SCENE II. VARUS, ALBIN, Suite de Varus. VARUS. M Ars déjà le Roi vient. Déjà dans ce séjour, Le fon de la trompette annonce fon retour. Quel retour, juftes Dieux! Que je crains fa présence! Le cruel peut d'un coup affurer fa vengeance, Plût au Ciel que la Reine eût déjà pour jamais Abandonné ces lieux confacrés aux forfaits! Hélas! je ne puis même accompagner fa fuite, Plus je l'adore, & plus il faut que je l'évite. C'eft un crime pour moi d'ofer fuivre fes pas, Et tout ce que je puis... mais je vois Idamas. SCENE 111. VARUS, IDAMAS, ALBIN, Suite de Varus. AVANT IDAMAS. VANT que dans ces lieux mon Roi vien- Recevoir de vos mains le facré Diadême, tés; Seigneur, fouffrirez-vous ? ́.. VARUS. Idamas, arrêtez. Le Roi peut s'épargner ces frivoles hommages, De l'amitié des Grands importuns témoignages, D'un Peuple curieux trompeur amusement Qu'on étale avec pompe, & que le cœur dé ment. Mais parlez; Rome enfin vient de vous ren◄ dre un Maître ; Hérode eft Souverain: eft-il digne de l'être ? La Reine en ce moment eft-elle en fureté ? Et le fang innocent fera-t-il refpecté ? IDAMA S. Veuille le juste Ciel, formidable au parjure, Dans fa propre maifon voit fa gloire avilie. Hai de fon épouse, abufé par la fœur, Déchiré de foupçons, accablé de douleur J'ignore en ce moment le deffein qui l'entraîne. Mais je le plains, Seigneur, & crains tout pour la Reine; Daignez la protéger... VARUS. Il fuffit, Idamas La Reine eft en danger; Albin, fuivez mes pas; Venez, c'est à moi feul de fauver l'innocence. IDAMA S. Seigneur, ainfi du Roi vous fuirez la présence? Je fçai qu'en ce Palais je dois le recevoir, IDAMA S. Quels orages nouveaux ! quel trouble je prévoi! Puiffant Dieu des Hébreux, changez le cœur du Roi. EH quoi! Varus auffi femble éviter ma våë! Quelle horreur devant moi s'est par tout répanduë! Ciel! ne puis-je infpirer que la haine ou l'effroi ? Tous les cœurs des humains font-ils fermés pour moi ? En horreur à la Reine, à mon Peuple, à moimême, A regret fur mon front je vois le Diadême. MAZAEL. Daignez calmer ces injuftes alarmes. Malheureux, qu'ai-je fait? MAZAEL. Quoi! vous veríez des larmes? Vous, ce Roi fortuné, fi fage en fes deffeins; Vous, la terreur du Parthe, & l'ami des Ro mains? Tom. II. H Songez, Seigneur, fongez à ces noms pleins de gloire, Que vous donnoient jadis Antoine & la Victoire. Songez, que près d'Augufte, appellé par fon choix, Vous marchiez diftingué de la foule des Rois. Revoyez à vos loix Jérufalem renduë, Jadis par vous conquife, & par vous défendue, Reprenant aujourd'hui fa prémiere fplendeur, En contemplant son Prince au faîte du bonheur. Jamais Roi plus heureux dans la Paix, dans la Guerre... HÉRODE. Non, il n'eft plus pour moi de bonheur fur la terre: Le deftin m'a frapé de fes plus rudes coups, Et pour comble d'horreurs, je les mérite tous. IDAMAS, Seigneur, m'eft-il permis de parler fans con trainte ? Ce Thrône augufte & faint qu'environne la crainte, Seroit mieux affermi s'il l'étoit par l'amour. En faifant des heureux, un Roi l'eft à fon tour. A d'éternels chagrins votre ame abandonnée Pourroit tarir d'un mot leur fource empoisonnée. Seigneur , ne fouffrez plus, que d'indignes dif cours Ofent troubler la paix & l'honneur de vos jours, Ni que de vils flateurs écartent de leur Maître Des cœurs infortunés qui vous cherchoient peut-être. Bientôt de vos vertus, tout Ifraël charmé |