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blème d'un immense intérêt en faveur des classes indigentes.

Les hommes d'état de la Hollande ne mettent plus en doute, d'après les résultats progressifs obtenus depuis dix ans, la possibilité d'arracher réel

Les revenus annuels de la société générale de bienfaisance du royaume des Pays-Bas (composéelement et complétement à la détresse, à l'ignorance

des sociétés de La Haye et de Bruxelles ), s'élevaient, en 1829, à plus de 300,000 florins (648,000 fr.). Le gouvernement, les hospices et les communes (1) lui payent, avec un bénéfice réciproque, 35 florins (73 fr. 50 c.) par mendiant, 25 florins (52 fr. 50 c.) pour chaque invalide, et 17 florins (36 fr. 72 c.) pour les enfants au-dessous de treize ans.

Le succès des colonies agricoles des Pays-Bas a résolu pour ce royaume et pour l'Europe un pro

(1) Les communes ont envoyé un très-petit nombre de pauvres aux colonies agricoles. Comme elles ne sont pas forcées de les entretenir, l'engagement de payer annuellement 25 fl. (73 fr. 50 c.) pour chacun d'eux, leur eût été aussi onéreux, qu'il est avantageux au gouvernement et aux hospices de contracter à ce prix pour les mendiants et les individus admis dans les dépôts de mendicité et les établissements charitables.

(2) On pouvait et l'on devait s'attendre à ce que ces bienfaisantes institutions n'échapperaient pas à la critique des hommes superficiels ou soumis à l'influence d'une aveugle routine. Elles ont eu leurs détracteurs, comme en ont eu la vaccine, les nouveaux procédés agricoles; comme en ont eu jadis l'institution des bons frères de la doctrine chrétienne; en un mot, comme en auront toujours la plupart des innovations utiles.

Les détracteurs affirment que l'état prospère des colonies agricoles ne saurait se soutenir longtemps. Mais, pourquoi ce présage? Les champs défrichés dans la Campine et dans d'autres contrées des Pays-Bas, champs qui aujourd'hui fournissent d'excellentes terres; les plaines si fertiles du pays de Waes, qui n'étaient autrefois que des landes abandonnées; enfin, la prospérité toujours croissante, depuis dix ans, de la colonie de Frederick's-Oord, sont là pour répondre à cette inquiétude chagrine et peut-être volontaire.

On a prétendu que les produits des landes défrichées ne com penseront pas, d'ici à vingt ans, les dépenses et les avance faites pour leur défrichement et leur culture. Il est vrai que l'expérience seule peut décider complétement cette question (pour les colonies de mendiants seulement, car elle l'est à l'égard des colonies libres); mais nous devons dire que l'opinion des détracteurs des colonies est tout à fait contraire à celle des agronomes les plus éclairés.

Le but de la société de bienfaisance n'a été entrepris dans aucune vue de spéculation lucrative. Elle n'a pas besoin de bénéfices directs et immédiats. Elle ne songe point à s'enrichir. Elle a compté sans doute sur la rentrée successive de ses avances de fonds; mais il lui suffira de pouvoir rembourser les emprunts aux délais prescrits. Elle a eu la noble pensée de parvenir à diminuer les causes du paupérisme, par l'extension de l'agriculture nationale. Mais elle cherche surtout à tirer de la

et à l'immoralité, par une application suivie des mêmes moyens, la totalité des mendiants et près de la moitié des individus classés au rang des indigents, et enfin, ce qui n'est pas moins précieux, de donner à tous les enfants de la population pauvre des principes religieux, des habitudes de travail, d'ordre et d'économie, et une instruction suffisante, ce qui doit nécessairement préserver leur vie de la misère qui a entouré leur berceau (2).

misère et de l'abjection le plus grand nombre possible d'infortunés; et, n'eût-elle obtenu que ce résultat, elle serait déjà bien amplement récompensée.

Au surplus, une association qui n'avait pas un seul pouce de terre en propriété il y a douze ans, et qui en possède des milliers d'hectares, qui dispose d'un capital de 5 millions de florins (10,800,000 fr.) dont les intérêts se payent et l'amortissement s'opère avec la plus rigoureuse exactitude, et qui jouit enfin de la confiance publique à ce point que ses effets sont aussi avantageusement cotés à la bourse, que ceux de l'état lui-même; une telle association, disons-nous, ne peut craindre de voir échouer ses généreux efforts.

