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Mais il faut dire le contraire; car tout ce que peut le Père, le Fils le peut aussi. Or, après l'incarnation du Fils, le Père peut prendre une nature humaine numériquement distincte de celle qu'a prise le Fils; car l'incarnation du Fils n'a rien retranché à la puissance du Père ou du Fils lui-même. Il paroît donc que, après l'incarnation, le Fils pourroit prendre une autre nature humaine, en outre de celle qu'il a prise.

(CONCLUSION.Puisque la puissance de la personne divine est infinie, outre la nature humaine qu'elle a prise, elle pourroit en prendre encore une autre numériquement distincte.)

Si l'agent ne peut atteindre qu'une chose, sans aller au-delà, sa puissance est limitée à un seul objet. Or la puissance d'une personne divine est infinie, et ne sauroit avoir pour limite aucun être créé. Il ne faut donc pas affirmer qu'une personne divine a pris de telle manière une seule nature humaine, qu'il lui fût impossible d'en prendre une autre; car il sembleroit résulter de là qu'une seule nature humaine circonscrit tellement la personnalité de la nature divine, qu'aucune autre ne pourroit être unie à cette personnalité; ce qui répugne, puisque le créé est incapable de circonscrire l'incréé. Evidemment donc, si nous considérons dans la personne divine, soit sa puissance, qui est le principe de l'union, soit sa personnalité, qui en est le terme, il faut dire que, outre la nature humaine qu'elle a prise, la personne divine pourroit prendre encore une nature humaine numériquement distincte (1).

Je réponds aux arguments: 1° La forme complète la raison constitutive (1) Ne diroit-on pas vraiment que l'auteur avoit résolu d'épuiser le champ des hypothèses, sur cet important et difficile sujet? La théologie discrétive, comme il l'a nommée plus haut, 'investigation de la pensée religieuse ne pouvoit pas aller plus loin, ni peut-être s'élever plus haut. Les questions qu'il agite, les distinctions qu'il établit sont à la vérité bien subtiles; mais elles ne manquent ni de solidité ni de profondeur. L'utilité qu'elles ne semblent pas avoir par elles-mêmes, elles l'ont réellement par rapport aux questions plus positives de la dogmatique sacrée ; elles en favorisent l'intelligence, en nous obligeant à considérer sous tous les points de vue les principes et les notions qui leur servent de fondement.

Sed contra est, quòd quidquid potest Pater (ad extra), potest et Filius. Sed Pater post Incarnationem Filii potest assumere naturam humanam aliam numero ab ea quam Filius assumpsit; in nullo enim per Incarnationem Filii est diminuta potentia Patris vel Filii. Ergo videtur quòd Filius post Incarnationem possit aliam humanam naturam assumere præter eam quam assumpsit. (CONCLUSIO. - Quoniam potentia divinæ personæ infinita est, potest persona divina, præter humanam naturam quam assumpsit, aliam numero humanam naturam assumere.) Respondeo dicendum, quòd illud quod potest in unum, et non in amplius, habet potentiam imitatam ad unum. Potentia autem divinæ personæ est infinita, nec potest limitari ad aliquid

creatum. Unde non est dicendum quòd persona divina ita assumpserit unan naturam humanam, quòd non potuerit assumere aliam. Videretur enim ex hoc sequi quòd personalitas divinæ naturæ esset ita comprehensa per unan naturam humanam, quòd ad ejus personalitatem assumi alia non possit; quod est impossibile, non enim increatum à creato comprehendi potest. Patet ergo quòd, sive consideremus personam divinam secundùm virtutem, quæ est principium unionis, sive secundùm suam personalitatem, quæ est terminus unionis, oportet dicere quòd persona divina, præter naturam humanam quam assumpsit, possit aliam numero naturam humanam assumere.

Ad primum ergo dicendum, quòd natura creata perficitur in sua ratione per formam, quæ mul

de la nature créée, et cette forme se multiplie par la division de la matière (1). Si donc l'union de la matière et de la forme constitue un nouveau suppôt, il s'ensuit que la nature se multiplie par le fait de la multiplication des suppôts. Or nous avons vu dans l'article précédent que, dans le mystère de l'incarnation, l'union de la forme et de la matière, ou de l'ame et du corps, ne constitue pas un nouveau suppôt. La division de la matière pourroit donc entraîner la multiplication numérique de la nature, sans constituer des suppôts distincts.

