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éminemment à l'ame du Christ, de telle sorte qu'elle pouvoit nonseulement opérer elle-même des miracles, mais communiquer encore la même faveur aux autres. Voilà pourquoi il est dit, Matth., XII, 1: « Jésus ayant convoqué ses douze disciples, leur donna le pouvoir sur les esprits immondes pour les chasser, et pour guérir toute langueur et toute infirmité. »

ARTICLE III.

L'ame du Christ a-t-elle possédé la toute-puissance relativement à son propre corps?

Il paroît que l'ame du Christ a possédé une telle toute-puissance. 1° Saint Jean Damascène dit De Orthod. fid., III, 20 et 23: « Toutes les choses naturelles dépendoient de la volonté du Christ; s'il éprouva la faim, la soif, la crainte, c'est qu'il le vouloit, il est mort parce qu'il l'a voulu. » Or, si l'on dit que Dieu est tout-puissant, c'est parce qu'il a fait tout ce qu'il a voulu. Donc il paroît que l'ame du Christ possédoit la toute puissance relativement aux opérations de son propre corps.

2o La nature humaine fut plus parfaite dans le Christ qu'elle ne l'avoit été dans Adam; et chez celui-ci, par un effet de la justice originelle, qu'il possédoit dans l'état d'innocence, le corps étoit entièrement soumis à l'ame, de telle sorte qu'il ne pouvoit rien arriver dans le corps contrairement à la volonté de l'ame. Donc, à bien plus forte raison, l'ame du Christ posséda-t-elle la toute-puissance relativement à son propre corps.

parfaitement expliqué à la fin de la première partie, certaines transformations en dehors du cours ordinaire de la nature; ce pouvoir, elle avoit pouvoir de faire subir aux créatures même la faculté de le transmettre, comme le Sauveur le déclare lui-même, comme l'histoire de la Religion nous prouve qu'elle en a souvent usé dans toute la suite des siècles. Mais il est une tranformation du moins qu'elle ne pouvoit pas opérer dans les créatures, pas même comme instrument du Verbe divin; c'est la transformation qui consisteroit à les anéantir. Entre l'être et le néant il n'y a pas moins de distance qu'entre le néant et l'être. Une puis

hæc quidem gratia excellentissimè data est animæ Christi, ut scilicet non solùm ipse miracula faceret, sed etiam ut hanc gratiam in alios transfunderet. Unde dicitur Matth., X, quòd « convocatis duodecim discipulis, dedit eis potestatem spirituum immundorum, ut ejiterent eos, et curarent omnem languorem et onem infirmitatem (1). »

ARTICULUS III.

Ulrùm anima Christi babuerit omnipo

tentiam respectu proprii corporis.

Ad tertium sic proceditur. Videtur quòd anim a Christi haberuit omnipotentiam respectu |

proprii corporis. Dicit enim Damascenus in III. lib., quòd «omnia naturalia fuerunt Christo voluntaria; volens enim esurivit, volens sitivit, volens timuit, volens mortuus est, etc. » Sed ex hoc Deus dicitur omnipotens, quia « omnia quæcumque voluit, fecit. » Ergo videtur quòd anima Christi habuerit omnipotentiam respectn naturalium operationum proprii corporis.

2. Præterea, in Christo fuit perfectior humana natura quam in Adam ; in quo secundùm originalem justitiam quam habuit in innocentiæ statu, habebat corpus omnino subjectum animæ voluntatem. Ergo multò magis anima Christi ut nihil in corpore posset accidere contra animæ habuit omnipotentiam respectu sui corporis,

(1) Quamvis hanc potestatem à divina virtute tantùm accepisse subintelligi possint, non al: anima Christi.

3o Le corps change naturellement sous l'influence de l'imagination, et d'autant plus, que l'ame est douée d'une imagination plus vive, comme il a été dit dans la première partie, quest. CXVII, art. 3. Or l'ame du Christ possédoit les facultés les plus parfaites, l'imagination, par conséquent, comme toutes les autres. Donc l'ame du Christ étoit toute-puissante relativement à son propre corps.

Mais le contraire résulte de cette parole de l'Apôtre, Hebr., II, 17 : « Il a dû être en tout semblable à ses frères, » et principalement dans les choses qui tiennent à la constitution de la nature humaine. Or il est essentiel à cette nature, que ni la santé corporelle, ni le travail de la nutrition, ni celui de la croissance ne soient soumis à l'empire de la raison ou de la volonté; parce que les choses qui tiennent à la nature dépendent de Dieu seul, auteur de la nature. Donc elles n'étoient pas non plus soumises à l'ame du Christ; et cette ame, dès-lors, n'étoit pas toute puissante relativement à son propre corps.

