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exige de vous. Mais, mes Frères, quelle que puisse être la modicité de vos revenus, et le malheur des temps, il est toujours vrai qu'au milieu de vos paroisses, vous vous trouvez encore plus à votre aise, et plus en état de fournir à vos besoins, que presque tous ces laboureurs, et ces pauvres gens de campagne qui les habitent. Aussi avons-nous eu la consolation dans nos visites, d'y trouver beaucoup de pasteurs charitables, touchés comme des pères doivent l'être, de la misère de leurs enfans; donnant selon leurs forces et au delà, comme dit l'Apôtre; adoucissant du moins par leurs soins et par leur sensibilité, les maux de leurs pauvres paroissiens, et souffrant avec ceux qu'ils ne pouvoient soulager: mais d'un autre côté, nous avons souvent gémi à la vue de beaucoup de pasteurs, uniquement occupés du soin honteux d'amasser; durs pour eux-mêmes, et encore plus durs et plus insensibles aux besoins et aux calamités de leurs peuples; des pasteurs bassement avares, qui ne croient jamais en avoir assez, et qui semblent n'avoir été revêtus d'un caractère saint que pour le faire servir à leur honteuse avarice. Voilà, mės Frères, il faut le dire ici, la plaie la plus universelle du sacerdoce: voilà le vice qui souille presque toute la sainteté, et la bonne odeur du sanctuaire tous ne le portent pas à un certain excès; mais il en est peu que cette lèpre ne salisse; et si les pauvres sont abandonnés dans plusieurs paroisses, ce n'est pas toujours la modicité des ré

venus de leurs pasteurs, c'est le plus souvent la dureté et l'avarice qui ferment leurs entrailles aux cris et aux besoins de leurs peuples.

Oui, mes Frères, disons-le ici, et disons-le avec douleur, puisque l'occasion s'en présente: depuis que par le partage des biens ecclésiastiques, nos titres dans le ministère sont devenus fixes et perpétuels pour nous; nous les avons regardés comme notre bien et notre patrimoine : nous nous y sommes attachés; nous les avons fait valoir comme on fait profiter un fouds profane; et souvent plus notre portion temporelle s'est trouvée modique, plus notre cœur s'y est attaché; et plus sans partager avec les riches du monde le crime de leur luxe et de leur mollesse, nous avons partagé avec eux, et poussé même plus loin qu'eux, le crime de leur attachement et de leur avarice. Il semble même que ce vice est devenu une malédiction attachée au sacerdoce; on se le dissimule à soi-même; ou le couvre du prétexte frivole d'une sage précaution; on ne voit dans cette sordide passion, que le devoir indispensable de ne pas laisser perdre les droits de son Eglise; et plus on est saisi et possédé de ce vice, plus on se le donne à soi-même comme

une vertu.

Cependant, mes Frères, rien ne souille et n'avilit plus la noblesse et la sainteté de notre ministère, que cet indigne penchant. Nous ne sommes sur la terre, vous le savez, que les ministres des biens futurs: les trésors qu'ouvrent et

tout ce

ferment les clefs qui nous sont confiées, sont les trésors du ciel; les richesses que Dieu verse sur les peuples par notre ministère, sont les richesses de la grace : l'Evangile que nous annonçons, est cette parole de la vie éternelle qui maudit les richesses, et qui n'appelle heureux et riches, que les pauvres de cœur et d'esprit ; en un mot, que nous sommes comme ministres, c'est-à-dire, comme dispensateurs des biens éternels, n'annonce aux peuples que le mépris de tout ce qui passe, et le desir tout seul des biens qui ne doivent jamais passer. Quelle indignité donc, mes Frères, lorsque le dispensateur des biens éternels devient lui-même l'esclave d'un tas de boue qui le salit et le couvre d'opprobre! lorsque le ministre établi de la part de Jésus-Christ pour détromper les hommes de l'amour des faux biens, leur en inspirer le mépris, les maudire avec Jésus-Christ, ne paroît vivre, et n'avoir de desirs, de soins et de penchans, que pour se les accumuler à lui-même!

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Mais ne faut-il pas distinguer, dira-t-on, une sage prévoyance qui met en réserve pour des besoins qui peuvent arrivers de cette avarice basse et sordide, qui croit n'en avoir jamais assez; et toute précaution là-dessus seroit-elle un crime? Non, sans doute, mes Frères; et si ce misérable prétexte de l'avarice méritoit une réponse, nous vous dirions qu'un pasteur avare, qui ne vit que pour amasser, et un pasteur fidèle et prudent, qui se ménage quelque réserve pour

des cas imprévus, ne se ressemblent guère. L'un est tranquille dans sa prévoyance; elle ne prend rien sur ses fonctions, sur ses devoirs, sur l'amour et les soins qu'il doit à son peuple, sur la décence de son caractère; et il y entre plus de confiance en Dieu que dans le peu qu'il se réserve. L'autre n'amasse que pour amasser: ce n'est pas pour fournir à ses besoins; il se les refuse: son argent lui est plus précieux que sa santé, , que sa vie, que son salut, que lui-même: toutes ses actions, toutes ses vues, toutes ses affections, ne se rapportent qu'à cet indigne objet. Personne ne s'y trompe; et il ne prend aucun soin de dérober aux yeux du public le misérable penchant dont il est possédé ; car tel est le caractère de cette honteuse passion dans un prêtre, de se manifester de tous les côtés, de ne faire au dehors aucune démarche qui ne soit marquée de ce maudit caractère, et de n'être un mystère que pour celui seul qui en est possédé. Toutes les autres passions sauvent du moins les apparences; on les cache aux yeux du public : une imprudence, un abandon de Dieu peut quelquefois les dévoiler; mais le coupable cherche, autant qu'il est en soi, les ténèbres : mais pour la passion de l'avarice, un prêtre ne se la cache qu'à lui-même : loin de prendre des précautions pour la dérober aux yeux du public, tout l'annonce en lui, tout la montre à découvert; il la porte écrite dans son langage, dans ses actions, dans toute sa conduite, et pour ainsi dire, sur son front.

Or,

Or, mes Frères, quel caractère de réprobation pour un prêtre et pour un pasteur, que l'indignité de ce vice! caractère de dureté, d'avilissement pour lui, d'opprobre et de scandale pour le saint ministère. Caractère de dureté : il est père, il est pasteur, il est à la place du souverain pasteur, qui a donné sa vie pour ses brebis, et qui continue après sa mort, à les nourrir de sa chair et de son sang; il est ici-bas le vicaire de son amour pour les hommes or quel monstre d'horreur sera-t-il dans l'Eglise, si se dépouillaut de ces titres si glorieux et si aimables, de ces titres aussi ineffaçables que son caractère, il n'a que des entrailles de fer pour son peuple? voilà pourtant la situation réelle et affreuse d'un pasteur avare. Comment soulageroit-il les besoins de ses pauvres? Il se refuse ses propres besoins à luimême; il n'aime et n'estime de ses fonctions, que le gain malheureux qui lui en revient; il l'exige avec dureté : le pauvre n'est pas plus à couvert de ses barbares exactions que le riche: il passe sans pudeur les bornes que des règles sages ont prescrites à son avarice; il foule aux pieds ces barrières sacrées, si honteuses au saint ministère, et qu'une triste nécessité, c'est-à-dire l'avidité seule de certains ministres nous a forcés de poser; il ne connoît de frein et de règles que celles de son insatiable avarice. Les plaintes et les murmures d'un pauvre peuple vexé et opprimé par l'excè et la dureté de ses exactions, l'endurcissent, loin de le toucher et de l'attendrir: son coeur devient Tome IX. CONFER. II.

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