2o On pourroit dire, semble-t-il, qu'il suivroit de notre hypothèse qu'il y auroit deux hommes, à cause des deux natures, sans qu'il y eût pour cela deux suppôts; de même que, dans la supposition contraire, les trois personnes ne seroient qu'un seul homme, parce qu'elles n'auroient pris qu'une seule nature, ainsi que nous l'avons dit, art. précéd. Mais il ne paroît pas qu'il en soit ainsi; car il faut user des noms en leur conservant la signification qu'ils ont reçue, et qui se base sur l'observation de ce qui a lieu parmi nous. Il est donc nécessaire, quand il s'agit de termes dont la signification est simple ou multiple, de considérer ce qui s'observe pour nous. La règle est de ne jamais employer au pluriel un nom dérivé d'une forme quelconque, à moins qu'il n'y ait plusieurs suppôts. Par exemple, si un homme est couvert de deux vêtements, on ne le prend pas pour deux individus vêtus, mais pour un seul individu qui porte deux vêtements; et celui qui a deux qualités, on lui donne au singulier une qualification en rapport avec ces deux qualités, et rien de plus. Or la nature que la personne divine a prise est sous quelque rapport une sorte de vêtement, bien que la comparaison ne soit pas juste à tous égards, comme nous l'avons observé, quest. II, art. 6, ad 1. Si donc une personne divine prenoit deux natures humaines, on diroit, à cause de l'unité de (1) C'est ce que saint Thomas avoit déjà montré dans la première partie, en prouvant que l'ame haine se multi plie dans la même mesure que le corps.

tiplicatur secundum divisionem materiæ. Et ideo, si compositio materiæ et formæ constituat novum suppositum, consequens est quòd natura multiplicetur secundùm multiplicationem suppositorum. Sed in mysterio Incarnationis unio formæ et materiæ (id est animæ et corporis), non constituit novum suppositum, ut suprà dictum est; et ideo posset esse multitudo secundùm numerum ex parte naturæ propter divisionem materiæ, absque distinctione supposi

torum.

Ad secundum dicendum, quòd posset videri dicendum quòd prædictâ positione factâ, sequeretur quòd essent duo homines propter duas naturas, absque hoc quòd essent ibi duo supposita; sicut è converso tres personæ dicerentur unus homo, propter unam naturam huma

nam assumptam, ut suprà dictum est. Sed hoc non videtur esse verum, quia nominibus est utendum secundùm quòd sunt ad significandum imposita; quod quidem est ex consideratione eorum quæ apud nos sunt. Et ideo oportet circa modum significandi et consignificandi considerare ea quæ apud nos sunt, in quibus nunquam nomen ab aliqua forma impositum pluraliter dicitur, nisi propter pluralitatem suppositorum. Homo enim qui est duobus vestimentis indutus, non dicitur duo vestiti, sed unus vestitus duobus vestimentis; et qui habet duas qualitates, dicitur singulariter aliqualis secundùm duas qua litates. Natura autem assumpta quantum ad aliquid, se habet per modum indumenti, licèt non sit similitudo quantum ad omnia, ut suprà dictum est (qu. 2, art. 1). Et ideo, si persona

suppôt, qu'elle est un seul homme ayant deux natures humaines. D'u autre côté, comme on dit que plusieurs hommes font un seul peuple, parce qu'il y a quelque chose de commun entre eux, et non parce qu'ils ne sont qu'un suppôt; de même, si deux personnes divines prenoient numériquement la même nature humaine, nous les appellerions un seul homme, non pas à raison de l'unité de suppôt, ainsi qu'on l'a vu dans le précédent article, mais parce qu'elles auroient en commun une chose unique (1).

3o Le rapport de la nature divine et celui de la nature humaine avec la seule personne divine, sont chacun d'un ordre différent. Le rapport de la nature divine avec cette personne est antérieur à l'autre, puisqu'elle est une même chose avec elle de toute éternité, au lieu que le rapport de la nature humaine avec la personne divine est postérieur, puisque la per sonne divine a pris cette nature dans le temps, non pas pour que la nature humaine devint la personne même, mais afin que la personne divine subsistât dans la nature humaine; car le Fils de Dieu est sa propre divinité (2), mais il n'est pas son humanité. Il est donc nécessaire, pour que la personne divine prenne la nature humaine, que la nature divine s'unisse d'une union personnelle à toute la nature qu'elle prend, c'està-dire à toutes ses parties. Mais si une personne divine prenoit deux natures, ces deux natures seroient avec elles dans un rapport uniforme, et elles ne se prendroient pas l'une l'autre. Il ne seroit donc nullement

(1) Il faut l'avouer néanmoins, si le dogme de l'Incarnation, tel qu'il nous est révélé, est un profond mystère, dans l'hypothèse envisagée par notre saint docteur, le mystère eût encore été plus inaccessible à notre foible raison. Cela ne veut pas dire qu'il n'ait atteint son but, qui étoit de prouver que cette hypothèse n'a rien qui répugne; mais il y a loin de là à montrer comment elle eût pu se réaliser. Dans tous les cas, nous croyons pouvoir dire que ni celle-là ni les deux précédentes n'eussent présenté les admirables convenances qu'il va luimême signaler dans l'Incarnation du Verbe.

