume, la loi plia mes premiers ans Je le vois trop; les foins qu'on prend de notre Forment nos fentimens, nos mœurs, notre créance ; J'euffe été près du Gange efclave des faux Dieux, Chrétienne dans Paris, Mufulmane en ces lieux. L'inftruction fait tout, & la main de nos peres 'Grave en nos faibles cœurs ces premiers ca◄ racteres, Que l'exemple & le temps nous viennent re tracer, Et que peut-être en nous Dieu feul peut effacer. D'Orofmane en fecret l'image fut tracée. 1 Des humains attendris font un peuple de freres; Obligés de s'aimer, fans doute, ils font heureux. FATIME. Pourquoi donc aujourd'hui vous déclarer con→ tr'eux ? A la Loi Musulmane à jamais affervie, Eh! qui refuferoit le préfent de fon cœur? Mais Orofmane m'aime, & j'ai tout oublié. Rois, A cer aimable front que la gloire environne. Chere Fatime, en lui je n'aime que lui-même. Pour l'élever à foi defcendroit jusqu'à lui. Q F |