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Il faut écrire les vies de Saints, comme j'ai dit, avec amour, si on veut qu'elles aient de l'intérêt et du charme, et qu'elles soient utiles aux âmes.

C'est parce que M. de Montalembert a écrit avec amour sa vie de sainte Élisabeth qu'il a su si bien restituer et reproduire la douce et pure figure de la chère Sainte, et que des milliers de lecteurs ont béni devant Dieu son œuvre.

Avec amour, ai-je dit, et j'ajouterai, par là même avec piété, c'est-à-dire avec l'amour du Saint et avec l'amour de Dieu, avec la connaissance des choses de Dieu et le respect d'un cœur chrétien pour les mystères de la vie surnaturelle.

Il y a dans la vie des Saints des secrets entre eux et Dieu, qu'on ne peut pas même comprendre, sans être initié soi-même à ces choses, du moins par un tendre respect; ou plutôt la vie des Saints n'est pas autre chose qu'une série de tels rapports.

Donc ici l'imagination du romancier ne suffit pas, encore moins que le talent de l'écrivain: il faut de plus la piété. Ce n'est pas que je veuille bannir d'une vie de Saint l'art et le style; mais, quelque art merveilleux qu'on puisse avoir, on n'est pas fait pour écrire une vie de Saint, si on ne sait pas ce que c'est que la vie sainte; et on ne le sait guère qu'à proportion de son amour et de son admiration pour les vertus des Saints.

Pourquoi les vies de Saints écrites par leurs disciples ont-elles d'ordinaire tant de charme? C'est qu'elles remplissent les deux conditions que je réclame: elles sont écrites avec amour et avec grande piété.

Voilà pourquoi la Vie de saint Vincent de Paul, par Louis Abelly, la Vie de sainte Chantal, par la mère de Chaugy, ont un charme qu'il est bien difficile de surpasser ou même d'égaler.

Le Saint, la Sainte, ont passé dans ces pages simples, naïves, suaves; on ne voit, on n'entend qu'eux en lisant ces Vies.

C'est pour cela encore que la Vie de saint Liguori, par le père Tannoia, malgré ses longueurs, se fait lire avec tant d'attrait.

Ce parfum de vérité, de simplicité, de piété, fait supporter les défauts même d'un style inélégant: on n'y pense pas, tant le Saint occupe. Mais un genre nouveau et bien différent a paru de nos jours sur le motif spécieux de rendre agréable aux gens du monde la vie des Saints, quelques personnes ont pensé qu'il fallait l'écrire à la façon des romans, sous une forme dramatique, avec de longs dialogues. Cette méthode, qui expose perpétuellement l'écrivain à prêter au Saint des sentiments qu'il n'a jamais eus, des paroles qu'il n'a jamais dites, et à se substituer sans cesse à lui, est tout simplement détestable, et serait, si elle devenait générale, un fléau.

Ce ne sont pas les vies des Saints qu'il faut accommoder, en les

altérant, au goût des gens du monde; ce sont les gens du monde qu'il faut amener à goûter les vies des Saints, en les leur présentant avec le seul charme qui leur convienne, qui est la vérité, la simplicité et la piété.

Oh! qui nous donnera de véritables historiens de nos Saints? Que je souhaiterais voir s'élever une école, une association d'écrivains catholiques, soit religieux, soit laïques, pour écrire la vie des Saints, selon la méthode que je viens de dire, avec amour et piété ! Une vie de Saint ainsi écrite fait tant de bien à ceux qui la lisent! Pour moi, je ne connais rien qui me semble plus capable de consoler les âmes chrétiennes, de fortifier les cœurs faibles, d'attirer à la religion ceux que le malheur des temps en a éloignés. L'histoire de ces grandes âmes, les meilleures, les plus nobles, les plus tendres et les plus fortes, que l'humanité ait produites, serait la plus belle démonstration de la divinité du christianisme, la plus magnifique apologie de la piété. Cela nous manque étrangement. Nos plus grands saints, saint Chrysostome, saint Basile, saint Grégoire, saint Ambroise, saint Augustin, saint Léon, saint Grégoire le Grand et tant d'autres, attendent encore leurs historiens.

Voilà les vies qu'il faudrait écrire avec amour, avec piété:

Avec science sans doute, mais sans substituer la sience archéologique à l'amour;

Avec art et avec style sans doute aussi, mais en restant toujours, c'est ici le grand art et le grand style, dans la vérité, dans la simplicité, dans la naïveté, dans la piété;

Avec esprit sans doute encore, mais se souvenant qu'il y a trois sortes d'esprit le bel esprit, le bon esprit, le grand esprit, et qu'ici le bel esprit n'avance pas à grand'chose; il faut le bon, le grand esprit, éclairé, enflammé par l'amour.

Mais c'est assez. Je m'aperçois en finissant que je n'ai pas dit un mot du style de M. de Montalembert: cet oubli est un éloge. C'est une preuve que l'écrivain s'est tellement oublié lui-même, qu'il a réussi à n'occuper que de son sujet. Au reste, je n'ai rien à dire ici de ce qu'on appelle, à proprement parler, le style: j'ai tout dit sur ce point en parlant du caractère et de l'âme de M. de Montalembert; c'est à la noblesse et à la générosité de son âme qu'il doit ses grandes qualités d'écrivain, cette fière énergie, cette noble simplicité, et quelquefois cette tendresse, cette délicatesse, cette grâce touchante qui s'allie si bien en lui à la plus mâle fermeté. Son âme a passé tout entière dans son style; c'est lui-même : jene saurais ni plus nimieux dire.