(2) Dieu est sa propre essence ou sa propre nature, comme nous l'avons vu dans le traité de Dieu et comme cela nous a été plus d'une fois rappelé dans la suite. C'est là son privilége incommunicable; il n'est aucun autre être dont on puisse dire qu'il est sa propre nature.

divina assumeret duas naturas humanas, propter | ad ipsam divina natura, utpote quæ est unum unitatem suppositi, diceretur unus homo, habens duas naturas humanas. Contingit autem quòd plures homines dicuntur unus populus, propter hoc quòd conveniunt in aliquo uno, non autem propter unitatem suppositi. Et similiter, si duæ personæ divinæ assumerent unam numero humanam naturam, dicerentur unus homo, ut suprà dictum est (qu. 2, art. 6), non in unitate suppositi, sed in quantum convenirent in aliquo uno.

Ad tertium dicendum, quòd divina et humana natura non eodem ordine se habent ad unam personam divinam; sed per prius comparatur

cum ea ab æterno; sed natura humana comparatur ad personam divinam per posterius, utpote assumpta ex tempore à divina persona, non quidem ad hoc quòd natura sit ipsa persona, sed quòd persona Dei in humana natura subsistat; Filius enim Dei est sua deitas, sed non est sua humanitas (1). Et ideo ad hoc quòd natura humana assumatur à divina persona, requiritur quòd divina natura unione personali uniatur toti naturæ assumptæ, id est secundùm omnes partes ejus. Sed duarum naturarum assumpta. rum esset uniformis habitudo ad personam divinam, nec una assumeret aliam. Unde non

(1) Idem ex qu. 16, art. 5. et qu. 17, art. 1, a quivalenter colligitur.

nécessaire que l'une d'elles s'unit totalement à l'autre, c'est-à-dire que" toutes les parties de l'une fussent unies à toutes les parties de l'autre.

ARTICLE VIII.

Convenoit-il que la personne du Fils, plutôt qu'une autre personne divine, prit la nature humaine?

Il paroît qu'il ne convenoit pas que le Fils de Dieu s'incarnât, plutôt que le Père ou le Saint-Esprit. 1o Le mystère de l'incarnation a fait arriver les hommes à la vraie connoissance de Dieu, selon cette parole de l'Evangile, Joan., XVIII, 37: « Je suis né et je suis venu dans le monde pour rendre témoignage à la vérité. » Or par-là même que c'est la personne du Fils de Dieu qui s'est incarnée, beaucoup n'ont pu avoir de Dieu une connoissance vraie, parce qu'ils ont rapporté à la personne même du Fils de Dieu ce qu'on attribue au Fils, à raison de la nature humaine. Tel Arius, qui affirma l'inégalité des personnes, en s'appuyant sur ce texte, Joan., XIV, 28: « Le Père est plus grand que moi. » Or cette erreur ne se seroit pas produite, si la personne du Père se fût incarnée; car personne n'auroit pensé que le Père fút inférieur au Fils. Il paroît donc qu'il convenoit que ce fût la personne du Père qui s'incarnât, plutôt que celle du Fils.

2o L'incarnation paroît avoir pour effet de créer en quelque sorte de nouveau la nature humaine, conformément à cette parole, Galat., VI, 15: « En Jésus-Christ, la circoncision ne sert de rien, ni l'incirconcision, mais la création nouvelle. » Or la puissance de créer est l'attribut propre du Père. Il eût donc convenu que le Père s'incarnât, plutôt que le Fils.

3° La fin de l'incarnation est la rémission des péchés, selon cette

oporteret quòd una earum totaliter alteri unire- | dùm humanam naturam referentes ad ipsam tur, id est omnes partes unius omnibus partibus alterius.

ARTICULUS VIII.

Utrùm fuerit magis conveniens quòd persona Filii assumeret humanam naturam, quàm alia persona divina.

Ad octavum sic proceditur (1). Videtur quòd non fuerit magis conveniens Filium Dei incarnari, quàm Patrem vel Spiritum sanctum. Per mysterium enim Incarnationis homines ad veram Dei cognitionem sunt perducti, secundùm illud Joan., XVIII: « In hoc natus sum, et ad hoc veni in mundum, ut testimonium perhibeam veritati >> Sed ex hoc quòd persona Filii Dei est incarnata, multi impediti fuerunt à vera Dei cognitione, ea quæ dicuntur de Filio secun

(1) De his etiam infrà, qu. 36, art. 8, ad 3; Gent., lib. IV, cap. 39 et 42.