Au 1er juillet 1830, les colonies de bienfaisance renfermaient plus de 8,500 individus qui y jouissaient d'une existence honnête assurée, et étaient heureux relativement, du moins, à leur condition passée. Les colons travaillaient collectivement des portions de terre détachées de la colonie, pour former un fonds de réserve destiné à secourir les familles malades ou victimes de malheurs involontaires. La mendicité était à la veille de disparaître du royaume par des moyens doux et humains Tous les ans, un grand nombre de colons (dont beaucoup jadis mendiants), après avoir satisfait à leurs obligations envers la société, sont émancipés, payent leurs 50 florins (108 fr.) de fermage, et ne sont plus en rien à la charge de la société de bienfaisance. Il n'est pas douteux qu'on arrive à ce point avec la presque totalité des ménages actuels. L'état et les hospices ont économisé 50 p. 100 dans l'entretien des enfants trouvés. La charité publique et la charité particulière peuvent soutenir vingt indigents pour la même somme qu'exigeait autrefois l'entretien de quatre orphelins; et au bout de seize ans, les bienfaits répandus à cette époque sur un certain nombre de pauvres se continueront à perpétuité, d'eux-mêmes et sans aucun nouveau sacrifice.

De tels résultats dispensent de toute autre apologie et ne peuvent manquer d'exciter au plus haut degré l'attention et l'intérêt de tous les hommes qui, en Europe, et surtout en France, se sont occupés des moyens d'éteindre la mendicité et d'améliorer le sort des classes indigentes.

CHAPITRE VII.

EXTRAIT D'UN VOYAGE FAIT EN 1829 AUX COLONIES AGRICOLES D'INDIGENTS DU ROYAUME DES

PAYS-BAS.

Ainsi vous assurez, bienfaiteur du village,

Des secours au vieillard, des leçons au jeune âge. (DELILLE.)

Le spectacle journalier de la misère qui accable la classe ouvrière dans les villes manufacturières, même les plus opulentes, affligeait depuis longtemps mes regards et préoccupait mes pensées. Le désir ardent d'y apporter quelque remède m'avait fait prendre le plus vif intérêt aux diverses publications dont l'établissement des colonies agricoles d'indigents, fondées en Hollande et en Belgique, avaient été l'objet depuis plusieurs années. J'avais lu tous les mémoires qui avaient paru sur ces belles institutions qui semblaient destinées à former une ère nouvelle dans les annales de la bienfaisance; el rêvant, pour notre belle patrie, l'imitation d'un aussi noble exemple, j'avais présenté au gouvernement quelques 'vues sur les avantages et les moyens de créer en France de semblables établissements. Mais ce tribut ne pouvait satisfaire complétement mon cœur : j'étais impatient de m'assurer par moimême s'il n'y avait pas quelque exagération dans les rapports des administrateurs des colonies néerlandaises, dans l'amour-propre des écrivains nationaux ou dans les récits de voyageurs philanthropes.

Des devoirs impérieux ne me permirent d'entreprendre ce pèlerinage philanthropique que vers e 20 juillet 1829.

Accompagné de madame de V......, non moins empressée que moi de visiter les nouvelles institutions de bienfaisance du royaume des Pays-Bas, je me rendis de Lille à Amsterdam par Gand, Anvers, Rotterdam et La Haye.

Je ne donnerai pas ici le récit de mon voyage dans ce pays si curieux, et où éclatent à chaque pas les merveilles de l'industrie humaine, je ne ferais que répéter ce qu'une multitude de voyageurs ont parfaitement décrit. Je me bornerai donc à ce qui concerne mon itinéraire vers les colonies agricoles.

COLONIES AGRICOLES DES PROVINCES SEPTENTRIONALES DE LA HOLLANDE.

