DIX-SEPTIÈME DISCOURS. De l'observance des statuts et des ordonnances du diocèse. 1739. SANS doute, mes Frères, les ordonnances des premiers pasteurs dans le gouvernement de leurs diocèses, ne font que vous rappeler les anciens canons. Ce ne sont pas des lois nouvelles que nous vous imposons; ce ne sont que les anciennes règles de discipline consacrées de siècle en siècle par la décision de tant de conciles; et loin d'y ajouter de nouvelles rigueurs, nous sommes forcés d'en adoucir la sévérité, pour nous accommoder au relâchement des mœurs publiques du clergé : de sorte que nos ordonnances se proposent plutôt de maintenir dans le saint ministère cette décence et cette régularité extérieure qui prévient le scandale et le désordre, que d'y rétablir cette rigidité de discipline, qui a annoncé pendant si long-temps le zèle et la ferveur : c'est ce qui m'engage à ajouter encore quelques réflexions aux remontrances édifiantes que vient de nous faire M. le Promoteur, au sujet de l'oubli et du nonusage où la plupart de nos ordonnances et de celles de nos prédécesseurs, tombent insensiblement dans ce diocèse. Il se peut faire que la rareté des exemplaires de ces ordonnances, et la difficulté qu'ont les nouveaux curés d'en recouvrer, ait donné lieu à cet inconvénient; car nous cherchons plus à vous excuser, qu'à vous reprendre : mais enfin, afin que linobservance n'ait plus d'excuse, nous allons les rassembler toutes, et les faire réimprimer dans un recueil; et nous espérons que ce nouveau secours renouvellera et l'observance et l'amour des règles saintes de l'Eglise, parmi ses ministres. En effet, mes Frères, quel prétexte pourroitil rester encore après cela à ceux qui croiroient pouvoir se dispenser de se conformer à la discipline prescrite par ces lois sacrées? Les regarderoient-ils comme de ces lois arbitraires et indifférentes, que chacun peut observer ou négliger à son gré? l'illusion seroit trop grossière. Car, mes Frères, l'Eglise, ce royaume spirituel dont JésusChrist est le chef et le roi éternel, n'auroit done établi son gouvernement que sur des lois vaines et inutiles, incapables d'y maintenir l'ordre, la sûreté, la décence, que les lois humaines maintiennent depuis si long-temps dans les sociétés civiles? Quoi! mes Frères, l'Eglise n'auroit donc assemblé de siècle en siècle tant de conciles vénérables, et formé tant de canons de discipline sur les mœurs des clercs, que pour nous prescrire des règles frivoles, et qui laissent à chacun de ses ministres la liberté de les mépriser? ces canons si vénérables, ces monumens si précieux du zèle des âges les plus florissans du christianisme, que chaque siècle a toujours respectés, que l'Eglise conserve comme son dépôt le plus cher et le plus sacré, et qui font toute la sûreté et toute la gloire de son gouvernement, ne renfermeroient donc que des décisions puériles, que des règles inutiles, peu dignes de la gravité de ces saintes assemblées qui nous les ont laissées; de l'Esprit de Dieu qui y présidoit; du zèle et de la science de tant de grands évêques qui y assistoient, dont les noms et les ouvrages font encore aujourd'hui le canal le plus sûr et le plus respectable de la tradition? Eh! qu'y a-t-il sur la terre d'inviolable et de sacré, si ces lois saintes ne le sont pas? et les peines mêmes, et les censures dont elles menacent les transgresseurs, peuvent-elles les laisser au rang des choses arbitraires et indifférentes? Aussi, mes Frères, tandis que ces règles saintes ont été religieusement observées; le monde luimeme, tout monde qu'il est, a respecté l'ordre, la paix, la piété, l'unanimité qui régnoit dans le saint ministère : l'Eglise, comme une armée redoutable par sa sainteté, et toujonrs rangée dans un bel ordre, n'offroit rien au dedans que d'édifiant à ses enfans, et au dehors que de respectable aux étrangers, et de terrible à ses ennemis: Terribilis ut castrorum acies ordinata. (Cant. 6. 3.) Mais dès que ces règles si saintes, toujours vivantes dans les saints canons, et toujours rappelées sous nos yeux par les statuts et les ordonnances des évêques, ont été négligées, ou par l'infidélité des ministres du second ordre, ou par le peu de soin des premiers pasteurs à les faire observer, toute la face de l'Eglise en a paru peu à peu défigurée; et enfin l'ignorance, l'indécence, le déréglement, avoient changé et infecté à un point le clergé dans les deux derniers siècles, que des esprits superbes en prirent occasion de se séparer du sein de l'Eglise, comme si les portes de l'enfer avoient prévalu contre elle, ou que Jésus-Christ eût promis la perpétuité de la piété à chacun de ses ministres, comme il a promis celle de la vérité au saint ministère. Ce n'est donc que l'observance unanime des saints canons, et des anciennes lois de l'Eglise, renouvelées par nos ordonnances, et par celles de nos prédécesseurs, qui puisse conserver au corps du clergé cette bonne odeur de Jésus-Christ, qu'il doit répandre dans ce grand diocèse. Mais l'usage, dites-vous, a prévalu; et la plupart de ces ordonnances ne sont plus observées. Et voilà précisément, mes Frères, ce qui fait aujourd'hui le sujet de notre douleur, de nos plaintes; et permettez-moi d'ajouter, ce qui devroit le faire aussi de votre confusion. Quoi! vous ne nous allégueriez pour vous justifier que la justice même des reproches que nous avons à vous faire? L'usage commun, dites-vous, ble en autoriser l'inobservance: mais des ministres de Jésus-Christ chargés d'instruire les peuples, peuvent-ils nous tenir pareil langage? Eh! que répondrez-vous donc à ces mêmes peuples, quand pour justifier les abus infinis du monde contre lesquels vous vous élevez si fort dans la chaire, ils vous diront que l'exemple commun les autorise; que l'usage a prévalu; et que les maximes de l'Evangile et les ordonnances de Jésus-Christ opposées à ces abus, ne sont presque plus nulle part observées? vous leur répondrez sans doute, que l'usage ne sauroit jamais prescrire contre la loi ; que Jésus-Christ ne nous a pas laissé les usages, mais l'Evangile, pour notre règle; et que malgré la corruption générale, il reste encore des gens de bien répandus partout, qui ont appris de Jésus-Christ, que la voie que suit le grand nombre est toujours cette voie spacieuse de perdition qui conduit à la mort, pour qui l'exemple commun devient une raison même de ne pas s'y conformer, et qui regardent comme des crimes les choses autorisées par la multitude. Et voilà, mes Frères, ce que vous devez vous répondre à vous-mêmes ; que l'abus, quelque commun qu'il soit, n'autorise jamais la transgression de la règle; et que malgré l'exemple de ceux de vos confrères qui ne se font aucun scrupule de ne pas se conformer aux statuts du diocèse et aux lois de l'Eglise, Dieu conserve à ce diocèse, et vous y connoissez vous-mêmes, des ministres fidèles qui sont notre gloire et notre consolation, et qui regardent comme une apostasie le mépris des règles saintes que l'autorité de l'Eglise a de tout temps imposées au sacerdoce. מגו sem |