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Qui porte des depuis dimanche
Sur le bonnet la plume blanche.
Vous sçavez bien à quel dessein
Il fust mardy à Saint-Germain :
Il revint hier, et mainte glose
Se faict sur la métamorphose
Du bon prince dont l'on discourt
Jusqu'au fond de la basse-cour:
En Allemagne il va grand'erre ;
Les soldats parlent de la guerre,
Les financiers n'en sont d'avis.
Après maints discordants devis,
Je sçaurois bien que vous en dire:
Pour moy, je me doubte de pire.
Toutesfois pour bien prospérer
Faut en Dieu toujours espérer,
Et me remets à la fortune

Qui, plus qu'une putain commune,
S'abandonne, en sorte qu'on voit
Bien souvent condamner le droit,
Le vice absout, et l'innocence
S'attacher à une potence.
Par traité tout se finira,
Mars à la fin se desdira;

Les gouvernants de ce navire

Nous pourront bien donner du pire,
Car c'est d'eux dont la paix despend,
Le but à chascun y prêtant.
Toutesfois, quoique l'on discoure,
Vous sçavez bien qu'au laisser-courre
Nul chasseur, tant expert soit-il,
D'esprit et d'adresse subtil,
Qui puisse assurer qu'à la chasse
On prenne ce que l'on pourchasse
Les générales actions,

Encore que les passions

Des princes y soient attachées,
De mesme elles sont recherchées
Et rien ne se passe icy-bas
Qui ne soit reglé par compas.
C'est pourquoy ce seroit sottise
De discourir de l'entreprise,
Puisque tout consiste au destin,
Qui n'entend ni grec ni latin,
Et ne laisse par prescience
D'avoir une bonne science.

Et pour moy qui n'en sçois pas tant,
De peu d'esprit je suis content,
Pourveu que j'en aye à bien dire.
Que le Turk perde son empire,
Long discours pour monsieur Servin ';
Dimanche le goust du bon vin,
Le bon Panas sa vieille robe,
Et Claude son vieux garde-robe;
Que je perde l'affection
D'estre avec toute passion,
Sans réserve et aucune envie,

Vostre valet toute ma vie.

XIII

RÉPONSE A LA LETTRE D'UN AMI, AN 1612

(INÉDITE)

J'ay leu, Monsieur, vos vers beaux à merveilles

1. Probablement Abel Servien, qui devint, en 1616, procureur général, puis marquis de Sablé, ministre d'État, surintendant des finances, chevalier des ordres, et mourut en 1659.

Où vous tenez le loup par les oreilles,
Et suis fasché qu'il ne me soit permis,
Ainsy que vous, d'estre avec mes amis.

Mais de par Dieu, tost ou tard, quoiqu'on die,
Je mettray fin à ceste comédie.

Cela soit dit à ce point ne dis mot!
Je suis icy à baiser le marmot,

Crotté, mouillé, rosdant de rue en rue
Et sur un pied faisant souvent la grüe,
En attendant d'un courtisan nier (?)
Ou d'un seigneur un froid bonadier,
Dont au logis je fais le petit conte
Et fais rougir telles gens de leur honte;
Puis je me mets pensif à rêvasser
Car je ne sçay sur quel pied danser;
Mille raisons hurlu-berlu m'assaillent

Et après quoy tous mes sens se travaillent ;
Et de pensers je suis plus agité

Qu'un grand vaisseau par l'orage emporté :
Estant au port, je ne puis pas trouver
De ce naufrage un ais pour me sauver.
Allez, mon cœur, porter contre la foudre;
Sainte vertu, pour Dieu, fais-moy résouldre,
Rends mon esprit de vigueur animé,
Et du malheur, Seigneur, libera me.
Et pour changer et de gamme et de note,
Laissant à part la cage et la linotte,
Je vous promets de vous revoir en peu,
Car j'ay toujours les pieds dedans le feu,
Lorsque je suis sans vous voir et vous dire
Qu'absent de vous je me fonds comme cire.
Je suis joyeux du soin que vous avez
De recouvrer le filon que sçavez:

J'aymeray mieux une telle trouvaille

Qu'avoir deffaict le grand turk en bataille.

XIV

LETTRE DE L'ANNÉE 1609

(INÉDITE)

Tout bègue foutu que je suis
Je vous escris ce que je puis:
Estant ce que dire je n'ose
Je ne puis pas faire grand'chose;
Il est pourtant vray, ce dit-on,
Suivant le discours de Platon,
Qu'il n'est rien si nécessaire
Que de peu parler et bien faire :
Aussy si bien vous y pensez,
Qui fait ce qu'il peut fait assez :
J'ay tant fait choses en jeunesse
Qui ait despleu à cette anesse
Qui parla le dernier de l'an
A ce vieux prophète Balan,
Que je n'ay poitrail ny croupière
Qui n'en soit devant derrière;
Les Quinze-Vingt n'ont jamais veu
Homme de sens si bien pourveu.

FIN DES LETTRES.

IV

ÉLÉGIES

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