personnelle, on y supplée par deux méthodes contraires : l'une consiste à exagérer l'importance du capital réalisé et place toutes les ressources sociales entre les mains de l'administration; l'autre consiste à restreindre aux plus étroites limites le capital versé par les actionnaires et à s'appuyer sur la garantie d'un capital jamais appelé, mais toujours exigible. La seconde méthode, imitée du système anglais, est incomparablement la plus logique et la plus féconde, puisque, d'une part, elle substitue une responsabilité limitée à une irresponsabilité absolue, le concours du crédit à celui du capital effectif; d'autre part, elle augmente virtuellement la somme totale des bénéfices et la proportionnalité de leur répartition. Ces vérités bien comprises et appliquées avec discernement doivent éclairer nos lecteurs à travers les statistiques, comptes rendus, prospectus et autres manifestations financières qui les intéressent à des degrés divers. Mais notre but ne serait pas atteint, si nous n'avions le sentiment d'avoir posé les vrais principes d'une science dont nous pouvons tirer la conséquence, laissant à d'autres le soin d'en développer toutes les perspectives économiques et sociales. Nous avons constaté la supériorité de nombre, de forme, de fonction et de résultat des institutions anglaises sur les institutions françaises; est-ce à dire que dans notre pays les agents du crédit se laissent devancer par ignorance et par impuissance? Non assurément. Sans doute, nous ne choisirons pas pour types de nos financiers ces personnages éphémères et douteux dont la perpétuelle mise en scène ne saurait dissimuler longtemps ni les mécomptes financiers, ni l'industrialisme vulgaire; mais nous comptons en France, plus peut-être qu'en Angleterre, des esprits hardis et sages, génies créateurs et initiateurs de toutes les grandes choses enfantées par le crédit. Si la pratique des banques ne correspond pas exactement chez nous à la théorie rationnelle et universelle de la science financière, nous ne devons pas craindre de le dire nettement après l'avoir déjà démontré; et, pour mieux résumer encore notre pensée dans une antithèse saisissante de vérité, nous dirons : En Angleterre, le régime fécond de liberté financière, conséquence d'autres franchises, est protégé par une responsabilité, excessive peutêtre, mais salutaire. En France, le régime abusif du privilége des banques, conséquence du principe d'autorité exagérée, est rendu plus dangereux encore par l'irresponsabilité des sociétés anonymes. Concluons. Les grands principes de liberté et de responsabilité apparaissent infailliblement au terme de toutes les théories sociales et morales comme étant l'expression du progrès et de la vérité. Si nous arrivons - à la même conclusion dans cette étude essentiellement pratique, il faut y voir, non pas seulement un criterium abstrait et doctrinal, mais bien la manifestation d'une nouvelle et consolante harmonie dans le code des lois économiques. PIERRE VOSGIEN. |