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Des fons fiers et hardis du théâtre tragique,
Paris court avec joie aux grâces du comique.
C'eft-là qu'il veut qu'on change et d'esprit et de ton:
Il fe plaît au naïf, il s'égaie au bouffon;

Mais il aime fur-tout qu'une main libre et sûre
Trace des mœurs du temps la riante peinture.
Ainfi dans ce fentier, avant lui peu battu,
Molière en fe jouant conduit à la vertu.

Folâtrant quelquefois fous un habit grotesque,
Une mufe defcend au faux goût du burlesque :
On peut à ce caprice en paffant s'abaiffer;
Moins pour être applaudi, que pour se délaffer.
Heureux ces purs écrits que la fageffe anime,
Qui font rire l'efprit, qu'on aime et qu'on eftime!
Tel eft du Glorieux le chafte et fage auteur:
Dans fes vers épurés la vertu parle au cœur.
Voilà ce qui nous plaît, voilà ce qui nous touche;
Et non ces froids bons mots dont l'honneur s'effarouche,
Infipide entretien des plus groffiers efprits,

Qui font naître à la fois le rire et le mépris.

Ah! qu'à jamais la fcène, ou fublime, ou plaifante
Soit des vertus du monde une école charmante!

Français,c'eft dans ces lieux qu'on vous peint tour à tour
La grandeur des héros, les dangers de l'amour.
Souffrez que la terreur aujourd'hui reparaisse;
Que d'Efchyle au tombeau l'audace ici renaisse;
Si l'on a trop ofé, fi dans nos faibles chants,
Sur des tons trop hardis nous montons nos accens,
Ne découragez point un effort téméraire.

Eh! peut-on trop oser, quand on cherche à vous plaire?
Daignez vous transporter dans ces temps, dans ces lieux,
Chez ces premiers humains vivans avec les die ux:
Et que votre raifon fe ramène à des fables

Que Sophocle et la Grèce ont rendu vénérables,
Vous n'aurez point ici ce poison fi fatteur
Que la main de l'amour apprête avec douceur.
Souvent dans l'art d'aimer Melpomène avilie,
Farda fes nobles traits du pinceau de Thalie.
On vit des courtisans, des héros déguifés
Pouffer de froids foupirs en madrigaux ufés.
Non, ce n'eft point ainsi qu'il eft permis qu'on aime;
L'amour n'eft excufé, que quand il eft extrême.
Mais ne vous plairez-vous qu'aux fureurs des amans,
A leurs pleurs, à leur joie, à leurs emportemens?
N'eft-il point d'autres coups pour ébranler une ame?
Sans les flambeaux d'amour, il eft des traits de flamme;
Il eft des fentimens, des vertus, des malheurs
Qui d'un cœur élevé favent tirer des pleurs.
Aux fublimes accens des chantres de la Grèce

On s'attendrit en homme, on pleure fans faibleffe;
Mais pour fuivre les pas de ces premiers auteurs,
De ce fpectacle utile, illuftres inventeurs,
Il faudrait pouvoir joindre en fa fougue tragique,
L'élégance moderne avec la force antique.
D'un œil critique et jufte il faut s'examiner,
Se corriger cent fois, ne se rien pardonner;
Et foi-même avec fruit fe jugeant par avance
Par fes févérités gagner votre indulgence.

ERIPHYLE, Reine d'Argos.
ALCMEON, fils inconnu d'Amphiarais et

d'Eriphyle.

HERMOGIDE, Prince du Sang d'Argos. LE GRAND-PRETRE de Jupiter. POLEMON, Officier de la maifon de la Reine.

THEANDRE, cru père d'Alcméon.

ZELONIDE, Confidente d'Eriphyle.
EUPHORBE, Confident d'Hermogide
L'Ombre d'Amphiarais.

Suite de la Reine.

Suite du Grand-Prêtre.

Soldats de la fuite d'Alcméon.
Soldats de la fuite d'Hermogide.

Chœur d'Argiens.

La Scène eft à Argos.

TRAGEDI E.

ACTE

PREMIER.

SCENE PREMIERE.

LE GRAND-PRETRE, THEANDRE, Suite du Grand - Prêtre.

LE GRAND-PRETRE.

ALLEZ, Miniftres faints, annoncez à la terre

La juftice du ciel et la fin de la guerre.

Des pompes de la paix que ces murs foient parés.

Quelle paix! Dieux vengeurs!

Théandre, demeurez.

Le fort va s'accomplir: la fageffe éternelle
A béni de vos foins la piété fidelle.
Alcméon déformais eft le foutien d'Argos;

La victoire a fuivi le char de ce héros ;

Et lorfque devant lui deux rois vaincus fléchiffent,
De fa gloire fur vous les rayons rejailliffent:
Alcméon dans Argos paffe pour votre fils.

THE ANDRE.

Depuis qu'entre mes mains cet enfant fut remis,
Ses vertus m'ont donné des entrailles de père.
Je m'indigne en fecret de fon deftin févère;
J'ofe accufer des dieux l'irrévocable loi
Qui le fit naître efclave avec l'ame d'un roi ;
Qui fe plut à produire au sein de la baffeffe
Le plus grand des héros dont s'honora la Grèce. ·

LE GRAND

·

PRETRE.

Aux yeux des immortels et devant leur fplendeur, Il n'eft point de baffeffe, il n'eft point de grandeur. Le plus vil des humains, le roi le plus augufte, Tout eft égal pour eux; rien n'est grand que le juste. Quels que foient fes aïeux, les deftins aujourd'hui De leurs ordres facrés fe repofent fur lui. Songez à cet oracle, à cette loi fuprême Que la reine autrefois a reçu des Dieux même: Lorfqu'en un même jour deux rois feront vaincus, Tes mains prépareront un fecond hyménée: *Ces temps, ce jour affreux feront la deftinée Et des peuples d'Argos, et du fang d'Inachus. Ce jour est arrivé. Votre élève intrépide A vaincu les deux rois de Pilos et d'Elide. Tous vos chefs divifés qui défolaient Argos, Ce puiffant Hermogide et tous ces rois rivaux, Dans une ombre de paix ont affoupi leur haine ; Ils ont remis leur fort à la voix de la reine; Et l'hymen d'Eriphyle eft bientôt déclaré. Vous, fi du dernier roi le nom vous eft facré ; D'Amphiaraus encor fi vous aimez la gloire, Si ce roi malheureux vit dans votre mémoire, Dans le cœur d'Alcméon gravez ces fentimens : Conduifez fa vertu..., mais tremblez ...

THE ANDRE.

Que nous annoncez-vous !

LE

Dieux puiffans!

GRAND-PRETRE.

1 Voici le jour peut-être

Qui va redemander le fang de votre maître.

La vengeance implacable, et qui marche à pas lens, Defcend du haut des cieux après plus de quinze ans.

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