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Le procédé se retrouve, au reste, en Beethoven, avec un caractère expressif très différent. C'est le passage canonique qui précède la dernière reprise, en l'Allegro de la 8ème Symphonie.

9:

PP

9:

Le sextuple la du thème initial est repris, curieusement, à part, coupé du reste du motif, et, durant cinquante mesures, ce tronçon devient comme le jouet de vingt tonalités, qui se le passent de main en main, pour le jeter enfin en ré, puis en fa, où il reprend corps et nous restitue le thème intégral.

Après la répétition monosyllabique ou d'une note, je cite la répétition polysyllabique, ou d'un groupe de notes plus ou moins étendu. Soit le dessin si svelte et si léger par lequel Mozart ouvre la Symphonie en sol mineur.

Ici, deux réduplications combinées: celle du trait, et celle, dans chaque trait, d'un de ses éléments syllabiques.

Le presto de la 5ème Sonate pour piano (op. 10 de Beethoven)

débute par un trait également triplé, mais plus complexe, et qui n'est intégralement répété que dans son premier membre, le second montant chaque fois d'une tierce.

etc.

9:

Dans un autre cas, emprunté à la Sonate qui précède (en mi bémol), cette sorte de << triplet » mélodique se trouve heureusement varié par trois accords de soutien ascendants.

9:2

etc.

(Voir

Le même effet se retrouve en l'« Allegretto scherzando >> ci-dessus), avec un rythme, seulement, plus vif et plus varié. Remarquez ce contraste, encore, d'un chant horizontal avec la basse ascendante oblique.

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A vrai dire, on ne trouve rien, dans le style littéraire proprement dit, qui réponde à ces idiotismes musicaux, à ces musicalismes. Mais on peut citer, comme intermédiaire aux deux langues, l'émotive et la rationnelle, - beaucoup de refrains populaires. A la fois réduplicatifs et rythmés, ils achèvent, curieusement, l'idée contenue dans la strophe, par un jeu libre de syllabes, arrangées pour le seul effet sonore, pour l'euphonie. Par exemple:

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Ceux des rondes d'enfant, ou formules de jeu, ne sont pas non plus à dédaigner comme documents: on y saisit le langage en train d'échapper à l'idée pour en venir à l'expression purement phonétique, extérieure (1). Soit, parmi les plus répandues en France:

ou bien:

Une poule sur un mur

Qui picotait du pain dur.

Picoti, picota..... etc.

Pomm' de reinette et pomm' d'api,
Tapis, tapis rouge.....

ou encore, cette formule de jeu gasconne:

Mini, Trimini, Claou, Sancète, Pourrète, Chira, Chiraou, Trei, Mel, Gatous, .....Tot esclatz!.....

extrêmement intéressante à étudier, avec son mélange de rimes, d'assonances, d'allitérations, ses cadences alternativement masculines et féminines, son contraste rythmé de consonnes douces et fortes, gutturales et dentales, enfin sa finale explosive.....

L'intérêt phonétique de cette amusette vocale, à dessein vide de toute idée, peut éclairer, déjà, la symphonie dans sa charpente. Il n'est pas, on sait, pour la Science, de petit fait..... On se demande parfois, laborieusement, comment s'engendra le genre symphonique. Ecoutez l'artisan qui, son couplet fini, le répète une fois sans paroles, en sifflant, ou vocalisant. Voilà les très humbles débuts de la fameuse ritournelle; « ritournelle » est fille de « refrain »; c'est un refrain d'orchestre.

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(1) On pourrait aussi bien dire « intérieure, car ces petites orchestrations > de syllabes transcrivent, en somme, ce résidu mental que les mots n'ont su exprimer. Rapprochez de cela le juron, l'onomatopée concluante, et jusqu'au geste qui achève souvent si bien la pensée, qui dit le fond de la pensée ».

Mais, en ces divers exemples, le parallélisme du tour musical avec le littéraire reste encore indéterminé, par la raison que les syllabes, n'étant pas ici réparties sur des mots, qui les groupent rigoureusement suivant un sens logique, nul ne peut dire où commence telle partie du discours, et où elle se termine. Il n'y a, dans chaque membre de phrase mélodique, entre deux « ponctuations », que des limites rythmiques, phonétiques, et point de limites logiques.

Il n'en est plus de même si l'on embrasse le cycle de deux membres de phrase. Identiques l'un a l'autre, ils se peuvent, alors, comparer à la répétition d'une même formule littéraire. Dans la grande majorité des phrases mélodiques classiques, le début du conséquent est une pure redite du début de l'antécédent. Et pour qui serait tenté d'y voir une pauvreté, je rappelle le thème exquis du rondo qui conclut la 27ème Sonate (en mi mineur).

Antécédent

Cadence suspensive

P

Conséquent

Cadence résolutive

On peut prendre ceci pour type d'un chant à la fois parfait de forme et profondément expressif par le fond. La carrure de la phrase ne nuit pas plus ici au don de grâce charmeresse, que l'impeccable symétrie des yeux, des sourcils, de tous les traits, dans la Beatrix Cenci, du Guide, ou la quadrature exacte des murs en ce délicieux édicule qu'on appelle la Maison Carrée à Nîmes.

etc

La Musique prise comme langage, on se demande quelle est la signification logique, et la valeur de cette structure symétrique, et si elle a son correspondant dans la Littérature. Il faut s'aviser, en effet, que ce genre de coupe nous paraît aussi naturel, et raisonnable qu'il le fut au compositeur; d'où la certitude qu'il se cache là, sous l'apparente fantaisie, la nécessité d'une loi psychique.

Deux vers de Malherbe, qui me tombent sous la main, jettent déjà quelque lumière.

C'est Dieu qui nous fait vivre,

C'est Dieu qu'il faut aimer.

Nul ne jugera cette répétition oiseuse, assurément: elle donne à la fois de la vigueur, et de la franchise à l'idée. C'est une superfétation, mais admirable; Racine, entre autres génies, en est plein.

Faut-il que mes soupirs vous demandent sa vie?
Faut-il qu'en sa faveur j'embrasse vos genoux?
Andromaque.

Et plus loin:

Dois-je les oublier, s'il ne s'en souvient plus?
Dois-je oublier Hector, privé de funérailles?

Dois-je oublier.....

Et les fameuses imprécations de Camille dans les Horaces de Corneille; et l'énumération de Petit-Jean dans les Plaideurs (« Quand je vois ») toutes alliterations de vers que les rhétoriciens ont réunies sous la dénomination d'anaphore.

La littérature primitive allait plus loin dans l'analyse. Voyez les psaumes, les litanies, toute la liturgie catholique: dans le Gloria, par exemple.

Qui tollis peccata mundi, miserere nobis,

Qui tollis peccata mundi, suscipe deprecationem nostram.

Mais revenons à notre premier exemple, aux deux vers de Malherbe :

C'est Dieu qui nous fait vivre,

C'est Dieu qu'il faut aimer.

Rivista musicale italiana, I.

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