Obrazy na stronie
PDF
ePub

l'esprit le plus fort, le plus victorieux et le plus digne de la couronne, selon ce qui est dit Apoc., VI, 2: « La couronne lui a été donnée, et il est parti en vainqueur, pour remporter des victoires. » Il paroît donc que le germe du péché ou de la concupisence devoit surtout être dans le Christ.

Mais le contraire résulte de cette parole de l'Ange, Matth., I, 20: « Ce qui est né en elle vient de l'Esprit saint. » Or l'opération du Saint-Esprit exclut non-seulement le péché, mais encore toute inclination au péché, ce que nous entendons ici par germe ou concupiscence. Donc le germe du péché ne fut pas dans le Christ.

(CONCLUSION. Comme la grace et la vertu se trouvoient dans le Christ au degré le plus éminent, il n'y avoit en lui aucun germe de péché.)

Ainsi que nous l'avons dit plus haut, quest. VII, art. 2 et 9, le Christ posséda dans toute la perfection possible la grace et toutes les vertus. Or la vertu morale qui réside dans la partie non raisonnable de l'ame, a pour effet de la soumettre à la raison, et d'une manière d'autant plus parfaite que la vertu elle-même a plus de perfection; ainsi la tempérance lui soumet la partie concupiscible, la force et la douceur lui soumettent la partie irascible, comme nous l'avons vu, I, II, quest. LVI, art. 4. Mais quand on admet la concupiscence ou le germe du péché dans une ame, on y reconnoît par là même une inclination de l'appetit sensitif vers les choses opposées à la raison (1). D'où il résulte évidemment que

(1) Voilà donc ce qu'il faut entendre par ce germe, foyer ou levain, fomes, que l'on appelle aussi concupiscence. Cette concupiscence peut être considérée, soit dans l'acte premier, soit dans l'acte second. Sous le premier rapport, c'est l'appétit lui-même en tant qu'il implique un manque de sujétion à la raison, c'est-à-dire en tant qu'il incline et se porte vers des objets opposés à la raison, et par là même illicites. Ainsi compris, l'appétit sensitif a moins d'extension que lorsqu'on le considère d'une manière absolue; car, absolument parJant, l'appétit sensitif se porte vers les objets sensibles, quels qu'ils soient, licites ou illicites. Considérée dans l'acte second, la concupiscence n'est autre chose que le mouvement ou l'acte même de l'appétit sensitif se portant vers des objets condamnés par la raison et la vertu. Evidemment, admettre dans le Christ cette dernière concupiscence, ce seroit admettre en lui

Respondeo dicendum, quòd sicut suprà dictum est (1), Christus perfectissimè habuit gratiam et omnes virtutes. Virtus autem moralis quæ est in irrationali parte animæ, eam facit esse rationi subjectam, et tantò magis, quantò perfectior fuerit virtus; sicut temperantia con

tum et maximè dignum corona, secundùm illud | dum, nullo modo fuit in ipso fomes peccati.) Apocal., VI: « Data ei corona, et exivit vincens ut vinceret. » Videtur ergo quòd in Christo maximè debuerit esse fomes peccati. Sed contra est, quod dicitur Matth., I: « Quod in ea natum est de Spiritu sancto est. » Sed Spiritus sanctus excludit peccatum et inclinationem peccati, quæ importatur no-cupiscibilem, et fortitudo et mansuetudo irasmine fomitis. Ergo in Christo non fuit fomes peccati.

(CONCLUSIO.Cùm in Christo virtus cum gratia fuerit secundum perfectissimum gra

cibilem, ut in II. parte dictum est (2). Ad rationem autem fomitis pertinet inclinatio sensualis appetitus in id quod est contra rationem. Sic igitur patet quòd quantò virtus in

(1) Nimirum qu. 7, art. 2, ex professo quoad virtutes; et art. 9, quoad gratiæ plenitudinem.

(2) Sive 1, 2, qu. 56, art. 4, generaliter de virtute morali, quæ irrationalem partem rationi

plus est parfaite la vertu qu'on possède, moins on éprouve le germe du péché. Par conséquent, le Christ ayant possédé la vertu dans toute sa per fection, le germe du péché ne s'est nullement trouvé en lui; ce à quoi il faut ajouter qu'un tel défaut ne peut en rien contribuer à la satisfaction, mais l'entrave, au contraire, par une impulsion opposée.

Je réponds aux arguments: 1o Les forces inférieures, qui résident dans l'appétit sensitif, doivent naturellement obéir à la raison; tandis qu'il n'en est pas ainsi des forces corporelles, de celles qui résident dans les esprits vitaux, ni de celles de l'ame végétative, comme nous l'avons vu dans le Philosophe, Ethic., I. Voilà pourquoi la vertu parfaite, qui consiste dans la rectitude de la raison, n'exclut pas la passibilité physique ou corporelle; mais elle exclut le germe du péché, ce germe consistant essentiellement dans la résistance de l'appétit sensitif à la lumière de la raison.