Par l'effet d'un empressement bien naturel, je voulus prendre la voie la plus prompte pour arriver à Frederick's-Oord. On me conseilla de m'enbarquer sur le Zuyderzée, et je louai à cet effet la chambre dite des voyageurs, sur un boortman, navire destiné à la traversée d'Amsterdam à Zwol. Nous partîmes le soir par un vent très-favorable, et qui semblait nous promettre d'être rendus le lendemain matin de bonne heure. Mais le temps changea pendant la nuit ; la mer devint trèsagitée et les vents tout à fait contraires : il fallut demeurer ainsi durant trente-six heures dans la situation la plus incommode qui se puisse imaginer : nous parvinmes enfin à débarquer dans le petit port de Zwortsluis, où se trouva une voiture qui nous conduisit à Steenwyck. Vers le midi, nous étions arrivés à l'auberge des Champs de Frédéric, située à l'entrée de la colonie numéro 1, attenant à l'habitation du directeur des colonies.

COLONIE DE FREDERICK'S-OORD.

Après quelques moments de repos, notre premier soin fut de parcourir les diverses colonies dont se composent les établissements de Frederick'sOord.

Il serait difficile d'exprimer le sentiment de bonheur et de vive admiration dont nos cœurs étaient pénétrés dans tout le cours de cette promenade qui se prolongea pendant sept heures. Le ciel était d'une douceur et d'une sérénité ravissantes. Nous suivions constamment des routes magnifiques bordées d'arbres jeunes et vigoureux, trouvant de distance en distance, à droite et à gauche, des maisons de cultivateurs neuves et d'une construction solide, dont la simplicité n'exclut pas une sorte

d'élégance. Chacune d'elles est bâtie en brique rouge. Les volets des fenêtres sont peints en couleur brune, le châssis des vitres en gris; la couverture est en chaume; les soubassements, jusqu'à une hauteur de trois pieds, sont blanchis à la chaux chaque habitation est ornée d'un potager émaillé de fleurs, qui presque toujours fait face à l'allée ou plutôt à l'immense rue du village agricole. Aux ailes et sur le derrière de la maison, s'étendent les cinq hectares de terre affectés à chaque ménage : là, de belles cultures variées en pommes de terre, blé, seigle, choux et betteraves, et des arbres fruitiers déjà forts et élevés, attestaient les efforts d'une industrie active et intelligente, et rappelaient le souvenir des admirables fermes de la Belgique et de la Flandre.

Plusieurs maisons récemment bâties, n'avaient pas encore reçu d'habitants, et attendaient leur ménage de colons; d'autres, en petit nombre, avaient été abandonnées par des familles que l'exemple et les leçons n'avaient pu ramener encore à l'habitude de l'ordre et du travail; autour d'elles on n'apercevait plus ni jardins, ni fleurs, ni culture. On reconnaissait aussi quelques fermes exploitées par des colons venus des villes et peu exercés à l'agriculture, à la langueur de la végétation et à la tenue négligée des terres. Mais, en général, l'ensemble était satisfaisant, et ces légères lacunes mêmes ne prouvaient que davantage le pouvoir et l'influence du travail intelligent.

Nous entrâmes dans un grand nombre de maisons habitées. Presque partout nous retrouvions cet ordre admirable et ces soins de tous les instants qui distinguent les ménagères hollandaises. La vacherie garnie de deux vaches, la laiterie, les meubles, le linge, tout resplendissait de propreté. Des enfants au teint vermeil, des mères rayonnant de santé et de contentement, des hommes robustes proprement mis, et dont la physionomie respirait une satisfaction habituelle, animaient ces paisibles demeures.

Nous sourîmes quelquefois à l'expression de la coquetterie naïve de plus d'une de ces bonnes ménagères qui, en nous montrant son armoire à linge et quelques vases de porcelaine du Japon, se hâtait de nous apprendre que ces objets étaient sa propriété personnelle et n'avaient pas été fournis par la société de bienfaisance. Cette pudeur d'une misère reconnaissante, mais qui n'ose avouer l'excès du dénuement d'où elle avait été tirée, nous parut touchante et d'un heureux augure; car elle annonçait le retour à un sentiment de dignité trop souvent éteint par la misère elle-même.

Nous visitâmes la maison d'école, celle du sousdirecteur et des inspecteurs, l'édifice que l'on se

| propose de consacrer au culte religieux dans la colonie numéro 5, dite de Williams-Oord (champs de Guillaume) et la maison de travail. Je remarquai que, dans ce dernier bâtiment, les ateliers étaient fort étroits. L'escalier est d'une rapidité dangereuse et choquante les sexes n'y étaient point encore séparés.

