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que fois plufieurs actions fur le Théâtre, on repréfente dans la même piece la mort de Céfar

& la bataille de Philippes. Nos mufas colimus Severiores..

»>Qu'en un lieu, qu'en un jour, un feul fait accompli » Tienne jusqu'à la fin le Théâtte rempli.

Boileau.

L'interruption eft néceffaire dans l'histoire, admife dans le Poême épique, dont la longueur exige de la variété; réprouvée dans la Tragedie qui ne doit présenter qu'un objet, quoique réfultant de plufieurs objets, qu'une paffion dominante, qu'un intérêt principal. L'unité en tout y eft une Loi fondamentale.

C'est d'ordinaire un grand défaut dans une piece foit tragique, foit comique, qu'un perfonnage paraiffe, fans rapeller les premiers fentimens & les premiers deffeins qu'il a d'abord annoncés; c'est rompre l'unité de deffein qui doit regner dans tout l'ouvrage.

Confervez l'unité dans le caractère, mais variz-là par mille nuances, tantôt par des foupçons, par des craintes, par des espérances, par des reconciliations & des tantôt par ruptures, tantôt un incident qui donne à tout une face nouvelle. Les perfonnages doivent toujours conserver leur caractere, mais non pas dire toujours les

mêmes choses. L'unité de caractère n'eft belle que par la variété des idées.

§. II.

De la conduite des Scenes.

Il doit y avoir une conduite dans chaque Scene, comme dans le total de la Piece.

Toutes les fois qu'un Acteur entre ou fort du Théâtre, l'art exige que le fpectateur foit instruit des motifs qui l'y déterminent.

Corneille eft le premier qui ait pratiqué cette regle fi belle & fi néceffaire de lier les fcenes, & de ne faire paraître fur le Théâtre aucun perfonnage fans une raifon évidente.

Les perfonnages importans doivent toujours avoir une raifon d'entrer & de fortir; & quand cette raison n'eft pas affez déterminée, il faut qu'ils fe donnent bien de garde de dire, je fors, de peur que le Spectateur, trop averti de la faute, ne dife: Pourquoi fortez-vous?

Plus il eft difficile de lier toutes les fcenes d'une Tragédie, plus cette difficulté vaincue a de mérite; mais il ne faut pas la furmonter aux dépens de la vraisemblance & de l'intérêt. C'eft un des fecrets de ce grand art de la Tragédie, inconnu encor à la plupart de ceux qui l'exercent.

§. III.

Du Dialogue.

L'art du Dialogue confifte à faire dire à ceux qu'on fait parler, ce qu'ils doivent en effet fe dire. N'est-ce que cela me répondra-t-on? Non, il n'y a pas d'autre fecret; mais ce fecret eft le plus difficile de tous. Il fuppofe un homme qui a affez d'imagination pour fe transformer en ceux qu'il fait parler, affez de jugement pour ne mettre dans leur bouche que ce qui convient, & affez d'art pour intéreffer.

Le premier genre du Dialogue, fans contredit, eft celui de la Tragédie. Car non-feulement il y a une extrême difficulté à faire parler des Princes convenablement; mais la Poëfie noble & naturelle qui doit animer ce dialogue, eft encor la chofe du monde la plus rare.

Le Dialogue eft plus aifé en Comédie; & cela eft fi vrai, que prefque tous les Acteurs comiques dialoguent affez bien. Il n'en eft pas ainfi dans la haute Poëfie. Corneille lui-même, ne dialogue point comme il faut dans huit ou neuf Pieces. Ce font de longs raifonnemens embarraffés vous n'y retrouvez point ce dialogue

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LE CID.

»Ton malheureux Amant aura bien moins de peine

»A mourir de ta main, qu'à vivre avec ta haine.

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>>Crains-tu fi peu la honte, & fi peu les faux bruits? &c.

Le chef-d'œuvre du Dialogue eft encor une fcene dans les Horaces.

HORACE.

Allec vous a nommé. Je ne vous connais plus.

CURIACE.

>>Je vous connais encor, & c'est ce qui me tue. &c.

Peu d'Auteurs ont fçu imiter les éclairs vifs de ce Dialogue preffant & entrecoupé. La tendre moleffe, & l'élégance abondante de Racine, n'a guéres de ces traits de répartie & de replique en deux ou trois mots, qui reffemblent à des coups d'efcrime, pouffés & parés prefqu'en mê

me tems.

On n'en trouve guéres d'exemple que dans l'@dipe nouveau,

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Il y a cent autres beautés de Dialogues, dans le peu de bonnes pieces qu'a données Corneille: & toutes celles de Racine, depuis Andromaque, en font des exemples continuels.

Les autres Auteurs n'ont point ainfi l'art de faire parler leurs Acteurs. Ils ne s'entendent point; ils ne fe répondent point, pour la plûpart. Ils manquent de cette logique fecrette, qui doit être l'ame

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