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ERIPHY LE.

Vous me quittez! eh quoi! pourriez-vous donc penfer Qu'Eriphyle héfitât à vous récompenfer ?

Que craignez-vous? parlez: il faut ne me rien taire.

AL CME ON.

Je ne dois point lever un regard téméraire
Sur les fecrets du trône, et fur ces nouveaux nœuds
Préparés par vos mains pour un roi trop heureux.
Mais de ce jour enfin la pompe folennelle,
De votre choix au peuple annonce la nouvelle.
Ce fecret dans Argos eft déjà répandu:
Princeffe, à cet hymen on s'était attendu.
Ce choix fans doute eft jufte, et la raifon le guide;
Mais je ne ferai point le fujet d'Hermogide.
Voilà mes fentimens : et mon bras aujourd'hui
Ayant vaincu pour vous, ne peut fervir fous lui.
Puniffez ma fierté, d'autant plus condamnable,
Qu'ayant ofé paraître, elle eft inébranlable.

ERIPH YLE.

Aleméon, demeurez; j'attefte ici les Dieux,
Ces Dieux qui fur le crime ouvrent toujours les yeux,
Qu'Hermogide jamais ne fera votre maître ;
Sachez que c'eft à vous à l'empêcher de l'être :
Et contre fes rivaux, et fur-tout contre lni,
Songez que votre reine implore votre appui.

ALC ME ON.

Qu'entends-je! ah! difpofez de mon fang, de ma vie. Que je meure à vos pieds en vous ayant fervie! Que ma mort foit utile au bonheur de vos jours!

ERIP HYL E.

C'eft de vous feul ici que j'attends du fecours.
Allez affurez-vous des foldats dont le zèle
Se montre à me fervir auffi prompt que fidèle.
Que de tous vos amis ces murs foient entourés ;

Qu'à tout événement leurs bras foient préparés.
Dans l'horreur où je fuis, fachez que je fuis prête
A marcher s'il le faut, à mourir à leur tête.
Allez.

SCENE I V.

ERIPHY LE, ZELONIDE.

ZELO NI DE.

Qu

UE faites-vous? Quel eft votre deffein ?

Que veut cet ordre affreux ?

ERIPH YLE.

Ah! je fuccombe enfin. Dieux! comme en lui parlant, mon ame déchirée Par des nœuds 'inconnus fe fentait attirée ! De quels charmes fecrets mon cœur eft combattu! Quel état! ... Achevons ce que j'ai réfolu. Je le veux étouffons ces indignes alarmes.

ZELON IDE.

Vous parlez d'Alcméon, et vous verfez des larmes ! Que je crains qu'en fecret une fatale erreur...

ERIPH Y LE.

Ah, que jamais l'amour ne rentre dans mon cœur!
Il m'en a trop coûté: que ce poifon funefte
De mes jours languiffans n'accable point le refte!
Jours trop infortunés vous ne fûtes remplis

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Qu'à pleurer mon époux, qu'à regretter mon fils! Leur fouvenir fatal a toutes mes tendreffes.

* Malheureuse! eft-ce à toi d'éprouver des faibleffes ? Pénétré des remords qui viennent m'alarmer, Ce cœur plein d'amertume eft-il fait pour aimer?

ZEL ON IDE.

Pourquoi donc à fon nom redoublez- vous vos plaintes Pardonnez à mon zèle, et permettez mes craintes. Songez que fi l'amour décidait aujourd'hui. . .

ERIPHY L E.

* Non, ce n'est peint l'amour qui m'entraîne vers lui;
Non, un Dieu plus puiffant me contraint à me rendre.
L'amour n'est pas fi pur, l'amour n'eft pas si tendre.
Non, plus je m'examine, et plus j'ole approuver
Les fentimens fecrets qui m'ont fu captiver.

* Ce n'est point par les yeux que mon ame est vaincue.
Ne crois pas qu'à ce point de mon rang defcendue
Ecoutant de mes fens le charme empoifonneur,
* Je donne à la beauté le prix de la valeur.,
Je chéris fa vertu, j'aime ce que j'admire.
ZELONI D'E..

Ah, Dieux! oferiez-vous le nommer à l'Empire ?
ER IPHY L E.