L'enseignement mutuel est adopté dans l'école. On m'assura que les enfants devenaient d'excellents valets de ferme. I sortait annuellement des colonies soixante à quatre-vingts jeunes gens pour remplir cet emploi.

Comme dans tout le reste de la Hollande, les terres de Frederick's-Oord sont inondées une partie de l'année. Un grand nombre de canaux traversent les colonies dans tous les sens, et aboutissent aux grands canaux de navigation de la Hollande; ils servent à la fois de moyens de desséchement et de communication. Le terrain, assis sur un fond tourbeux, m'a rappelé parfaitement celui des marais de Donges nouvellement desséchés dans le département de la Loire-Inférieure.

Je ne saurais oublier de mentionner et les soins et l'extrême politesse de M. Conyembourg, directeur des colonies septentrionales, récemment arrivé à Frederick's-Oord.

Nous passâmes la journée du lendemain à parcourir de nouveau, et avec plus de détail, les parties les plus remarquables des différentes colonies, sans pouvoir nous lasser de contempler et d'admirer le spectacle, si doux pour l'humanité, que ces lieux offrent de toutes parts. Peu de jours auparavant, les colonies avaient été visitées par M. le vicomte Lainé, pair de France, et par l'un des membres de la noble et bienfaisante famille de Larochefoucauld.

Nous joignons ici la carte topographique des colonies de Frederick's-Oord (planche I), le plan d'une maison de colon (planche II), et une vue générale de la colonie (planche III).

COLONIE-INSTITUT DE WATEZEN.

En quittant Frederick's-Oord, nous nous dirigeàmes sur les établissements de Veen-Huysen, en passant par Watezen, institut agricole fondé par la société de bienfaisance. Watezen est à environ trois lieues nord de Frederick's-Oord, à peu de distance de la route de Steenwyck à Groningue.

On traverse, pour s'y rendre, une contrée d'un aspect triste et sombre, offrant successivement des landes absolument semblables à celles de la Bretagne, et particulièrement de l'arrondissement de Châteaubriand (Loire-Inférieure), des bruyères, et des plaines sablonneuses où l'on aperçoit çà et là de larges flaques d'eau.

L'institut est placé au centre d'un plateau cultivé, d'une assez vaste étendue, et parsemé de quelques bouquets de bois.

Les bâtiments, construits en forme de croix grecque, sont propres et commodément distribués. Une partie est affectée au logement de M. N....., élève de l'établissement agricole d'Hoffwil, et de sa famille. L'autre est destinée aux élèves, au nombre d'environ soixante. Les dortoirs servent à la fois de réfectoires, d'ateliers de travail et de salles d'étude. Les lits sont des hamacs que l'on hisse au plancher aussitôt après le lever des élèves.

Le terrain sur lequel s'exercent les élèves est d'une qualité très-médiocre. Il a été choisi exprès comme un théâtre plus difficile de travail et d'expériences.

catholique sont remarquables par le bon goût de leur architecture. Des fermes sont placées autour de ces divers édifices.

La seconde colonie, placée à environ une demilieue de la première, possède un dépôt agricole de mendiants, un hospice agricole pour des ménages de vétérans et de grandes fermes cultivées par des mendiants.

La troisième, enfin, éloignée de deux lieues de la première, présente un hospice agricole d'orphelins et d'enfants trouvés, et un hospice agricole de ménages de vétérans et d'artisans, et plusieurs grandes fermes.

Rien ne peut être comparé à l'ordre parfait qui règne dans chaque institution, sous le rapport moral et physique. Les enfants surtout sont l'objet des soins les plus attentifs. De sages règlements assurent à tous les habitants de la colonie ce que peuvent exiger leur âge, leur situation et leur destinée

La végétation des jardins, des terres cultivées et des arbres, très-jeune encore, me parut néanmoins fort belle. Les genêts et le ray-grass, dont on commençait à faire grand usage, avaient parfai- sociale. tement réussi.

