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libre arbitre de l'homme ne confiftoit pas dans le pou voir de faire ou de ne pas faire une chofe, mais feulement dans l'exemption de toute violence. Ces opinions furent adoptées par plufieurs théologiens; mais elles furent attaquées par le plus grand nombre, & la Faculté de Louvain les condamna. Ce jugement fut une fource de difputes vives & fréquentes entre les deux partis. Enfin on recueillit, des écrits & des difcours de Baïus, foixante-feize propofitions, qui ne faifoient que développer le systême que nous venons d'expofer; on les envoya au tribunal du pape Pie V, qui les condamna par une bulle dans laquelle il s'exprime ainfi : Lefquelles propofitions mûrement examinées »notre préfence, quoiqu'à la vérité il y en ait quelques-unes qu'on puiffe foutenir en quelque forte, » prifes néanmoins dans la rigueur & dans le fens » propre des termes de leurs auteurs, nous les condam» nons, &c. Ce jugement, confirmé depuis par Grégoire XIII & par Urbain VIII, n'eut pas l'effet qu'on avoit droit d'attendre en ce cas. Il ne fervit qu'à envenimer la querelle, & à augmenter l'animofité entre les deux partis. Sur des matieres auffi délicates & auffi épineufes que le font celles de la Grace & de la Liberté, on pouvoit combattre éternellement, fans qu'on fçût à la fin lequel avoit raison. Le grand point de la queftion étoit de fçavoir quel avoit été fur ces matieres le véritable sentiment de S. Auguftin; car les deux partis prétendoient ne parler que d'après ce faint docteur. C'est du milieu de ces difputes qu'on vit éclore le célebre fyftême connu fous le nom de JANSÉNISME.

BAIRAM. C'eft le nom des deux feules fêtes que les Musulmans aient dans leur religion; je dis des deux feules fêtes, parce qu'elles font les feules prefcrites par l'Alcoran : les autres paffent moins pour des devoirs d'obligation, que pour des pratiques pieufes, & ne font, felon eux, que pour éprouver l'obéiflance & la fidélité des Croyants dans des points plus effentiels. Tel eft le Meuloud, ou la naiffance de Mahomet. Tel eft encore le vendredi, que nous regardons

comme le dimanche des Musulmans, dont toute la folemnité confifte à aller faire, fi on le peut, une courte priere, le matin, à la mofquée ; ce qui n'empêche pas de travailler le refte du jour, ou de

vaquer fes affaires. Il n'en est pas ainsi des deux Bairams. Ce font des fêtes mobiles, qui, dans l'espace de trente-trois ans, tombent dans toutes les faisons & dans tous les mois de l'année, parce que l'année Mufulmane eft lunaire, & avance tous les ans d'onze jours. La premiere de ces fêtes arrive le premier de la lune qui fuit celle de Ramadan, pendant laquelle eft leur carême. Qu'il me foit permis de reprendre la defcription que j'en ai faite ailleurs *. Auffi-tôt que les perfonnes chargées d'observer la nouvelle lune ont rapporté qu'elles ont vu le croiffant, tous les canons du férail & de l'arfenal fe font entendre. A ce fignal, les travaux ou le fommeil font interrompus. Il n'eft plus queftion de jeûne, & l'on ne fonge par-tout qu'à fe réjouir. Le Grand-Seigneur lui-même prend part à l'alegreffe publique. Ses appartements font alors magnifiquement ornés. Affis fur fon trône, il reçoit les vœux & les préfents des grands de fa cour; & c'eft ordinairement ce jour-là qu'il diftribue fes graces & ses bienfaits.... Cette fête du Bairam, qui dure trois jours, tient tout à-la-fois de la Pâque des Juifs, de notre carnaval & de notre premier jour de l'an. Les dévots d'entre les Turcs s'affemblent, le matin, dans les mofquées, où l'on fait les prieres publiques plus longues qu'à l'ordinaire. Les Imans y lifent plufieurs chapitres de l'Alcoran, fur-tout ceux qui traitent de la paix & de l'union. Ils accompagnent ces lectures de fermons, dont le fujet, dans ce temps, eft toujours l'amitié fraternelle & le pardon des injures. Touchés de ces exhortations, on voit les auditeurs s'embraffer les uns les autres, fe fouhaiter réciproquement toutes fortes de biens, & s'inviter à fe réjouir au fortir de la mofquée; ce qu'ils ne manquent jamais de faire. La même

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Abrégé chronologique de l'Hiftoire Ottomane.