Filii personam; sicut Arius, qui posuit inæqualitatem personarum, propter hoc quod dicitur Joan., XIV: « Pater major me est. » Qui quidem error non provenisset, si persona Patris incarnata fuisset; nullus enim æstimasset Patrem Filio minorem. Magis ergo videtur fuisse conveniens quòd persona Patris incarnaretur quàm persona Filii.

2. Præterea, incarnationis effectus videtur esse recreatio quædam humanæ naturæ, secundùm illud Galat., ult.: «In Christo Jesu neque circumcisio aliquid valet, nec præputium, sed nova creatura. » Sed potentia creandi appropriatur Patri. Ergo magis decuisset Patrem incarnari quàm Filium.

3. Præterea, incarnatio ordinatur ad remissionem peccatorum, secundùm illud Matth.,I: et III, Sent., dist. 1, qu. 2, art. 2; et Contra

parole, Matth., I, 21: « Vous l'appellerez du nom de Jésus, parce que c'est lui qui sauvera son peuple de ses péchés. » Or on attribue au SaintEsprit la rémission des péchés, d'après ce passage de l'Evangile, Joan., XX, 22: « Recevez le Saint-Esprit; les péchés seront remis à ceux à qui vous les remettrez. » Il convenoit donc mieux à la personne du SaintEsprit qu'à celle du Fils de s'incarner.

Mais saint Jean Damascène dit, au contraire, Orthod. fid., III, 1 : « La sagesse et la puissance de Dieu se sont manifestées dans le mystère de l'incarnation: sa sagesse, puisqu'il a trouvé le moyen le plus convenable de payer la dette la plus difficile à acquitter; sa puissance, puisqu'il a rendu victorieux à son tour celui qui avoit été vaincu. » Or la puissance et la sagesse sont les attributs propres du Fils, selon ce que dit l'Apôtre, I Cor., I, 14: « Le Christ, qui est la puissance et la sagesse de Dieu. » Il convenoit donc que la personne du Fils s'incarnât.

(CONCLUSION. Puisque la ressemblance avec la nature humaine est au plus haut degré dans le Verbe de Dieu, il.étoit très-convenable que, parmi les personnes divines, ce fût le Verbe qui prit la nature humaine.)

Il étoit très-convenable que la personne du Fils s'incarnât: 1° En ce qui concerne l'union. Il convient, en effet, que les choses semblables s'unissent. Or nous apercevons un rapport de convenance entre la personne du Fils, qui est le Verbe de Dieu, et toutes les créatures en général. Il consiste d'abord en ce que le verbe de l'artisan, ou son concept, est la ressemblance exemplaire ou typique des choses qu'il exécute. D'où il suit que le Verbe de Dieu, qui est son concept éternel, est la ressemblance des types de toutes les créatures. Par conséquent, de même que la participation à cette ressemblance constitue les créatures dans leurs espèces propres, mais sans les garantir du changement, ainsi il

(CONCLUSIO.Cùm Verbi Dei ad humanam naturain maxima sit similitudo, convenientissimum fuit ex divinis personis ipsum Verbum humanam assumere naturam.)

« Vocabis nomen ejus Jesum; ipse enim salvum faciet populum suum à peccatis eorum (1). » Re- | missio autem peccatorum attribuitur Spiritui sancto, secundùm illud Joan. XX: «Accipite Spiritum sanctum. Quorum remiseritis peccata, re- Respondeo dicendum, quòd convenientissimitreis.» Ergo magis congruebat personam mum fuit personam Filii incarnari: primò quiSpiritus sancti incarnari, quàm personam Filii. dem, ex parte unionis; convenienter enim ca Sed contra est, quod Damascenus dicit in quæ sunt similia, uniuntur. Ipsius autem perIII. lib. (cap. 3): « In mysterio Incarnationis sonæ Filii, qui est Verbum Dei, attenditur uno manifestata est sapientia et virtus Dei: sapientia quidem modo communis convenientia ad totam quidem, quia invenit difficillimi solutionem creaturam; quia verbum artificis (id est conpretii quàm decentissimam; virtus autem, quia ceptus ejus), est similitudo exemplaris eorum victum fecit rursus victorem. » Sed virtus et quæ ab artifice fiunt. Unde Verbum Dei, quod sapientia appropriantur Filio, secundùm illud est æternus conceptus ejus, est similitudo exe:aI. Cor., I: «Christum Dei virtutem et Dei sa-plaris totius creaturæ. Et ideo, sicut per palipientiam.» Ergo conveniens fuit personam Filii incarnari.

cipationem hujus similitudinis creaturæ sunt in propriis speciebus institutæ, sed mobiliter, ita

(1) Alludendo ad hebraicum significatum nominis Jesu, quod Salvatorem significat, ut et medicum græcè.

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