Obrazy na stronie
PDF
ePub

Page 953.

Page 954.

Page 998.

Je vous ai soumis les nations barbares, j'ai amené
à vos pieds votre ennemi ; j'ai mis à votre disposition,
pour le soutien de vos armées, les approvisionnemens
que vos ennemis avoient faits pour les leurs. J'ai jeté
la confusion dans leurs conseils, j'ai enfermé l'usur-
pateur dans ses propres filets et lui ai enlevé tout asile,
afin que ni lui, ni pas un des siens, ne vous échap-
pât (1). Vous, en reconnoissance des triomphes que
je vous ai ménagés, vous donnez à mes ennemis la vic-
toire sur mon peuple. Si je vous rappelle tant de si-
gnalés bienfaits de Dieu envers vous,
vous reprocher de les avoir oubliés; non, prince;
mais pour enflammer de plus en plus l'amour que
vous lui devez.

ce n'est

pas pour

Le langage que je vous tiens, je le devois moi-même à ma reconnoissance pour les gràces que vous avez daigné accorder, à ma prière, à tant de citoyens sauvés de l'exil, de la prison et de la mort, ainsi qu'au zèle qui m'anime pour votre salut. Si vous ne vous en rapportez pas à moi seul, appelez tels évêques que vous jugerez à propos. Quand il est question des intérêts du fisc, vous déférez aux avis de vos comtes; dans une cause qui intéresse la religion, pourriez-vous ne pas consulter des évêques (2)?

VIII. AU TRÈS-AUGUSTE EMPEREUR THÉODOSE, AMBROISE, ÉVÊQUE.

...

Après le massacre de Thessalonique.

Si je me renfermois dans le silence, ma conscience

(1) Allusion à la victoire de Théodose sur Maxime.
(2) Théodose révoqua son ordonnance.

en resteroit chargée; le prophète nous le déclare :

Faute d'étre averti par le prétre, le pécheur mourra Ezech. 1. 19.

dans son péché, et le prétre sera coupable de ne l'avoir pas averti. Ecoutez donc, prince: Vous avez du zèle pour la foi, vous avez la crainte du Seigneur. Je suis bien loin de le contester; mais la nature vous a donné une impétuosité de caractère susceptible de se tourner en sentiment généreux, quand elle se calme, comme de s'emporter et de vous entraîner au-delà des bornes quand elle s'aigrit. Plaise au ciel du moins qu'il ne se rencontre personne qui l'enflamme, s'il n'y a personne qui la modère ! On peut sur les suites s'en reposer sur vous-même ; vous finissez par revenir à vous-même, et vos dispositions à la piété triomphent de votre effervescence naturelle.

J'ai voulu vous laisser à vos seules pensées, plutôt que de risquer d'attrister par une action d'éclat un premier emportement. J'ai mieux aimé paroître manquer aux bienséances, qu'au devoir de la soumission, et vous laisser le temps de réfléchir dans le calme de la conscience.

La ville de Thessalonique a vu ce qui, de mémoire d'homme, n'étoit arrivé jamais; ce qu'il n'a pas été en mon pouvoir d'empêcher; ce que je vous avois à l'avance représenté tant de fois comme un crime énorme, et que vous-même vous vous êtes reproché, mais trop tard, comme impardonnable. A la nouvelle qui s'en est répandue, il n'est personne qui ait pu rester indifférent, personne qui n'en ait été vivement affligé.

Après vous être rendu coupable, comme David, craindriez-vous de faire ce que le roi-prophète, de qui

Jésus-Christ devoit naître selon la chair, n'a pas rougi II Reg. 1.13. de faire ? Il reconnut son péché, en disant : J'ai péché contre le Seigneur. Ne trouvez pas mauvais," prince, que l'on vous dise: Vous avez imité David dans son crime, imitez-le dans sa pénitence (1).

Page 999.

[ocr errors][merged small]

Si je vous écris dans ces termes, ce n'est pas pour vous humilier, mais pour vous exciter, par l'exemple d'un roi, à chercher dans la pénitence la rémission de votre péché. Vous êtes homme; vous avez été attaqué par la tentation, prenez le dessus. Il n'y a que par les larmes et par la pénitence que l'on efface le péché; il n'y a ni ange ni archange capable de le remettre autrement; le Seigneur lui-même ne pardonne qu'à ceux qui font pénitence. Je vous conseille, je vous supplie, je vous exhorte, je vous avertis. Quelle affliction pour moi de penser qu'un prince jusque là modèle de la plus haute piété, non moins recommandable par une clémence sans bornes, aussi miséricordieux envers les criminels eux-mêmes, ait pu s'oublier à ce point! et combien ma douleur seroit plus vive encore, si vous restiez indifférent sur la mort de tant d'innocens! C'étoit votre bonté que l'on mettoit à la tête de toutes vos excellentes qualités... Le démon vous a envié ce triomphe : triomphez-en à votre tour, tandis que vous avez encore de quoi le faire. N'ajoutez pas à votre péché celui de vous attribuer ce que plusieurs se sont attribué à leur préjudice.....