Les instruments aratoires envoyés d'Amsterdam me parurent construits avec soin; mais il y manquait plusieurs de ceux introduits nouvellement, dans la pratique agricole, en Angleterre et en France.

Les élèves de Watezen sont destinés à la surveillance des travaux d'agriculture des diverses colonies. Leur instruction est tout entière dirigée vers ce but; chaque année, un certain nombre d'entre eux sont choisis pour occuper les postes qui leur sont assignés d'avance.

Colonies de VEEN-HUYSEN (DRENTHE).

De Walezen, on se rend aux colonies de VeenHuysen par la route de Steenwyck à Groningue. Le pays que l'on traverse pour y arriver n'offre, sur une étendue d'environ six lieues, qu'un aspect monotone de landes et de bruyères. Mais tout change de face à mesure que l'on aperçoit la première colonie, et l'ennui et la fatigue font bientôt place à l'étonnement et à l'admiration.

Les établissements de Veen-Huysen, les plus importants et les plus remarquables de toutes les fondations de la société de bienfaisance, forment trois colonies séparées, dont chacune est affectée à diverses institutions du plus haut intérêt.

La première, distante d'environ six lieues de l'institut de Watezen, renferme un hospice agricole pour les orphelins, les enfants trouvés et abandonnés ; un hospice agricole pour des ménages d'artisans, et enfin, des salles pour le logement d'un certain nombre de mendiants. Les vastes bâtiments consacrés à cette destination, sont d'une noble simplicité : le temple protestant et l'église

De nombreux canaux traversent les colonies et vont rejoindre les grands canaux de navigation qui aboutissent au Zuyderzée.

Le sol des diverses colonies m'a paru de la même nature qu'à Frederick's-Oord et à Watezen, c'està-dire sablonneux et tourbeux.

Ces magnifiques établissements ont été si exactement décrits dans l'ouvrage de M. Édouard Mary, dont nous avons donné plusieurs extraits dans le chapitre précédent, qu'il serait inutile de nous étendre davantage à cet égard. Nous nous bornerons à faire remarquer ici qu'à l'époque de notre voyage aux colonies agricoles, en juillet 1829, une mortalité qui excédait les règles observées dans l'ordre de la nature, s'était manifestée pendant les six premiers mois de l'année parmi les orphelins et les enfants trouvés de la troisième colonie. On avait pensé, dans le principe, devoir l'attribuer à quelque vice de construction de l'édifice affecté au logement des enfants. Mais un examen très-attentif n'a pu faire reconnaître aucune cause locale apparente d'insalubrité. Tous les autres colons ont constamment joui d'une santé parfaite, et l'infirmerie des orphelins et des enfants trouvés de la première colonie est demeurée presque toujours vacante. L'administration s'occupait avec un soin paternel des moyens de découvrir la cause de cette affligeante anomalie et d'en prévenir le retour.

En nous éloignant de Veen-Huysen, pour revenir à Frederick's-Oord et nous rendre de là à la colonie d'Ommerchans, nos cœurs étaient pleins d'un religieux enthousiasme : la charité venait de nous apparaître revêtue des formes les plus dignes de sa céleste origine. La réunion du travail et de la charité nous avait offert ses plus étonnantes

merveilles. La destinée religieuse et sociale de la race humaine semblait s'être révélée tout entière à nos regards dans cette portion de la terre. Quel sujet de hautes pensées et de méditations! Quelle source de doux et de profonds souvenirs!...

C'est dans cette disposition morale, que nous continuâmes notre route en repassant par les champs de Frédéric.

Il y a environ quinze lieues de distance de Frederick's-Oord à Ommerchans. On traverse Steenwyck et la jolie petite ville de Meppel.

De Steenwyck à Meppel, la route parcourt beaucoup de landes, quelques bouquets de pins, et enfin un petit bois de chênes. Au-delà de Meppel, on s'enfonce dans un véritable océan de landes qui n'est interrompu que par la colonie d'Ommerchans, nouvelle oasis de ce désert. (Planche IV.)

Par l'effet d'un heureux hasard, nous avions rencontré sur le navire qui nous avait conduits d'Amsterdam à Zwortsluis, M. Van de Velde, directeur particulier des établissements d'Ommerchaps, homme plein d'activité, d'intelligence et d'une obligeance parfaite. Informé de l'objet de mon voyage, il m'avait fortement engagé à ne pas manquer de visiter cette intéressante portion des colonies agricoles et à y prolonger le plus possible mon séjour.