2o La chair, par la concupiscence même de l'appétif sensitif, se porte naturellement vers ce qui peut la flatter; mais la chair de l'homme, qui est un animal raisonnable, peut et doit conformer sa concupiscence ou ses appétits à l'ordre que la raison lui trace. C'est ainsi que la chair du Christ, par l'inclination même de l'appétit sensitif, réclamoit la nourriture, le repos, le sommeil et toutes les autres choses que la nature appète conformément à la droite raison, comme on le voit dans saint Jean Damascène, De Orth. fide, III. Mais il ne suit nullement de là que le germe du péché ait été dans le Christ, puisque ce germe emporte l'idée d'une concupiscence qui se porte vers les objets sensibles contrairement à l'ordre de la raison.

le péché, chose absolument impssible, comme nous venons de le voir. On ne peut pas non plus lui attribuer la concupiscence dans le premier sens. Telle est, si l'on veut bien l'ob server, la portée des raisons données par notre maître; et tel est aussi le sentiment unanime des théologiens.

tem peccati, cujus ratio consistit in resistentia sensualis appetitus ad rationem.

aliquo fuerit magis perfecta, tantò magis in eo debilitatur vis fomitis. Cum igitur in Christo fuerit virtus secundùm perfectissimum gradum, Ad secundum dicendum, quòd caro naturaliconsequens est quòd in eo fomes peccati non ter concupiscit id quod est sibi delectabile confuerit; cùm etiam iste defectus non sit ordina-cupiscentiâ appetitus sensitivi; sed caro homibilis ad satisfaciendum, sed potius inclinet ad contrarium satisfactionis.

nis (qui est animal rationale) hoc concupiscit secundùm modum et ordinem rationis. Et hoc Ad primum ergo dicendum, quòd inferiores modo caro Christi, concupiscentiâ appetitus vires pertinentes ad sensibilem appetitum, na- sensitivi, naturaliter appetebat escam et potum turaliter sunt obedibiles ratioui; non autem et somnum, et alia quæ secundùm rectam ravires corporales, vel humorum corporalium, tionem appetuntur, ut patet per Damascenum vel etiam ipsius animæ vegetabilis, ut patet in III. lib. Ex hoc autem non sequitur quòd in I. Ethic. Et ideo perfectio virtutis, quæ in Christo fuerit fomes peccati, qui importat est secundùm rationem rectam, non excludit concupiscentiam delectabilium præter ordinem passibilitatem corporis; excludit autem fomi- rationis.

subjicit; sed 2, 2, qu. 141, de virtute temperantiæ, qu. 123, de virtute fortitudinis, qu. 157, de mansuetudine.

3° La force de l'esprit se révèle bien jusqu'à un certain point dans la résistance qu'il oppose à la concupiscence de la chair, en tant qu'elle lutte elle-même contre l'esprit; mais cette force se manifeste beaucoup plus grande quand elle a pour effet de comprimer entièrement la chair et de rendre impossible en elle toute concupiscence contre l'esprit. Et c'étoit la ce qui convenoit au Christ, dont l'esprit possédoit évidemment le plus haut degré de force. Bien donc qu'il n'ait pas eu à souffrir les assauts intérieurs de la concupiscence, il fut extérieurement assailli par le monde et par le diable; et c'est en remportant la victoire sur eux qu'il a mérité la couronne.

ARTICLE III.

L'ignorance s'est-elle trouvée dans le Christ?

Il paroît que le Christ a été sujet à l'ignorance. 1o Le Christ a réellement éprouvé ce à quoi il étoit soumis par sa nature humaine, quoique cela ne pût lui convenir selon sa nature divine, comme la souffrance et la mort; car saint Jean Damascène dit dans le livre que nous venons de citer : « Il a pris une nature sujette à l'ignorance et à l'esclavage.» Donc l'ignorance fut réellement dans le Christ.

On est dans l'ignorance quand une notion fait défaut. Or il est une notion qui fit défaut au Christ, puisque l'Apôtre dit, II. Corinth., V, 21: « Celui qui ne connut pas le péché, a subi pour nous les suites du péché.» Donc le Christ fut sujet à une sorte d'ignorance.

