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plus dur et plus insensible, à mesure que les cris des malheureux augmentent; et il redouble de barbarie envers ceux qui ont osé même nous en porter leurs plaintes. Qu'il voie son peuple frappé de mortalité, ne croyez pas qu'il soit occupé si leur mort sera précieuse devant Dieu; le profit infame qui lui en revient est l'unique objet qui l'occupe, le seul qui le console de leur perte; j'ai horreur de le dire, le seul peut-être qui fait le sujet de sa barbare joie: disposé à laisser le corps précieux d'un fidèle, d'un membre de Jésus-Christ, en proie aux oiseaux du ciel, et aux animaux de la terre, si une famille indigente ne capitule avec son avarice, et n'assure d'avance par un prix excessif à ce pauvre défunt la consolation de se voir réuni par la sépulture à ses frères auxquels la foi l'avoit uni sur la terre.

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Quel monstre encore une fois qu'un tel pasteur! et plût à Dieu qu'ils fussent aussi rares dans l'Eglise et dans ce diocèse, que les êtres monstrueux le sont sur la terre! Mais ce n'est pas assez encore de faire de leurs fonctions, et du sang adorable de Jésus-Christ, un profit infàme; ce n'est pas assez de rendre par leurs exactions, la religion onéreuse, accablante, odieuse à leur pauvre peuple; ils lui suscitent des procès injustes; ils achètent même des droits litigieux; ils se prévalent de leur honteuse abondance, pour usurper et se faire adjuger des biens qu'un pauvre possesseur n'a pas le de défendre sous prémoyen texte d'avancer quelques secours à ceux qui s'a

dressent à eux, ils le leur font acheter à des conditions usuraires et tyranniques; ils n'offrent que des secours barbares et meurtriers; et en soulageant les opprimés, ils ne veulent que se hater de les écraser, et achever de les mettre au désespoir. Je me lasse, mes Frères, d'exposer ici ces horreurs devant tant de ministres fidèles : mais ce qu'il y a de plus triste, c'est que je ne fais que reprocher un spectacle d'infamie, dont vos yeux ont été plus d'une fois témoins; que votre piété et votre zèle pour le ministère, ont encore plus souvent détesté : je ne fais que rappeler des plaintes qui nous sont mille fois revenues, et qui ont autant de fois déchiré nos entrailles, et aggravé le joug de notre épiscopat.

A la dureté ajoutez, mes Frères, l'avilissement et l'opprobre où cette passion dégrade et le ministère et le ministre; les soins bas, indécens et publics qui l'occupent: suivez toute sa conduite, c'est un vil négociateur, il entre dans les trafics et les commerces les plus bas; tout ce qui lui offre quelque gain ne lui paroît indigne, ni de ses empressemens, ni de la sainte décence de son ministère; il paroît plus souvent dans les marchés publics, que dans son Eglise et dans les fonctions de sa paroisse. Plus instruit des moyens sordides d'amasser, et des règles obscures d'un vil commerce, que des règles de l'Eglise, il oublie qu'il est père, qu'il est pasteur, qu'il est honoré du titre sublime de ministre de Jésus-Christ. Le seul titre qui le touche, et dont il fait usage,

