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ACTE II.

SCENE I.

SALOME, MAZAEL.

ENFIN

SALOMÉ.

NFIN vous le voyez, ma haine eft con-
fondue,

Mariamne triomphe, & Salome eft perdue.
Zarès fut fur les eaux trop long-temps arrêté,
La mer alors tranquille à regret l'a porté.
Mais Hérode en partant pour fon nouvel Em-

pire,

Revole avec les vents vers l'objet qui l'attire;
Et les mers & l'amour, & Varus & le Roi,
Le Ciel, les Elémens, font armés contre moi.
Fatale ambition que j'ai trop écoutée,
Dans quel abyfme affreux m'as-tu précipitée!
Je vous l'avois bien dit, que dans le fond du

cœur

Le Roi fe repentoit de fa jufte rigueur.
De fon fatal penchant l'afcendant ordinaire
A révoqué l'Arrêt dicté dans fa colere.
J'en ai déjà reçu les funeftes avis ;

Et Zarés à fon Roi renvoyé par m pris,
Ne me laiffe en ces lieux qu'une douleur ftérile,
Qu'un opprobre éternel, & qu'un crime inutile.
Déjà de ma rivale adorant la faveur,
Le Peuple à ma difgrace infulte avec fureur.
Je verrai tout plier fous fa grandeur nouvelle,

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Et mes faibles honneurs éclipfés devant elle :
Mais c'eft peu que fa gloire irrite mon dépit,
Ma mort va fignaler ma chûte & fon crédit.
Je ne me flate point; je fçai comme en fa placé
De tous mes ennemis je confondrois l'audace.
Ce n'eft qu'en me perdant qu'elle pourra regner,
Et fon jufte courroux ne doit point m'épargner.
Cependant, ô contrainte! ô comble d'infamie!
Il faut donc qu'à fes yeux ma fierté s'humilie!
Je viens avec refpect effuyer fes hauteurs,
Et la féliciter fur mes propres malheurs.

MAZAE L.

Contre elle encor, Madame, il vous reste des

armes.

J'ai toujours redouté le pouvoir de fes charmes :
J'ai toujours craint du Roi les fentimens fecrets;
Mais fi je m'en rapporte aux avis de Zarès,
La colere d'Hérode autrefois peu durable,
Eft enfin devenue une haine implacable.
Il détefte la Reine, il a juré fa mort;
Et s'il fufpend le coup qui terminoit fon fort,
C'eft qu'il veut ménager fa nouvelle puiffance
Et lui-même en ces lieux affurer fa vengeance.
Mais foit qu'enfin fon cœur en ce funefte jour,
Soit aigri par la haine, ou fléchi par l'amour,
C'eft affez qu'une fois il ait profcrit fa tête.
Mariamne aisément groffira la tempête:
La foudre gronde encor : un Arrêt fi cruel
Va mettre entr'eux, Madame, un divorce
éternel.

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Vous verrez Mariamne à foi même inhumaine, Forcer le cœur d'Hérode à ranimer sa haine Irriter fon époux par de nouveaux dédains, Et vous rendre les traits qui tombent de vos mains :

De fa perte en un mot, repolez-vous sur elle,

SALOMĖ.

Non, cette incertitude eft pour moi trop cruelle. Non, c'est par d'autres coups que je veux la fraper:

Dans un piége plus für il faut l'envelopper.
Contre mes ennemis mon intérêt m'éclaire.
Si j'ai bien de Varus obfervé la colere,
Ce tranfport violent de fon cœur agité
N'eft point un fimple effet de générofité.
La tranquille pitié n'a point ce caractere.
La Reine a des appas, Varus a pu lui plaire.
Ce n'eft pas que mon cœur injufte en fon dépit,
Difpute à fa beauté cet éclat qui la fuit ;
Que j'envie à fes yeux le pouvoir de leurs armes,
Ni ce flateur encens qu'on prodigue à fes char

mes.

Qu'elle goûte à loifir ce dangereux bonheur. Moi, je veux de mon Roi partager la grandeur; Je veux qu'à mon parti la Cour fe réuniffe, Que fous mes volontés tout tremble, tout flé chiffe.

Voilà mes intérêts & mes vœux affidus.

Vous, obfervez la Reine, examinez Varus; Faites veiller fur eux les regards mercenaires De tous ces délateurs aujourd'hui nécessaires, Qui vendent les fecrets de leurs concitoyens Et dont cent fois les yeux ont éclairé les miens. Mais, la voici. Pourquoi faut-il que je la voie?

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J

MAZAEL, NABAL.

SALOME.

E viens auprès de vous partager votre joie ; Rome me rend un frere, & vous rend un époux, Couronné, tout-puiffant, & digne enfin de vous. Son amour méprifé, fon trop de défiance, Avoit contre vos jours allumé fa vengeance: Mais ce feu violent s'eft bientôt confumé L'amour arma fon bras, l'amour l'a defarmé. Ses triomphes paffés, ceux qu'il prépare encore, Ce titre heureux de Grand, dont l'Univers l'honore,

Les droits du Sénat même à fes foins confiés, Sont autant de préfens qu'il va mettre à vos pieds.

Poffédez déformais fun ame & fon Empire:
C'est ce qu'à vos vertus mon amitié defire;
Et je vais par mes foins ferrer l'heureux lien,
Qui doit joindre à jamais votre cœur & le fien.

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Je ne prétends de vous, ni n'attends ce fervice: Je vous connais, Madame, & je vous rends justice.

Je fçai par quels complots, je sçai par quels détours,

Votre haine impuiffante a poursuivi mes jours. Jugeant de moi par vous, vous me craignea peut-être :

.Mais vous deviez du moins apprendre à me

connaître.

Ne me redoutez point; je sçais également Dédaigner votre crime & votre châtiment. J'ai vu tous vos deffeins, & je vous les par donne.

C'est à vos feuls remords que je vous abandonne; Si toutefois après de fi lâches efforts,

Un cœur comme le vôtre écoute des remords.

SALOMÉ.

Je n'ai point mérité cette injufte colere.
Ma conduite, mes foins, & l'aveu de mon

frere,

Contre tous vos foupçons vont me juftifier.

MARIAM NE.

Je vous l'ai déjà dit; je veux tout oublier. Dans l'état où je fuis, c'est assez pour ma gloire : Je puis vous pardonner; mais je ne puis vous croire.

MAZAE L.

J'ose ici, grande Reine, attester l'Eternel,
Que mes foins à regret...

MARIAM NE.

Arrêtez, Mazaël,

Vos excuses pour moi font un nouvel outrage. Obéïffez au Roi, voilà votre partage.

A mes tyrans vendu, fervez bien leur courroux: Je ne m'abaisse pas à me plaindre de vous.

A Salomé.

Je ne vous retiens point, & vous pouvez, Ma

dame,

Gv

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