Obrazy na stronie
PDF
ePub

contemplons en respect et en silence ce Verbe divin à l'autel, avant qu'il nous enseigne dans cette chaire. Que nos cœurs seront bien ouverts à la doctrine céleste par cette sainte préparation! Pratiquez-la, chrétiens; ainsi notre Seigneur JésusChrist puisse être votre docteur; ainsi les eaux sacrées de son Evangile puissent tellement arroser vos ames, qu'elles y deviennent une fontaine qui rejaillisse à la vie éternelle, que je vous souhaite, au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit! Amen.

SERMON

POUR LE MARDI

DE LA II. SEMAINE DE CARÊME,

PRÊCHÉ DEVANT LE ROI.

SUR L'HONNEUR.

Puérilité de l'honneur qu'on recherche dans les choses vaines. Véritable grandeur de la créature raisonnable. D'où vient que les hommes courent après tant de faux honneurs : combien ils sont peu propres à les élever solidement. Etendue prodigieuse des vanités; leurs funestes effets. Maximes pernicienses dont le faux honneur se sert pour autoriser le crime. Mépris des louanges naturel à la vertu chrétienne : efforts de la vaine gloire pour la corrompre. Criminel attentat de celui qui s'attribue les dons de Dieu.

Omnia opera sua faciunt ut videantur ab hominibus.

Ils font toutes leurs œuvres dans le dessein d'étre vus des hommes. Matt. xxIII. 5.

JE

E me suis souvent étonné comment les hommes, qui présument tant de la bonté de leurs jugemens, se rendent si fort dépendans de l'opinion des autres, qu'ils s'y laissent souvent emporter contre leurs propres pensées. Nous sommes tellement jaloux de

l'avantage de bien juger, que nous ne le voulons céder à personne; et cependant, chrétiens, nous donnons tant à l'opinion, et nous avons tant d'égards à ce que pensent les autres, qu'il semble quelquefois que nous ayons honte de suivre notre jugement auquel nous avons néanmoins tant de confiance. C'est la tyrannie de l'honneur qui nous cause cette servitude. L'honneur nous fait les captifs de ceux dont nous voulons être honorés. C'est pourquoi nous sommes contraints de céder beaucoup de choses à leurs opinions; et souvent de grands politiques et des capitaines expérimentés, touchés de ce faux honneur, et du désir d'éviter un blâme qu'ils n'avoient point mérité, ont ruiné malheureusement, par les sentimens d'autrui, des affaires qu'ils auroient sauvées en suivant les leurs. Que s'il est si dangereux de se laisser trop emporter aux considérations de l'honneur, même dans les affaires du monde auxquelles il a tant de part, quel obstacle ne mettra-t-il pas aux affaires du salut? et combien est-il nécessaire que nous sachions prendre ici de véritables mesures! C'est pour cela, chrétiens, que méditant l'évangile où Jésus-Christ nous représente les pharisiens comme de misérables captifs de l'honneur du monde, j'ai pris la résolution de le combattre aujourd'hui; et pour cela j'appelle à mon aide la plus humble des créatures en lui disant avec l'ange: Ave, Maria.

L'HONNEUR fait tous les jours et tant de bien et tant de mal dans le monde, qu'il est assez malaisé de définir quelle estime on en doit faire, et quel

usage on doit lui laisser dans la vie humaine. S'il nous excite à la vertu, il nous oblige aussi trop souvent à donner plus qu'il ne faut à l'opinion; et quand je considère attentivement les divers événemens des choses humaines, il me paroît, chrétiens, que la crainte d'être blâmé n'étouffe guère moins de bons sentimens, qu'elle n'en réprime de mauvais. Plus j'enfonce dans cette matière, moins j'y trouve de fondement assuré; et je découvre au contraire tant de bien et tant de mal, et pour dire tout en un mot, tant de bizarres inégalités dans les opinions établies sur le sujet de l'honneur, que je ne sais plus à quoi m'arrêter.

En effet, entrant au détail de ce sujet important, j'ai remarqué, chrétiens, que nous mettons de l'honneur dans des choses vaines, que nous en mettons souvent dans des choses qui sont mauvaises, et que nous en mettons aussi dans des choses bonnes. Nous mettons beaucoup d'honneur dans des choses vaines, dans la pompe, dans la parure, dans cet appareil extérieur. Nous en mettons dans des choses mauvaises; il y a des vices que nous honorons; il y a de fausses vaillances qui ont leur couronne, et de fausses libéralités que le monde ne laisse pas d'admirer. Enfin nous mettons de l'honneur dans des choses bonnes; autrement la vertu ne seroit pas honorée ; par exemple dans la vertu, dans la force et dans l'adresse d'esprit et de corps. Voilà, Messieurs, l'honneur attaché à toute sorte de choses. Qui ne seroit surpris de cette bizarrerie? Mais si nous savons entendre le naturel de l'esprit humain, nous demeurerons convaincus qu'il ne pouvoit pas en arriver

d'une autre sorte. Car comme l'honneur est un jugement que les hommes portent sur le prix et sur la valeur de certaines choses, parce que notre jugement est foible, il ne faut pas trouver étrange s'il est ébloui par des choses vaines; parce que notre jugement est dépravé, il étoit absolument impossible qu'il ne s'égarât jusqu'à en approuver beaucoup de mauvaises; et parce qu'il n'est ni tout-à-fait foible, ni tout-à-fait dépravé, il falloit bien nécessairement qu'il en estimât beaucoup de très-bonnes. Toutefois encore y a-t-il ce vice dans l'estime que nous avons pour les bonnes choses, que cette même dépravation et cette même foiblesse de notre jugement fait que nous ne craignons pas de nous en attribuer tout l'honneur, au lieu de le donner tout entier à Dieu, qui est l'auteur de tout bien. Ainsi, pour rendre à l'honneur son usage véritable, nous devons apprendre, Messieurs, à chercher dans les choses que nous estimons: premièrement du prix et de la valeur ; et par-là les choses vaines seront décriées: secondement la conformité avec la raison; et par-là les vices perdront leur crédit : troisièmement l'ordre nécessaire; et par-là les biens véritables seront tellement honorés, que la gloire en sera toute rapportée à Dieu, qui en est le premier principe. C'est le partage de ce discours, et le sujet de vos attentions.

PREMIER POINT.

L'APÔTRE nous avertit, que nous devons être enfans en malice (1); mais il ajoute, Messieurs, que nous ne devons pas l'être dans les sentimens ; c'est(1) I. Cor. xiv. 20.

« PoprzedniaDalej »