3o Il est dit, Isa., VIII, 4 : « Avant que l'enfant sache nommer son père et sa mère, la force de Damas sera dissipée. » Or le Christ est cet enfant dont parle le Prophète. Donc il y eut en lui une certaine ignorance.

manam naturam, licèt ei non competat secundùm divinam, sicut passio et mors. Sed ignorantia convenit Christo secunùm humanam naturam; dicit enim Damascenus in IH. lib. (2) quòd « ignorantem et servilem assumpsit natu

Ad tertium dicendum, quòd fortitudo spiri- | fuit in Christo, quod ei competit secundùm hutus aliqualis ostenditur, ex hoc quòd resistit concupiscentiæ carnis sibi contrariantis; sed major fortitudo spiritus ostenditur, si per ejus virtutem totaliter caro comprimatur, ne contra spiritum concupiscere possit. Et ideo hoc competebat Christo, cujus spiritus summum forti-ram. » Ergo ignorantia verè fuit in Christo. tudinis gradum attigerat. Et licèt non sustinuerit impugnationem interiorem ex parte fomitis, sustinuit tamen exteriorem impugnationem ex parte mundi et diaboli, quos superando coronam promeruit.

ARTICULUS III.

Utrùm in Christo fuerit ignorantia. Ad tertium sic proceditur (1). Videtur quòd in Christo fuerit ignorantia. Illud enim verè

2. Præterea, aliquis dicitur ignorans per notitiæ defectum. Sed aliqua notitia defuit Christo; dicit enim Apostolus II. Corinth., V : « Eum qui non novit peccatum, pro nobis peccatum fecit. » Ergo in Christo fuit ignorantia.

3. Præterea, Isai., VIII, dicitur: « Antequam sciat puer vocare patrem suum et matrem suam, auferetur fortitudo Damasci. » Puer autem ille est Christus. Ergo in Christo fuit aliquarum rerum ignorantia.

(1). De his etiam III, dist. 16, art. 1, quæstiune. 1, ad 3.

(2) Ut cap. 21, statim ab initio, videre est, ubi par esse ait ut eam talem assumptam esse agnoscamus; quo tamen bono sensu infrà ostendit S. Thomas.

Mais c'est le contraire qu'il faut dire. L'ignorance ne sauroit se détruire par l'ignorance. Or le Christ est venu pour détruire notre ignorance, puisqu'il a a porté la lumière à ceux qui étoient assis dans les ténèbres et dans l'ombre de la mort. » Donc il n'y eut pas d'ignorance dans le Christ.

(CONCLUSION. De même que, par la plénitude de la grace et de la vertu, il n'y eut dans le Christ aucun germe de péché; de même, à raison de la science parfaite qu'il posséda, il ne put y avoir en lui aucune ignorance.)

Le Christ posséda la plénitude de toute science, tout comme il posséda la plénitude de la grace et de la vertu, ainsi que nous l'avons dit, quest. VII, art. 9, pour ce qui regarde la plénitude de la grace et de la vertu, quest. IX et seq., pour ce qui regarde la plénitude de la science infuse, acquise, bienheureuse (1). Or, de même que dans le Christ la première de ces plénitudes exclut la concupiscence, de même la seconde exclut l'ignorance. Celle-ci, par conséquent, ne se trouva pas dans le Christ plus que celle-là.

Je réponds aux arguments: 1o La nature prise par le Christ peut être considérée sous un double aspect : dans son espèce, d'abord; et c'est en la considérant ainsi que saint Jean Damascène la déclare sujette à l'ignorance et à la servitude; car voici ce qu'il ajoute : « Cette nature de l'homme doit, en effet, servir celui qui l'a formée (c'est-à-dire Dieu) et de plus elle ne possède pas la connoissance des choses futures. » On peut, en second lieu, considérer cette même nature dans ce qu'elle a par son union avec l'hypostase divine; et de là lui vient la plénitude de la science

(1) La thèse actuelle ne fait donc que reproduire sous une autre forme l'affirmation géné rale qui résulte des diverses thèses où l'auteur a démontré que le Christ possédoit pleinement et sans restriction cette triple science. Là où tout est lumière, il n'y a plus de place pour l'obscurité. Cela étoit déjà évident; ce sujet n'a été ramené que par l'ordre des matières et la nécessité de répondre à quelques objections.

Sed contra ignorantia per ignorantiam non | plenitudo scientiæ excludit ignorantiam, quæ tollitur. Christus autem ad hoc venit ut igno-scientiæ opponitur. Unde, sicut in Christo non rantias nostras auferret; venit enim ut « il-fuit fomes peccati, ita non fuit in eo ignouminaret his qui in tenebris et in umbra mortis rantia. sedent. » Ergo in Christo ignorantia non fuit. Ad primum ergo dicendum, quòd natura à (CONCLUSIO.Sicut in Christo, ex virtutis Christo assumpta potest dupliciter considerari : et gratiæ plenitudine, nullus fuit peccati fo- uno modo, secundùm rationem suæ speciei; & mes, propter scientiæ quæ in eo fuit perfec- secundùm hoc dicit Damascenus eam esse igno tionem, nulla etiam ignorantia inesse potuit.) rantem et servilem; unde subdit : « Nam serva Respondeo dicendum, quòd sicut in Christo quidem est hominis natura ejus qui fecit ipfuit plenitudo gratiæ et virtutis, ita in ipso sam, » Dei scilicet; «et non habet futurorum fuit plenitudo omnis scientiæ, ut ex præmissis cognitionem. » Alio modo potest considerari patet (1). Sicut autem in Christo plenitudo secundùm id quod habet ex unione ad hypostagratiæ et virtutis excludit fomitem peccati; ital sim divinam; ex qua habet plenitudinem scien