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chofe fe pratique dans les rues & dans les maifons, où chacun fe fait & s'envoie des préfents. A l'exemple des Juifs, ils tuent, dans chaque famille, un mouton qu'ils appellent l'agneau pafcal, & qu'ils mangent avec beaucoup de folemnité. Les excès de débauche fuivent ce feftin, qui fe renouvelle les deux jours fui

vants.

Le fecond Bairam arrive foixante & dix jours après le premier. C'est le plus folemnel, fuivant l'auteur des Rits & Cérémonies de la Mecque, quoique la plûpart des auteurs Européens prétendent le contraire, & donnent, en conféquence, à cette fête le nom de petit Bairam. Au refte, les folemnités font, à peu de chose près, les mêmes pour ces deux fêtes.

BALAAM. Voici l'hiftoire de ce prophete & de fon âneffe, telle qu'elle eft décrite au livre xxij des Nombres. Balac, roi des Moabites, voyant que les peuples voifins avoient été défaits & taillés en piéces par les Ifraélites, craignit le même fort pour les fujets & pour lui-même ; &, croyant détourner un pareil malheur, il envoya des députés à un fameux devin, nommé Balaam, en qui il avoit une grande confiance, pour lui apprendre le fujet de fes craintes, & l'inviter à venir auprès de lui pour maudire fes ennemis; car il étoit perfuadé que tous ceux que Balaam bénifloit étoient bénis, & que tous ceux qu'il maudiffoit étoient maudits. Les dépurés étant arrivés devant Balaam, & lui ayant exposé leur commiffion avec une fomme d'argent confidérable; Balaam ne leur fit pour lors aucune réponse, & les retint à loger chez lui. Pendant la nuit, il confulta le Seigneur, qui lui défendit de faire ce voyage. Ainfi, dès le lendemain, il renvoya les députés Moabites, leur difant que Dieu ne lui permettoit pas de fatisfaire le roi de Moab. Ce prince s'imagina que la fomme envoyée au prophete n'étoit pas affez confidérable, & que les députés n'étoient pas d'une affez grande qualité. Il dépêcha vers Balaam une ambaffade beaucoup plus brillante, & lui fit dire qu'il étoit prêt à lui accorder tous les biens & tous les honneurs qu'il demanderoit, pourvu qu'il voulût venir le trouver.

Quand le roi de Moab, répondit Balaam, me don» neroit de l'or & de l'argent plein fon palais, je ne » pourrois pas changer la parole du Seigneur, ni dire » autre chofe que ce qu'il me fuggérera. » Il confulta encore une feconde fois la volonté de Dieu, qui lui permit d'aller trouver Balac. Auffi-tôt il équippa fon åneffe, & partit de grand matin. Dans la route, l'ange du Seigneur, l'épée nue à la main, fe préfenta devant l'âneffe, & lui infpira une telle frayeur, qu'elle fe détourna de la grand'route, pour fe jetter å travers les champs, quoique Balaam n'épargnât pas les coups pour la faire fuivre le droit chemin. L'ange du Seigneur fe fit encore voir à l'ânesse dans un fentier étroit, entre deux murailles qui fervoient à enclorre des vignes. L'âneffe épouvantée fe colla contre une des murailles, & écrafa le pied du pauvre Balaam, qui crioit en vain & faifoit pleuvoir des coups fur l'animal rétif. L'ange s'offrit une troifieme fois aux regards de l'âneffe, dans un chemin fi étroit, qu'il n'y avoit pas moyen de fe détourner ni à droite ni à gauche. L'animal, saisi de frayeur, fe coucha par terre. Balaam irrité commença à battre cruellement fon ânesse, qui, ne pouvant plus fouffrir un fi dur traitement, ouvrit la bouche par la permiffion de Dieu, & dit à fon maître: « Que t'ai» je fait? Pourquoi me frappes-tu? Voici déja la troi» fieme fois que tu me maltraites fans raison.