est celui de vil commerçant : ne lui parlez pas du gain et du salut des ames, dont il doit répondre; c'est un langage inconnu qu'il n'entend pas, et tout ce qui ne grossit pas son infàme trésor, est pour lui une vaine spéculation et une chimère. Il avilit la dignité de son caractère par des mœurs basses et sordides; et il devient par sa vile épargne, et par la crasse même de ses vêtemens, et l'indécence de tout son extérieur, un spectacle de dérision pour son peuple, et de honte pour ses confrères; c'est un pauvre du monde et de l'enfer. Hélas! mes Frères, nous excusons souvent sur la modicité de nos revenus notre peu de charité pour nos pauvres; nous craignons toujours de manquer pour nous-mêmes: retranchons pour Jésus-Christ une partie seulement de ce que ce malheureux se retranche pour le démon; et nous trouverons nos revenus abondans. Il se refuse tous ses besoins; il se dispute même jusqu'à la simple décence des vêtemens : sacrifions à la charité une partie du moins des aises et des commodités, que cet infortuné sacrifie toutes à son avarice; mettons en réserve, et épargnons pour le ciel, quelque chose du moins de ce qu'il réserve tout entier pour la terre ; et nous trouverons de quoi fournir à nos besoins et à ceux de nos pauvres. Est-ce que la noblesse de la charité ne seroit pas capable de soutenir les mêmes retranchemens et les mêmes privations, que soutient tous les jours l'infamie d'un vice? un pasteur avare auroit le courage de se refuser

tout pour grossir un trésor de boue ; et un pasteur charitable et fidèle n'auroit pas la force de se refuser du moins quelque chose pour soulager son peuple, et amasser un trésor dans le ciel? le démon auroit ses pauvres ; et Jésus-Christ ne seroit pas assez puissant pour avoir les siens? et seroit-il possible que l'épargne basse et sordide d'un prêtre avare, après nous avoir fait rougir pour lui devant les hommes, nous couvrît encore de confusion, et s'élevât en témoignage contre nous devant Jésus-Christ?

Mais ce qu'il y a ici de plus déplorable pour ce vice dans un prêtre; c'est que l'age et les réflexions guérissent d'ordinaire les autres passions, au lieu que celle-ci semble se rauimer, et reprendre de nouvelles forces dans la vieillesse. Plus on avance vers ce moment fatal où tout cet amas sordide doit disparoître et nous être enlevé, plus on s'y attache: loin de se dire alors, du moins à soi-même: Insensé, on va demain te redemander ton ame; et tout ce que tu amasses avec tant de peine, de quoi te servira-t-il? (Luc. 12. 20.) plus la mort approche, plus on couvre des yeux son misérable trésor; plus on le regarde comme une précaution nécessaire pour un avenir chimérique. Ainsi l'âge rajeunit, pour ainsi dire, cette indigne passion: les années, les maladies, les réflexions, tout l'enfonce plus profondément dans l'ame; et elle se nourrit et s'enflamme par les remèdes mêmes qui guérissent et éteignent toutes les autres. On a vu des pas

teurs dans une décrépitude où à peine leur restoit-il assez de force pour soutenir un cadavre tout prêt à retomber en pourriture, ne conserver dans la défaillance totale des facultés de leur ame le reste de sensibilité, et pour ainsi dire, de signe de vie, que pour cette indigne passion; elle seule se soutenir, se ranimer sur les débris de tout le reste ; le dernier soupir être encore pour elle; les inquiétudes des derniers momens la regarder encore: et par une punition terrible de Dieu, l'infortuné qui meurt jette encore des regards mourans qui vont s'éteindre sur un argent que la mort lui arrache, mais dont elle n'a pu arracher l'amour de son cœur.

Vous

Allez paroître devant Dieu, pasteur barbare et mercenaire quelle miséricorde pourrez-vous yous promettre dans ce moment, du souverain pasteur de nos ames ? Réclamerez-vous son amour et sa tendresse pour les hommes qui n'avez jamais eu que des entrailles de fer pour vos enfans et pour vos frères; vous un loup enfermé dans le bercail, et un fléau de la colère de Dieu sur son peuple? Vos cris et vos gémissemens, si vous en poussez au lit de la mort, toucheront-ils un juge irrité, vous qu'il a vu jusqu'à la fin, d'une dureté barbare à la misère et à tous les gémissemens d'un peuple dont il vous avoit établi le père et le consolateur? oserezvous lever vers son tribunal terrible vos mains défaillantes, ces mains qu'il verra encore toutes Louillées de vos rapines, du sang de son peuple,

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