(CONCLUSION.- Si l'ame du Christ ne pouvoit pas détourner les corps étrangers du cours ordinaire de la nature, elle n'avoit pas non plus par sa propre vertu une action toute-puissante sur son propre corps, elle n'auroit pu l'avoir que comme instrument du Verbe divin.)

Ainsi que nous l'avons déjà dit, l'ame du Christ peut être considérée sous un double aspect: dans sa propre nature avec la vertu inhérente à cette même nature; et de la sorte, comme elle ne pouvoit pas imprimer aux corps étrangers un mouvement contraire au cours ordinaire des choses, elle ne pouvoit pas davantage faire subir une semblable modification à son propre corps; car l'ame du Christ, à ne considérer que sa nature propre, a des rapports déterminés et une proportion exacte avec le corps auquel elle est unie (1). L'ame du Christ peut ensuite être considérée sance créée peut diviser, décomposer, pulvériser, dissoudre; mais anéantir, même un atôme, faire le néant où étoit l'être, Dieu seul peut.

(1) Nous l'avons vu fréquemment, c'est là le point essentiel et fondamental du traité de

3. Præterea, ad imaginationem animæ naturaliter corpus immutatur, et tantò magis quantò magis anima fuerit fortis imaginationis, ut in I. part. habitum est. Sed anima Christi habuit virtutem perfectissimam, et quantum ad imaginationem, et quantum ad alias vires. Ergo anima Christi fuit omnipotens in respectu ad corpus proprium.

Sed contra est, quod dicitur Hebr., II, quòd « debuit per omnia fratribus assimilari, » et præcipuè in his quæ pertinent ad conditionem naturæ humanæ. Sed ad conditionem humanæ naturæ pertinet quòd valetudo corporis, et ejus nutritio, et augmentum, imperio rationis seu voluntatis non subdantur; quia naturalia soli Deo, qui est auctor naturæ, subduntur. Ergo

nec in Christo subdebantur. Non igitur anima Christi fuit omnipotens respectu proprii corporis.

(CONCLUSIO. Sicut anima Christi non poterat exteriora corpora immutare à cursu et ordine naturæ, sic nec secundùm propriam virtutem respectu proprii corporis omnipotentiam habuit, nisi quatenus Verbi Dei instrumentum.)

Respondeo dicendum, quòd sicut dictum est, anima Christi potest dupliciter considerari: uno modo, secundùm propriam naturam et virtutem; et hoc modo, sicut non poterat immutare exte. riora corpora à cursu et ordine naturæ, ita etiam non poterat immutare proprium corpus à natu rali dispositione, quia anima Christi secundù propriam naturam, habet determinatam prc.

comme un instrument à la disposition du Verbe divin, avec lequel elle forme une seule personne; et sous ce rapport son corps lui étoit entièrement soumis dans chacune de ses propriétés. Toutefois, comme la vertu d'où l'action émane ne sauroit être attribuée à l'instrument, et l'est plutôt à l'agent principal, une telle toute-puissance revient au Verbe de Dieu plutôt qu'à l'ame du Christ.

Je réponds aux arguments: 1o Le mot de saint Jean Damascène doit s'entendre de la volonté divine du Christ; car, comme ce pieux auteur le dit lui-même dans le chapitre précédent, « c'est par le bon plaisir de la volonté divine qu'il étoit donné à la chair de souffrir et d'opérer les choses qui lui sont propres »

2o La justice originelle qu'Adam possédoit dans l'état d'innocence, ne donnoit pas à son ame le pouvoir d'imprimer à son propre corps une forme quelconque; elle lui donnoit seulement la faculté de le mettre à l'abri de toute chose nuisible. Certes, le Christ auroit pu, s'il l'avoit voulu, posséder le même privilège, mais, comme il y a trois états à distinguer dans l'homme, caractérisés par l'innocence, le péché et la gloire, il a pris de ce dernier la vision béatifique, du premier l'exemption de toute faute, et du second la nécessité de subir les peines de la vie présente, comme nous le verrons plus bas, quest. XIV, art. 2.

