Non, toute trahifon eft indigne & barbare. TULLIE. Ecoute au moins ce fang qui m'a donné la vie. TITUS. Eh! dois-je écouter moins mon fang & ma patrie ? TULLIE. Ta patrie! ah barbare! en eft-il donc fans moi TITUS. Nous fommes ennemis. . la nature, la Loi, Nous impofe à tous deux un devoir fi farouche TULLIE. Nous, ennemis! ce nom peut fortir de ta bouche! TITUS. Tout mon cœur la dément. TULLIE. Ofe donc me fervir, Tu m'aimes, venge-moi. SCENE VI BRUTUS, ARONS, TITUS, TULLIE, MESSALA, ALBIN, PROCULUS, Liceurs, BRUTUS à Tullie. MADAME, il faut partir; Dans les premiers éclats des tempêtes publi ques, Rome n'a pu vous rendre à vos Dieux domef tiques; Tarquin même en ce temps, prompt à vous ou blier, Et du foin de nous perdre occupé tout entier L'inflexible équité foit la garde éternelle. Et fi de vos fateurs la funefte malice Jamais dans votre cœur ébranloit la juftice, Prête alors d'abufer du pouvoir fouverain,. Souvenez-vous de Rome, & fongez à Tarquin; Et que ce grand exemple où mon espoir fe fon de, Soit la leçon des Rois, & le bonheur du monde. A Arons. Le Sénat vous la rend, Seigneur, & c'est à vous De la remettre aux mains d'un pere & d'un époux. Proculus va vous fuivre à la porte facrée. TITUS éloigné. O de ma paffion fureur défefperée ! Il va vers Arons. Je ne fouffrirai point, non.... permettez Seigneur. Brutus Tullie fortent avec leur fuite. Arons Meffala reftent. Dieux! ne mourrai-je point de honte & de dou leur ? A Arons. ... Pourrois-je vous parler? ARONS. Seigneur, le temps me preffe ; Il me faut fuivre ici Brutus & la Princesse ; Je puis d'une heure encor retarder fon départ ; Craignez, Seigneur, craignez de me parler trop tard. Dans fon appartement nous pouvons l'un & l'autre Parler de fes deftins, & peut-être du vôtre. Il forts SCENE VII. TITUS, MESSALA. TITUS. SORT, qui nous a rejoints, & qui nous déf unis ; Sort, ne nous as-tu faits que pour être ennemis! Ah! cache, fi tu peux, ta fureur & tes larmes. MESSAL A. Je plains tant de vertus, tant d'amour & de charmes ; Un cœur tel que le fien méritoit d'être à vous. TITUS. Non, c'en eft fait, Titus n'en fera point l'époux MESSAL A. Pourquoi? Quel vain fcrupule à vos defirs s'op pofe? TITUS. Abominables Loix! que la cruelle impose; Tyrans que j'ai vaincus, je pourrois vous fer vir! Peuples que j'ai sauvés, je pourrois vous trahir! L'amour, dont j'ai fix mois vaincu la violence. L'appui de son pays, qui m'inftruifit à l'être, Que j'imitai, qu'un jour j'euffe égalé peut-être. Après tant de vertus, quel horrible deftin! MESSAL A. Vous eûtes les vertus d'un Citoyen Romain; tre. Seigneur, vous ferez Roi, dès que vous voudrez l'être ; Le Ciel met dans vos mains en ce moment heureux, La vengeance, l'empire, & l'objet de vos feux. Que dis-je ? Ce Conful, ce Héros, que l'on nomme Le pere, le foûtien, le Fondateur de Rome, Seigneur, embelliffez ce grand nom de vainqueur, Du nom plus glorieux de pacificateur ; Daignez nous ramener ces jours, où nos ancêtres Heureux, mais gouvernés, libres, mais fous des maîtres , Pefoient dans la balance, avec un même poids, Eft des Gouvernemens le meilleur ou le pire, Affreux fous un tyran, divin sous un bon Roi, |