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vue sur toute chose. Leur théâtre étoit une école où la vertu n'étoit pas moins bien enseignée que dans les écoles des philosophes. Aussi Aristote a bien voulu donner des règles du poëme dramatique; et Socrate, le plus sage des philosophes, nc dédaignoit pas de mettre la main aux tragédies d'Euripide. Il seroit à souhaiter que nos ouvrages fussent aussi solides et aussi pleins d'utiles instructions que ceux de ces poëtes : ce seroit peutêtre un moyen de réconcilier la tragédie avec quantité de personnes célèbres par leur piété et par leur doctrine, qui l'ont condamnée dans ces derniers temps, et qui en jugeroient sans doute plus favorablement, si les auteurs songeoient autant à instruire leurs spectateurs qu'à les divertir, et s'ils suivoient en cela la véritable intention de la tragédie.

PERSONNAGES.

THESEE, fils d'Egée, roi d'Athènes. PHEDRE, femme de Thésée, fille de Minos et de Pasiphaé.

HIPPOLYTE, fils de Thésée, et d'Antiope reine des Amazones.

ARICIE, princesse du sang royal d'Athènes.
OEN ONE, nourrice et confidente de Phèdre.
THERAMÈNE, gouverneur d'Hippolyte.
ISMENE, confidente d'Aricie.

PANOPE, femme de la suite de Phedre.
GARDES.

La scène est à Trézène, ville du Péloponnèse.

TRAGÉDIE.

ACTE PREMIER.

SCÈNE I.

HIPPOLYTE, THERAMÈNE.

HIPPOLYTE.

LE dessein en est pris, je pars, cher Théramène,

Et quitte le séjour de l'aimable Trézène.
Dans le doute mortel dont je suis agité,

Je commence à rougir de mon oisiveté :
Depuis plus de six mois éloigné de mon père,
J'ignore le destin d'une tête si chère,

J'ignore jusqu'aux lieux qui le peuvent cacher.

THERAMÈNE.

Et dans quels lieux, seigneur, l'allez-vous donc chercher?
Déjà, pour satisfaire à votre juste crainte,
J'ai couru les deux mers que sépare Corinthe;
J'ai demandé Thésée aux peuples de ces bords
Où l'on voit l'Achéron se perdre chez les morts;

J'ai visité l'Élide, et, laissant le Ténare,

Passé jusqu'à la mer qui vit tomber Icare.
Sur quel espoir nouveau, dans quels heureux climats
Croyez-vous découvrir la trace de ses pas?

Qui sait même, qui sait si le roi votre père

Veut que

de son absence on sache le mystère ?

Et si, lorsqu'avec vous nous tremblons pour ses jours,
Tranquille, et nous cachant de nouvelles amours,
Ce héros n'attend point qu'une amante abusée...

HIPPOLYTE.

Cher Théramène, arrête; et respecte Thésée.
De ses jeunes erreurs désormais revenu,
Par un indigne obstacle il n'est point retenu;
Et fixant de ses vœux l'inconstance fatale
Phèdre depuis long-temps ne craint plus de rivale.
Enfin, en le cherchant je suivrai mon devoir,
Et je fuirai ces lieux, que je n'ose plus voir.
THÉRAMÈNE.

Hé! depuis quand, seigneur, craignez-vous la présence
De ces paisibles lieux si chers à votre enfance,

Et dont je vous ai vu préférer le séjour

Au tumulte pompeux d'Athène et de la cour?
Quel péril, ou plutôt quel chagrin vous en chasse?

HIPPOLYTE.

Cet heureux temps n'est plus. Tout a changé de face,
Depuis que sur ces bords les dieux ont envoyé
La fille de Minos et de Pasiphaé.

THÉRAMÈNE.

J'entends: de vos douleurs la cause m'est connue.

Phèdre ici vous chagrine, et blesse votre vuc,

Dangereuse marâtre, à peine elle vous vit,
Que votre exil d'abord signala son crédit.
Mais sa haine, sur vous autrefois attachée,
Ou s'est évanouie, ou s'est bien relâchée.
Et d'ailleurs quels périls vous peut faire courir
Une femme mourante, et qui cherche à mourir?
Phèdre atteinte d'un mal qu'elle s'obstine à taire,
Lasse enfin d'elle-même et du jour qui l'éclaire,
Peut-elle contre vous former quelques desseins?

HIPPOLYTE

Sa vaine inimitié n'est pas ce que je crains:
Hippolyte en partant fuit une autre ennemie :
Je fuis, je l'avoûrai, cette jeune Aricie,
Reste d'un sang fatal conjuré contre nous.
THERAMENE.

Quoi! vous-même, seigneur, la persécutez-vous?
Jamais l'aimable sœur des cruels Pallantides
Trempa-t-elle aux complots de ses frères perfides?
Et devez-vous haïr ses innocents appas?

HIPPOLYTE

Si je la haïssois, je ne la fuirois

pas.'

THÉRAMÈNE.

T

Seigneur, m'est-il permis d'expliquer votre fuite? Pourriez-vous n'être plus ce superbe Hippolyte Implacable ennemi des amoureuses lois

Et d'un joug que Thésée a subi tant de fois? Vénus, par votre orgueil si long-temps méprisée, Voudroit-elle à la fin justifier Thésée?

Et, vous mettant au rang du reste des mortels,

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