Nous avons fait connaître précédemment l'objet et la nature de la colonie d'Ommerchans, j'ajouterai seulement à ces détails qu'autour du dépôt de mendicité et de ses fermes, l'agriculture se propage rapidement et qu'une nombreuse population, étrangère à celle des colonies, s'empresse de venir prendre part à ce commencement de civilisation. Des maisons praticulières, commodes et même élégantes, s'élèvent de tous côtés. On y comptait déjà près de 800 habitants, parmi lesquels figurent beaucoup de familles juives. Un temple protestant et une synagogue ont été bâtis pour les besoins de la nouvelle ville qui se forme d'elle-même auprès de la colonie.

Au moment de notre passage à Ommerchans, le dépôt de mendicité renfermait 1,200 mendiants qui doivent y être retenus jusqu'à ce qu'ils puissent fournir caution de leurs moyens d'existence. Le minimum de leur séjour forcé, au dépôt, est d'une année. Dans tous les cas, ils ne peuvent quitter l'établissement avant d'avoir amassé au moins 25 florins (52 fr. 50 c.) de pécule.

Les mendiants du dépôt d'Ommerchans, comme ceux de Veen-Huysen, peuvent, sur leur demande, après un an de séjour au dépôt, être admis aux colonies libres de Frederick's-Oord, pourvu qu'ils soient en état de donner de suffisantes garanties de moralité et de travail.

La nourriture des mendiants consiste en une livre et demie de pain par jour; ils ont à midi une ration copieuse de bonne soupe aux pommes de terre et au lard. Ceux qui ont quelque argent se procurent le supplément qu'ils désirent. Le pain des mendiants est noir, lourd et d'un goût détestable, mais c'est le même, au reste, dont font usage les paysans dans toute cette partie de la Hollande; celui des malades traités à l'infirmerie est trèsblanc et très-bon.

Les mendiants des deux sexes portent un costume uniforme de grosse étoffe grise en hiver, et de toile en été.

Le dépôt de punition (straf kolonie) est placé à côté du dépôt général des mendiants: nous n'y trouvâmes qu'un petit nombre de détenus, soumis à une surveillance active, mais traités avec justice et douceur. Auprès du dépôt de punition, s'élèvent l'église catholique et le presbytère.

Il y avait peu de malades à l'infirmerie. On a remarqué que, parmi les mendiants amenés de toutes les parties de la Hollande, les Zélandais étaient les plus fréquemment atteints d'indispositions graves; ils sont particulièrement sujets à la nostalgie qui en avait moissonné un assez grand nombre dans les six premiers mois de 1829.

Le sol de la colonie d'Ommerchans offre peu de différence avec celui de Frederick's-Oord; il est, en général, sablonneux et tourbeux.

Depuis qu'il avait été placé à la tête de la colonie, M. Van de Velde, excellent agriculteur, n'avait cessé de s'occuper avec ardeur des moyens d'introduire sur ce terrain ingrat toutes les améliorations dont il pouvait être susceptible.

L'assolement qu'il avait adopté pour les fermes de la colonie était triennal; sur 40 acres de terre (ou arpents), il en consacrait constamment 12 à produire des genêts, savoir 4 en semis, 4 en croissance et 4 destinés à être enterrés la troisième année, et à bonifier les 28 arpents restants. Ceux-ci donnaient, la première année, des pommes de terre; la deuxième, on fumait et on semait du blé; la troisième, on ensemençait en avoine.

A Ommerchans, comme ailleurs, l'abondance du fumier était le grand secret de toute amélioration agricole. Aussi rien n'était-il négligé pour se le procurer. Le genêt était à cet égard d'un puissant secours. La réunion de 1,200 individus sur un même point, donnait lieu également à la production d'une quantité considérable d'engrais que l'on destinait principalement à augmenter les pâturages. En 1829, l'établissement ne recueillait pas encore les fourrages nécessaires pour l'exploitation agricole et la nourriture des vaches. Mais on espérait y parvenir en peu d'années. Le ray-grass

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