† Féux, évêque d'Orléans.

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Le Correspondant doit un douloureux et reconnaissant hommage à la mémoire d'un chrétien aussi humble de cœur que distingué par sa position et sa naissance, et qui vient de disparaître du milieu de nous sans que son nom ait été prononcé par un seul des organes de la presse. Le nom de M. le comte Alain de Kergorlay peut être inconnu d'un grand nombre de nos lecteurs, et ils ne savent pas que c'est un des hommes qui, avec le plus complet dévouement, les plus réels et les plus persévérants sacrifices, ont fondé, soutenu, encouragé notre œuvre. Le nom de M. de Kergorlay peut être inconnu même à bon nombre de ceux qui, dans Paris, s'occupent le plus entièrement des œuvres de charité, et ils ne savent pas qu'il a été pour toutes ces œuvres un ami actif et zélé, pour quelques-unes, des plus utiles et des plus délaissées, un promoteur ardent autant que modeste, qui les a fait vivre, les a défendues, les a sauvées, non pas seulement avec dévouement, mais avec abnégation, en s'oubliant soi-même au point de se faire oublier par autrui. M. de Kergorlay était plein d'une instruction abondante et diverse; il avait beaucoup lu et beaucoup étudié, et, pardessus tout, ce qui intéresse la défense de notre foi; il avait même écrit bien des pages, et cependant, même dans notre recueil, auquel il portait un si vif intérêt, il n'a jamais fait imprimer une ligne. C'est qu'il possédait au plus haut degré, non-seulement l'art de faire le bien, mais l'art de le faire avec le moins de bruit et le moins de retentissement possible. Ses bonnes œuvres en tout

genre étaient multipliées, mais toujours anonymes; il n'en est tenu note qu'au livre de vie. De telles vertus n'ont pour récompense ni la renommée contemporaine ni la renommée posthume; la publicité ne va pas à elles, et elles aiment à penser à leur dernière heure que nul bruit ne se fera sur leur tombeau. Nous rompons cependant ce silence; nous avons besoin de dire que M. de Kergorlay a aimé notre œuvre, non comme œuvre littéraire ou politique, mais exclusivement comme œuvre chrétienne, et qu'à un certain moment où le Correspondant était menacé dans son existence, il a bien voulu, avec sa simplicité tout amicale et toute chrétienne, prendre la modeste situation de gérant de notre recueil. C'était de ces services comme il aimait à les rendre, sûr que le monde n'en ferait point de bruit et que son amourpropre ne s'en targuerait pas. En ce genre, il en a rendu bien d'autres que nous connaissons, et bien d'autres certainement que nous ne connaissons pas. Chrétien en tout et partout, humble chrétien, mais chrétien ardent et vigoureux, incapable de s'enorgueillir, mais incapable aussi de faiblesse, ayant au milieu des défaillances et des ombrages du scepticisme moderne toute la simplicité et la fermeté de la foi primitive, il mériterait bien d'autres éloges; mais une publicité trop bruyante n'irait pas à cette mémoire. On nous pardonnera ces lignes, destinées seulement à rappeler que cet ami de Dieu fut aussi le plus dévoué de nos amis.

Le secrétaire de la Rédaction,

P. DOUHAIRE.

MÉLANGES

EXÉGÈSE

INTRODUCTION HISTORIQUE ET CRITIQUE AUX LIVRES DU NOUVEAU TESTAMENT, de Reithmayr, Hug, Tholuck, etc., traduite et annotée par H. DE VALROGER, prêtre de P'Oratoire. 2 vol. in-8, Paris, J. Lecoffre.

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C'est sous ce titre que va paraître très-prochainement un ouvrage dont l'utilité et l'à-propos ne seront contestés par personne. Les lecteurs du Correspondant se féliciteront d'apprendre qu'un des anciens collaborateurs de ce recueil a réalisé avec le talent et la conscience qu'ils lui connaissent une œuvre réclamée par les catholiques de France.

Sous prétexte de nous faire connaître l'Allemagne, on publie chez nous depuis quelque temps, avec la partialité des sectaires, les attaques dirigées contre la Bible par les adversaires les plus décidés de sa divine autorité; mais on ne nous entretient jamais des réponses faites à ces attaques. Cependant il y a en Allemagne des catholiques aussi bien que des protestants. S'il existe au delà du Rhin des incrédules, on y trouve aussi des croyants. Comment se fait-il que dans une Revue qui ne s'appelle ni Revue de Tubingue, ni Revue de Zurich ou d'Heidelberg, mais bien Revue germanique, il soit, quand il s'agit du Nouveau Testament, sans cesse question de ces universités et si rarement ou même nullement des autres? Les universités catholiques, manquant à tous leurs devoirs, resteraient-elles muettes devant leurs sœurs rivales? Les professeurs orthodoxes ne répondent-ils point aux professeurs incrédules?

Le P. de Valroger vient nous montrer que les universités catholiques de Munich, de Fribourg, et des exégèles croyants et sincères comme Tholuck, Olshausen, etc., n'ont point failli à leur tâche; il nous

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