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Tu

» n'as que trop mérité les coups que je te donne, »pondit Balaam; & tes caprices ont affez fatigué ma » patience. Que n'ai-je un glaive pour t'ôter la vie? --» Balaam, reprit l'âneffe, fouviens-toi de mes bons » fervices. Ne fuis-je pas depuis long-temps ta mon»ture ordinaire? Dis-moi : ai-je jamais bronché? me » fuis-je jamais écartée de la route? » Au même inftant, Dieu ouvrit les yeux de Balaam: il vit l'ange au milieu du chemin, armé de l'épée nue; &, profterné contre terre, il l'adora. « Pourquoi, lui dit l'ange, as-tu » frappé ainfi trois fois ton âneffe? Je fuis venu pour » m'oppofer à ton voyage criminel; & fi ton ânesse »prudente ne fe fût détournée, fi elle eût voulu avan» cer malgré moi, je ne lui aurois fait aucun mal; mais

» je t'aurois tué. » Balaam s'excufa fur ce qu'il n'avoit pas vu l'ange, & déclara qu'il étoit prêt à s'en retourner, fi c'étoit la volonté du Seigneur. Mais l'ange lui dit de poursuivre fa route. Balac, joyeux de l'arrivée de Balaam, le conduifit dans une ville frontiere de fon royaume, & le fit monter fur une tour élevée, d'où l'on découvroit une partie de l'armée des Ifraélites. Là, aprés avoir élevé fept autels, par l'ordre de Balaam, & avoir mis fur chacun de ces autels un veau & un bélier, il attendit que l'efprit de Dieu s'emparât de Balaam. Tous les feigneurs de Moab, rangés autour de lui, étoient en fufpens fur ce que le prophete alloit dire, lorfqu'à leur grand étonnement, Balaam s'écria: « Comment pourrois-je maudire ceux que le Seigneur » n'a pas maudits? Heureux enfants de Jacob! vous êtes aufli nombreux que les grains de pouffiere que le » vent fait voler dans les campagnes. Qui pourroit » fçavoir le nombre des guerriers d'Ifraël? Que mon »ame meure de la mort des juftes! & que ma fin >> reffemble à la vôtre ! » Balac irrité lui dit : « Que fai»tes vous, Balaam? Je vous ai fait venir pour maudire » mes ennemis, & voilà que vous les béniffez! Je ne » puis dire autre chofe que ce que le Seigneur m'inspire, » lui répondit Balaam. » Balac le mena dans un autre endroit, où il efpéroit qu'il maudiroit les Ifraélites; mais il fut trompé une feconde fois dans fon efpérance, Balaam n'ouvrit la bouche que pour chanter les louanges & célébrer la gloire du peuple d'Ifraël. Balac chagrin, fit au prophete les mêmes reproches que la premiere fois, & en reçut la même réponse. Il ne fe rebuta cependant point, & voulut faire une troisieme tentative. I conduifit Balaam fur le fommet de la montagne de Phogor; prépara les autels & les victimes, & n'oublia rien de toutes les cérémonies néceffaires, fe flattant que, peut-être à cette fois, la malédiction auroit lieu; mais il penfa crever de dépit, lorfqu'il entendit Balaam faire un éloge plus pompeux que jamais des Ifraélites, & leur annoncer les plus brillantes victoires. Il frappa des mains, & éclata en invectives contre Balaam. « J'a» vois résolu, lui dit-il, de te combler de biens &

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