Sainte Vierge, est-il rien au monde Ou plus humble, ou plus doux, ou plus charmant que toi? Est-il rien sous les cieux qui fasse mieux la loi Aux schismes dont la terre abonde? Non, il n'est rien si gracieux, L'énigme y fait trop voir qu'aucune créature N'approche de ta pureté. 595 600 Tu veux donc bien qu'Esther ait place en ton image, Ont tant d'humilité, tant d'amour en partage. Ta bonté, ta douceur ne trouvent point d'égales Et te quid est humilius Per cuncta mundi climata, Destruens cuncta schismata? Te nihil esse mundius. Designat Esther igitur Te, qua nunquam humilior Et propter hoc sublimior 605 Plus il t'élève haut dans l'empire des cieux. Mêmes vertus en elle ébauchoient ton mérite, Esther, tendre et sensible au mal qui le menace, 610 615 620 625 Lui peint d'elle et des siens le malheureux destin, Esse nulla te noscitur. In Judæos invidia Sævit Aman perversitas, Condolet Esther fratribus Ce lâche tout surpris demeure sans parler; 630 Sur la tête de leurs auteurs; Quoi qu'attente leur perfidie, 635 La grâce, qui te donne un Dieu pour ton époux, En un moment y remédie; Et pour rudes que soient leurs coups, Ose tout et peut tout pour nous, L'implacable ennemi de l'homme Sous l'orgueilleux Aman dépeint, C'est l'ange en qui jamais cet orgueil ne s'éteint, Damnatur Aman sceleris, Tu es Esther, perfidiam Vere notat inimicum Aman humani generis, 640 645 Banni dans les enfers, il y veut abîmer Ceux dont sa place au ciel doit être la conquête; Mais quoi qu'ose sa haine à toute heure, en tout lieu, Vierge, ton pied l'écrase; et lui brisant la tête, Tu fais d'un seul regard notre paix avec Dieu. Tu te plais à garder tes serviteurs fidèles Comme la prunelle des yeux; Ta main pour avant-goût des cieux Leur fait un nouveau siècle et des douceurs nouvelles. Sur eux tu laisses découler Mille et mille faveurs du monarque suprême : Tu puises comme épouse en ses divins trésors, Vive fleur du printemps, candeur que rien n'efface, Fontaine de secours, dont les saintes liqueurs Condemnatum in inferis, Quem tu calcas et conteris, Sicut pupillam oculi, Servos servas, servos regis; Tu arca tabernaculi. Flos vernalis, flos lilii, Flos florum, decus virginum 650 655 660 Conservent toute notre race, L'odeur de ton mérite ici-bas sans pareil Attire l'ange du conseil, Le souverain des rois, le seigneur des armées; Les portes si longtemps fermées S'ouvrent pour terminer notre bannissement. Noé flottoit encor sur les eaux du déluge, Que jusque dans cette arche en son bec elle apporte. Reprennent une joie aussi pleine, aussi forte, Que l'étoient jusque-là leur trouble et leur ennui. Diceris, et auxilii Fons plenus, custos hominum : Cujus attraxit Dominum, Et angelum consilii Dulcis odor, ut terminum Nobis daret exilii. XVI. Figurata Ramum ferens viventibus1 665 670 675 680 fuit per columbam Ore columba proprio Salutis intuitibus. 1. Il faut, suivant toute apparence, substituer à viventibus, qui se lit dans l'édition de Corneille, virentibus, leçon des OEuvres de saint Bonaventure, adoptée par Granet, |