Dévoué pour tout le reste à votre majesté, et pour

(1) Quem secutus es errantem, sequere pœnitentem. (Paulin, dans la Fie de saint Ambroise, no 24.)

rai-je ne pas l'être sans ingratitude? je suis contraint de vous déclarer qu'il me deviendroit impossible d'ofrir le sacrifice, si vous vouliez y assister. Ce qui ne seroit pas permis après l'effusion du sang d'un seul innocent, peut-il l'ètre, après que vous avez répandu celui de tant d'innocens? Je ne le crois

pas.

<< Comment pourriez-vous recevoir le corps du Sauveur dans des mains toutes souillées ? comment porterez-vous son sang précieux à votre bouche, vous qui avez répandu injustement le sang de tant de personnes, par une parole pleine d'emportement et de colère (1)? »

Rendons grâces à Dieu qui se plaît à châtier ceux qui le servent, jaloux qu'il est de les conserver. En vous parlant, comme je fais, je suis l'exemple des pro- Page 1001. phètes; en vous humiliant par la pénitence, vous suivrez l'exemple des saints (2).

(1) Traduction française de Bossuet, Defensio declarat. cleri gallic., lib. 11, cap. v, pag. 272, édit. in-4. Paris (Amsterdam), 1745.

(2) Istud mihi commune est cum prophetis ; et tibi erit commune cum sanctis.

Rien de plus célèbre dans l'antiquité, que la pénitence imposée par saint Ambroise à l'empereur Théodose, en expiation de son crime, et l'héroïque magnanimité avec laquelle ce prince s'y soumit.

Nos prédicateurs français ont souvent rappelé ce fait, l'un des plus heaux monumens de notre histoire. (Voy. Serm. du père Le Jeune, serm. Ix, tom. I, 1re part., pag. 311; La Boissière, Carême, tom. 1, pag. 326.) Molinier: « L'histoire en est trop belle et trop instructive pour ne pas trouver ici sa place.» (Dans un Serm. sur la communion pascale, Serm. chois., tom. 11, 2o part., pag. 190.) Il en conclut le récit par cette réflexion : « S'il se trouvoit encore des Ambroise, il se trouveroit > encore des Théodose, qui, à la veille de la grande solennité, repoussés » de l'église, s'en retourneroient pleurer leurs crimes an fond de leur maison. S'il se trouvoit des prêtres comme ce grand évêque, il se

[ocr errors]

Page 1010.

IX. a Eugène (1).

Le motif qui a déterminé ma sortie de Milan, ç'a été la crainte du Seigneur, à qui je rapporte, autant que je le puis, toutes mes actions, accoutumé que je

trouveroit des pénitens humiliés, qui diroient de ces ministres fi» dèles : Je n'ai trouvé que cet homme-là de prêtre; comme Théodose, » dans une autre occasion, où Ambroise ne parat pås moins ferme, di» soit de lui: Je ne connois que cet homme-là d'évêque : Solum Ambro »sium novi episcopum. » (Ibid., pag. 193. Il cite encore le même fait au tom. III, pag. 284.)

[ocr errors]

Théodoret nous a conservé les détails de la pénitence, à laquelle l'empereur se soumit. Quoique Théodose se fût abstenu de l'entrée de l'église, il n'avoit pas encore pratiqué les autres observances des canons sur la pénitence publique. Ambroise l'exigea; et le prince accepta toutes les conditions. L'archevêque ne leva l'excommunication qu'après qu'elles eurent été fidèlement accomplies. Toutefois, Théodose ne fut pas encore admis dans le lieu saint, à la manière accoutumée avec les autres fidèles, mais seulement dans l'état de prosterné. Aussitôt, et de son propre mouvement, dépouillant les ornemens impériaux, il se prosterna sur la terre, qu'il arrosa de ses larmes; et se frappant la poitrine, il commença de prier, et répéta long-temps, dans l'amertume de son cœur, ces paroles de David: Je suis demeuré étendu sur le pavé, ó mon Dieu, rendezmoi la vie selon vos promesses. Cependant le peuple fondoit en larmes, et prioit avec son pieux empereur. Plus attendri que personne, l'évêque crut pouvoir, dans cette conjonture, se relâcher des règles ordinaires, qui n'accordoient qu'à la mort la grâce de la réconciliation pour le crime d'homicide. L'illustre pénitent n'en eut qu'une douleur plus vive de sa faute tout le reste de sa vie. (Théodoret, Hist. eccles., lib. v, . cap. xvII; Bérault-Bercastel, Hist. de l'église, tom. 11, pag. 568, 569.)

(1) Après le meurtre de Valentinien, le comte Arbogaste décora de la pourpre impériale Eugène, simple professeur de belles-lettres, avec lequel il s'avança jusqu'à Milan. Saint Ambroise, pour ne pas l'y rencontrer, sortit de cette capitale, et alla jusqu'à Bologne.

« PoprzedniaDalej »