3o Quand l'ame est douée d'une imagination forte, le corps lui obéit naturellement, mais seulement sous certains rapports; ainsi, quand il s'agit de marcher sur une poutre placée à une grande élévation, parce que l'imagination est de sa nature un principe de mouvement local, De

l'Incarnation le Christ est véritablement homme. Il a subi toutes les conditions de la nature humaine, moins le péché, comme le dit l'apôtre saint Paul. Sans doute, à raison de sa perfection suréminente, le Sauveur a eu sur ses sens une domination supérieure à celle que les plus grands saints ont exercée. Mais dire que son ame a eu la toute-puissance sur son corps, c'est nier son humanité.

portionem ad suum corpus. Alio modo potest, considerari anima Christi, secundùm quòd est instrumentum unitum Verbo Dei in persona; et sic subdebatur ejus potestati totaliter omnis dispositio proprii corporis. Quia tamen virtus actionis non propriè attribuitur instrumento, sed principali agenti, talis omnipotentia magis attribuitur ipsi Verbo Dei quàm animæ Christi. Ad primum ergo dicendum; quòd verbum Damasceni est intelligendum quantum ad voluntatem Christi divinam, quia, ut ipse in præced. cap. dicit, « beneplacito divinæ voluntatis permittebatur carni pati et operari quæ propria.»

Ad secundum dicendum, quòd non pertinebat hoc ad originalem justitiam quam Adam habuit in statu innocentiæ, quòd anima hominis ha

beret virtutem transmutandi proprium corpus in quamcumque formam, sed quòd posset ipsum conservare absque omni nocumento. Et hanc etiam virtutem Christus assumere potuisset, si voluisset; sed, cùm sint tres status hominum, scilicet innocentiæ, culpæ et gloriæ, sicut de statu gloriæ assumpsit « comprehensionem,» et de statu innocentiæ « immunitatem à peccato,» ita et de statu culpæ assumpsit « necessitatem subjacendi pœnalitatibus hujus vitæ,» ut infrà dicetur (qu. 14, art. 2).

Ad tertium dicendum, quòd imaginationi, si fuerit fortis, naturaliter obedit corpus quantum ad aliqua, putà quantum ad casum de trabe in alto posita, quia imaginatio nata est esse principium motus localis, ut dicitur III. De anima (1). Similiter etiam quantum ad altera

(1) Colligitur ex text. 48 ac deinceps, ubi dicuntur duo esse motiva seu moventia secundùm

anima, III, 48; ce qui a lieu également par rapport aux alternatives de chaud et de froid, et aux autres accidents qui en sont la conséquence, par la raison que l'imagination donne le branle aux autres passions de l'ame et par suite aux mouvements du cœur, ce qui entraîne une altération dans tout le corps, altération provoquée par l'agitation des esprits vitaux. Mais les autres dispositions corporelles qui n'ont pas un rapport naturel avec l'imagination, ne subissent pas son influence, quelque forte qu'elle soit d'ailleurs, elle ne peut rien, par exemple, sur la forme de la main ou celle du pied, et autres choses du même genre.

ARTICLE IV.

L'ame du Christ a-t-elle possédé la toute-puissance relativement à l'exécution de ses propres volontés?

Il paroît que l'ame du Christ n'a pas été toute-puissante dans l'accomplissement de ses propres volontés. 1° Il est dit, Marc, VII, que Jésus « étant entré dans une maison, il vouloit que personne ne le sût, et ne pût néanmoins le cacher. » Il n'a donc pas eu toujours le pouvoir d'accomplir sa propre volonté.

2o Le commandement est l'expression de la volonté, comme il a été dit dans la première partie, quest. XIX, art. 12. Mais le Seigneur a commandé certaines choses, et le contraire est arrivé, puisqu'il est dit, Matth., IX, 31, que Jésus fit cette défense aux aveugles qu'il avoit guéris : « Faites attention que personne ne le sache; et les aveugles étant partis allèrent répandre ce bruit dans toute la contrée. » Donc il n'a pas toujours pu exécuter ce qu'il auroit voulu.

pectu executionis propriæ voluntatis. Dicitur enim Marc., VII, quòd « ingressus domum, neminem voluit scire, et non potuit latere (1). » Non ergo potuit in omnibus exequi propositum suæ voluntatis.

tionem quæ est secundùm calorem et frigus, | anima Christi non habuerit omnipotentiam reset alia consequentia, eo quòd ex imaginatione consequenter natæ sunt consequi animæ passiones, secundùm quas movetur cor, et sic per commotionem spirituum totum corpus alteratur. Aliæ verò dispositiones corporales, quæ non habent naturalem ordinem ad imaginationem, non transmutantur ab imaginatione, quantumcumque sit fortis, putà figura manús vel pedis, vel aliquid simile.

ARTICULUS IV.

2. Præterea, præceptum est signum voluntatis, ut in I. part. dictum est (qu. 19, art. 12). Sed Dominus quædam facienda præcepit, quorum contraria acciderunt; dicitur enim Matth., IX, quòd cæcis illuminatis « comminatus est Jesus dicens: Videte ne quis sciat; i autem exeuntes, diffamaverunt illum (2) per totam terram illam. » Non ergo in omnibus potuit exequi propositum suæ voluntatis.

