C'en eft fait : je me rends, banniffez votre effroi; Puifque vous m'avez vû, vous triomphez de moi. Vous n'avez plus besoin d'excuse & de défense, Ma tendreffe pour vous,vous tient lieu d'inno cence. En est-ce assez, ô Ciel ! en est-ce assez, amour ? C'est moi qui vous implore, & qui tremble à mon tour. Serez-vous aujourd'hui la feule inexorable? Quand j'ai tout pardonné, ferai-je encor coupable? Mariamne, ceffons de nous perfécuter; Nos cœurs ne font-ils faits que pour se détefter? Nous faudra-t-il toujours redouter l'un & l'autre ? Finiffons à la fois ma douleur & la vôtre. Commençons fur nous-mêmes à regner en ce jour; Rendez-moi votre main; rendez – moi votre amour. MARIAM NE, Vous demandez ma main ! Juste Ciel que j'implore, Vous fçavez de quel fang la fienne fume encore. Eh bien, j'ai fait périr & ton pere & mon Roi. Que dis-je? fon trépas, l'affront fait à tes fils, Sont les moindres forfaits que mon cœur air commis. Hérode a jusqu'à toi porté fa barbarie Garde-toi d'abuser du trouble qui me presse. MARIAM NE. Ah! barbare, Un jufte repentir produit-il vos transports? HEROD E. Oui, tu peux tout fur moi, fi j'amollis ta haine. Hélas! ma cruauté, ma fureur inhumaine, C'est toi qui dans mon cœur a fçu la rallumer; Tu m'as rendu barbare en ceffant de m'aimer. Que ton crime & le mien foient noyés dans mes larmes ; Je te jure, ༤༥,, SCENE SEIGNEUR, tout le peuple eft en armes. Dans le fang des Bourreaux il vient de renverfer Il marche vers ces lieux, il vient, il va paraître. HEROD E. Quoi ! dans le moment même où je fuis à vos pieds, Vous auriez pu, perfide!.. MARIAM NE. Ah! Seigneur, vous croiriez? ... HERODE. Tu veux ma mort ! Eh bien, je vais remplir ta haine : Mais au moins dans ma tombe il faut que je t'entraîne, Et qu'unis malgré toi... Qu'on la garde, Soldats. Tcm. II. 1 HERODE, MARIAMNE, SALOMÉ, MAZAEL, ELISE, Gardes. AH! mon frere, aux Hébreux ne vous pré fentez pas. Le Peuple foulevé demande votre vie. HERODE. Allons. Ils me verront, & je cours les chercher. De l'horreur où je fuis tu répondras, cruelle. Ne l'abandonnez pas, ma fœur, veillez fur elle. MARIAM NE. Je ne crains point la mort ; mais j'atteste les Cieux... MAZAEL. Eh! Seigneur, les Romains font déjà fous vos Courons... Mais quoi ! laiffer la coupable impunie! Ah! je veux dans fon fang laver fa perfidie; Je veux,j'ordonne,hélas ! dans mon funefte fort, Je ne puis rien réfoudre, & vais chercher la mort. Fin du quatriéme Alte. ACTE V. SCENE I MARIAMNE, ELISE, Gardes. MARIAM NE. ELOIGNEZ-VOUS, Soldats, daignez laisser du moins Votre Reine un moment refpirer fans témoins. Les Gardes fe retirent au coin du Théatre. Voilà donc, jufte Dieu, quelle eft ma destinée! La fplendeur de mon fang, la pourpre où je fuis née, Enfin ce qui fembloit promettre à mes beaux jours D'un bonheur affuré l'inaltérable cours; Vaine ombre de bonheur, que vous m'avez trompée ! Sous ce Thrône coupable, un éternel ennui M'a creufé le tombeau que l'on m'ouvre aujourd'hui. Dans les eaux du Jourdain j'ai vu périr mon frere; Mon époux à mes yeux a maffacré mon pere |