(1) Quoad gratiæ plenitudinem adeoque virtutis, qu. 7, art. 9; quoad plenitudinem scientiæ Infuse, acquisitæ, beatæ), qu. 9, art. 1 ac deinceps; ut et qu. 10, art. 2, et qu. 11, art. 1, i qu. 12, art. etiam 1.

[ocr errors]

et de la grace, selon cette parole de l'Evangéliste, Joan., I, 14: « Nous l'avons vu, comme le Fils unique du Père, plein de grace et de vérité.» Et de la sorte la nature humaine dans le Christ ne fut sujette à aucune ignorance.

2o S'il est dit du Christ qu'il n'a pas connu le péché, c'est qu'il ne l'a pas connu par expérience, ce qui ne veut pas dire qu'il n'en ait eu la notion pure et simple (1).

3o Le Prophète parle en cet endroit de la science humaine du Christ. II dit, en effet : « Avant que l'enfant (ce qui déjà indique la nature humaine) sache nommer son père et sa mère (c'est-à-dire Joseph que l'on croyoit être son père, et Marie) la force de Damas sera détruite. » Cela ne veut pas dire assurément qu'il ait été un instant homme sans le savoir; mais cela veut dire, avant qu'il soit homme, avant qu'il ait la science expérimentale de l'humanité. Quant à ce qui suit, la veut dire dans le sens littéral que la force de Damas et de Samarie sera détruite et leurs dépouilles enlevées par le roi d'Assyrie; et, dans le sens spirituel, cela veut dire que «n'étant pas encore né il sauvera son peuple par sa prière,» comme le dit la Glose tirée de saint Jérôme (2). Mais saint Augustin veut que cela se soit accompli dans l'adoration des Mages; et voici ce qu'il dit dans un sermon sur l'Epiphanie: «Avant de pouvoir parler la langue des hommes au moyen de la nature humaine, il reçoit la force de Damas, c'est-à-dire les richesses dans lesquelles Damas mettoit sa force; et parmi ces richesses, l'or désigne sa puissance royale. Les dépouilles de Samarie ne sont autres que ses propres habitants; la Samarie représente l'idolatrie, puisque c'est là que le peuple d'Israël se détourna de Dieu pour s'adonner au culte des idoles. Ce sont là les premières dépouilles qu'il ar

(1) C'est la pensée et presque l'expression du vénérable Bède, qui répète lui-même celles de saint Augustin.

(2) Ainsi s'expliquent encore, ou à peu près, Théodoret, saint Cyrille et saint Ambroise, dans leur interprétation du même texte.

tiæ et gratiæ, secundùm illud Joan., I : « Vi- |
dimus eum quasi unigenitum à Patre plenum
gratiæ et veritatis. » Et hoc modo natura hu-
mana in Christo ignorantiam non habuit.

Ad secundum dicendum, quòd Christus dici-
tur non novisse peccatum, quia nescivit per
experientiam, scivit autem per simplicem noti-
tiam.

Ad tertium dicendum, quòd loquitur ibi Propheta de scientia humana Christi; dicit enim: « Antequam sciat puer, scilicet secundum humanitatem, vocare patrem suum, scilicet Joseph (qui pater ejus fuit putativus), et matrem suam, scilicet Mariam, auferetur fortitudo Damasci. » Quod non est sic intelligendum quasi aliquando fuerit homo et hoc nesciverit sed

[ocr errors]

antequam sciat, id est, antequam fiat homo, scientiam habens humanam, auferetur, vel ad litteram fortitudo Damasci et spolia Samariæ, per regem Assyriorum; vel spiritualiter, quia « nondum natus populum suum sola invo catione salvabit, » ut Glossa Hieronymi ibi exponit. Augustinus tamen in sermone De Epiph., dicit hoc esse completum in adoratione Magorum; ait enim : « Antequam per humanam carnem humana verba proferret, accepit virtutem Damasci, scilicet divitias in quibus Damascus præsumebat; in divitiis autem principatus auro defertur. Spolia verò Samariæ iidem ipsi erant qui eam incolebant; Samaria namque pro idololatria sumitur, illic enim populus Israel aversus à Domino, ad idola co

« PoprzedniaDalej »