Utrùm anima Christi habuerit omnipotentiam respectu executionis suæ voluntatis. Ad quartum sic proceditur. Videtur quòd locum, scilicet appetitus et intellectus; per intellectum tamen imaginatio intelligenda indicatur, velut intellectio quædam in hominibus, licèt in brutis ut imaginatio tantùm agat.

(1) Postquam venit in partes Tyri et Sidonis, ubi filiam Chananeæ à dæmonio liberavit, ut vers. 24 et 25 videre est.

(2) In bonam partem, juxta græcum deprozv, id est illius famam per totam illam regionem sparserunt, vers. 31.

3o Quand on peut faire une chose on ne la demande pas à un autre. Or en priant son père, le Sauveur lui demandoit sans doute l'accomplissement de ses propres volontés; et il est dit, Luc, VI, 12: « Il se retira sur la montagne pour prier, et il passoit la nuit dans l'exercice de la prière.» Donc il ne put pas exécuter en tout sa propre volonté.

Mais saint Augustin dit ainsi le contraire dans ses Questions sur l'ancien et le nouveau Testament (1): « Il est impossible que la volonté du Sauveur ne s'accomplisse pas; car il ne peut pas vouloir une chose qu'il sait ne devoir pas se faire. >>

(CONCLUSION. L'ame du Christ a pu faire par sa propre vertu, tout ce qu'elle vouloit accomplir par elle-même; mais ce qu'elle vouloit voir accomplir par la puissance divine, elle ne l'a pu faire que comme instrument du Verbe divin.)

L'ame du Christ pouvoit vouloir une chose de deux manières: d'abord, comme devant l'accomplir elle-même; et l'on doit dire qu'elle a pu tout ce qu'elle a voulu de la sorte; car sa sagesse ne permettoit pas qu'elle voulût faire par elle-même ce qui n'eût pas été en son pouvoir (2). En second lieu, l'ame du Christ a voulu des choses qu'elle savoit devoir être accomplies par la puissance divine, comme la résurrection de son propre corps et autres œuvres miraculeuses du même genre. Ces œuvres, avonsnous dit, elle pouvoit seulement les accomplir comme instrument de la divinité, et non par sa propre puissance.

Je réponds aux arguments: 1° Saint Augustin dit ibid: « Il faut dire

(1) Ouvrage qui n'est pas de saint Augustin, comme nous l'avons remarqué dans une note antérieure. Le savant Bellarmin, et avec lui les plus habiles critiques y signalent des erreurs, ? des hérésies même, qui ne leur permettent pas de l'attribuer au grand évêque d'Hippone. Mais le trait que notre saint auteur en reproduit ici, n'a rien que de parfaitement orthodoxe.

(2) Sous ce rapport, l'homme peut, d'une certaine manière, de la manière la plus heureuse pour lui, participer à la toute-puissance dont étoit douée l'ame du Christ, en conformant entièrement sa volonté à celle de Dieu, en voulant dans toutes les circonstances ce que Dieu veut, rien de moins, rien de plus. Si nous ajoutons à cela ce que le Psalmiste dit du Seigneur : « Il fera toujours leur volonté (la volonté des justes); et il exaucera leurs prières, » nous

3. Præterea, id quod potest aliquis facere, non petit ab alio. Sed Dominus petivit à Patre orando, illud quod fieri volebat; dicitur enim Luc., VI, quòd « exiit in montem orare, et erat pernoctans in oratione Dei. » Ergo non potuit exequi in omnibus propositum suæ voluntatis.

Sed contra est, quod dicit Augustinus in lib. De quæstion. veteris et novi Testamenti: « Impossibile est ut Salvatoris voluntas non impleatur; nec potest velle quod scit fieri non debere. >>

(CONCLUSIO.- Anima Christi virtute propria ea omnia efficere potuit quæ per seipsam efficere voluit; quæ verò divinâ fieri virtute vo

luit, non nisi ut Verbi divini instrumentum efficere potuit.)

Respondeo dicendum, quòd anima Christi dupliciter aliquid voluit: uno modo, quasi per se implendum; et sic dicendum est quòd quidquid voluit potuit, non enim conveniret sapientiæ ejus ut aliquid vellet per se facere quod suæ virtuti non subjaceret. Alio modo voluit aliquid, ut implendum virtute divinå, sicut resuscitationem proprii corporis, et alia hujusmodi miraculosa opera. Quæ quidem non poterat propriâ virtute, sed secundùm quòd erat instrumentum divinitatis, ut dictum est.

Ad primum ergo dicendum, quòd sicut Augustinus in lib. De quæstion, veteris et nova

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