En de fi pures mains ce fceptre enfin remis
Deviendrait refpectable à nos dieux ennemis.
Mais une loi plus fainte, et m'éclaire et me guide;
Je chéris Alcméon, je détefte Hermogide.

Et je vais rejeter en ce funefte jour,

Les confeils de la haine et la voix de l'amour.
Nature, dans mon cœur filong-temps combattue,
Sentimens partagés d'une mère éperdue,
Tendre reffouvenir, amour de mon devoir,
Reprenez fur mon ame un abfolu pouvoir.
Moi, régner! moi, bannir l'héritier véritable !
Ce fceptre enfanglanté pèfe à ma main coupable.
Réparons tout: allons; et vous, Dieux dont je fors,
Pardonnez des forfaits moindres que mes remords.
Qu'on cherche Polémon. Ciel! que vois-je? Hermogide!
SCENE

SCENE V.

ERIPHYLE, HERMOGIDE, ZELONIDE,
EUPHORBE.

HERMO GIDE.

MADAME, je vois trop le transport qui vous guide ;

Je vois que votre cœur fait peu diffimuler;
Mais les momens font chers, et je dois vous parler.
Souffrez de mon refpect un confeil falutaire,
Votre deftin dépend du choix qu'il vous faut faire.
Je ne viens point ici rappeler des fermens
Dictés par votre père, effacés par le temps;
Mon cœur ainfi que vous doit oublier, Madame,
Les jours infortunés d'une inutile flamme;
Et je rougirais trop, et pour vous, et pour moi,
Si c'était à l'amour à nous donner un roi.
Un fentiment plus digne, et de l'un, et de l'autre,
Doit gouverner mon fort et commander au vôtre.
Vos aïeux et les miens, les dieux dont nous fortons,
Cet Etat périffant fi nous nous divifons,
Le fang qui nous a joints, l'intérêt qui nous lie,
Nos ennemis communs, l'amour de la patrie,
Votre pouvoir, le mien, tous deux à redouter,
Ce font-là les confeils qu'il vous faut écouter,
Banniffez pour jamais un fouvenir funefte;
Le préfent nous appelle, oublions tout le refte.
Le paffé n'eft plus rien: maîtres de l'avenir,
Le grand art de régner doit feul nous réunir.
Les plaintes, les regrets, les vœux font inutiles:
C'est par la fermeté qu'on rend les dieux faciles.
Ce fantôme odieux qui vous trouble en ce jour,
Qui naquit de la crainte, et l'enfante à fon tour,
Théâtre. Tome 1.

ни

Doit-il nous alarmer par tous fes vains prestiges?
Pour qui ne les craint point, il n'eft point de prodiges :
Ils font l'appât groffier des peuples ignorans,
L'invention du fourbe, et le mépris des grands.
Penfez en roi, Madame, et laiffez au vulgaire
Des fuperftitions le joug imaginaire.

Quoi! vous...

ERIPH YLE.

HERM OGID E.

Encore un mot, Madame, et je me tais.

Le feul bien de l'Etat doit remplir vos fouhaits: Vous n'avez plus les noms, et d'époufe, et de mère ; Le ciel vous honora d'un plus grand caractère. Vous régnez; mais fongez qu'Argos demande un roi, Vous avez à choifir: vos ennemis, ou moi. Moi, né près de ce trône, et dont la main sanglante A foutenu quinze ans fa grandeur chancelante : Moi, dis-je, ou l'un des rois, fans force et fans appui, Que mon lieutenant feul a vaincus aujourd'hui. *Je me connais, je fais que blanchi fous les armes * Ce front trifte et févère a pour vous peu de charmes, * Je fais que vos appas, encor dans leur printemps, * Devraient s'effaroucher de l'hiver de mes ans ; * Mais la raifon d'Etat connaît peu ces caprices; *Et de ce front guerrier les nobles cicatrices

Ne peuvent fe couvrir que du bandeau des rois.
Vous connaiffez mon rang, mes attentats, mes droits
Sachant ce que jai fait, et voyant où j'afpire,

Vous me devez, Madame, ou la mort, ou l'Empire.
Quoi! vos yeux font en pleurs; et vos efprits troublés...

ERIPHY LE.

Non, Seigneur, je me rends; mes deftins font réglés.

On le veut; il le faut; ce peuple me l'ordonne;

C'en eft fait à mon fort, Seigneur, je m'abandonne.

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