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outragée qu'elle veut garantir on dirait qu'elle ne combat que pour la cause de l'homme, de Dieu et de son Église. C'est que la France est catholique, c'est-àdire qu'elle reconnaît le Pouvoir suprême de l'Église qui veille au maintien d'un droit des gens ayant le christianisme pour règle et pour base.

C'est donc dans le catholicisme que la France puise la force de son ascendant moral, l'élévation de ses vues, le désintéressement de ses transactions, la justice de sa diplomatie et la grandeur de son désintéressement, dans ses relations ou rapports avec les autres nations. Imaginez la France retombée dans l'état de ses démences sacriléges de 93 et rompant tout à fait avec le catholicisme et avec son chef, que deviendrait-elle ? Elle deviendrait ce qu'elle fut alors le fléau et la honte du genre humain!

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Bien plus à la suite des ravages que, sorti du sein du protestantisme, le césarisme a exercés dans les contrées catholiques, et des injustes défiances qu'il est parvenu à faire partager à leurs Chefs à l'égard du Chef de l'Église, les peuples mêmes demeurés fidèles au catholicisme ne tiennent au Souverain Pontife que tout juste autant qu'il est nécessaire pour ne pas être rejetés hors du giron de l'Église. Le Pape est donc toujours pour eux le Docteur des Docteurs, l'Interprète infaillible du dogme et de la morale de l'Évangile, et la source de toute juridiction spirituelle sur les âmes; mais il n'y jouit presque plus d'aucune autorité dans l'ordre international et politique, et, par le fait, il n'est plus le Chef souverain de la grande république chrétienne. Mais point de chef, point de société. S'étant donc privées elles-mêmes de leur chef naturel, au point de vue diplo

matique, les nations catholiques tiennent, il est vrai, à l'Église, elles sont dans l'Église, mais elles ne forment pas, elles non plus, une société spéciale sous les lois particulières du christianisme appliquées aux relations ou rapports des nations entre elles; et de là l'impossibilité de s'entendre pour atteindre, d'un commun accord, un but commun non-seulement international et politique, mais aussi civilisateur et religieux. Elles ne pourront jamais rien faire de pareil qu'en marchant à la suite de l'étendard de la croix; mais cet étendard demande un Chef qui l'arbore et le montre à leur dévouement et à leur foi, et ce chef n'est et ne peut être que le Pape. Point de croisades donc, même pour les nations catholiques, sans le Pape. La dernière fois que l'Europe catholique se leva comme un seul homme contre la barbarie, ce fut dans la guerre contre le croissant à la fin du seizième siècle, guerre la plus juste par ses motifs, la plus glorieuse par ses faits, et la plus utile à l'Europe par ses résultats ; car triomphantes de l'orgueil ottoman, par terre sous les murs de Vienne, et par mer à la grande journée de Lépante, les armes chrétiennes décidèrent une fois pour toutes la question de la supériorité du christianisme sur l'islamisme, même au point de vue de la force matérielle; et c'est de cette époque que date la décadence de l'empire ottoman, et cet état de dégradation et de faiblesse auquel on le voit maintenant réduit. Mais ces éclatants succès n'ont été obtenus que parce que la voix du Pape, en tant que chef de la république chrétienne, était encore écoutée; en sorte qu'il a pu mander le plus grand héros de la Pologne et ses invincibles phalanges au secours de la métropole de l'empire chrétien, et former, avec les forces navales

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des puissances catholiques, la flotte la plus formidable que la mer étonnée ait jamais vue sous le drapeau de la croix.

Ainsi donc, tant qu'on ne reviendra pas à l'ancien droit public de l'Europe chrétienne, qui plaçait le Chef de l'Église à la tête des nations catholiques; tant qu'on n'acceptera pas ce puissant moyen d'union entre elles; tant qu'on ne se rangera pas sous ce Pouvoir divinement autorisé, ces nations ne formeront jamais une société spéciale, n'accompliront jamais rien de grand et de durable pour améliorer le sort de l'humanité.

Telle est la nécessité de rappeler le Pouvoir religieux à la tête des nations chrétiennes, pour en former une société spéciale, et d'écouter sa voix pour rester fidèle au vrai droit des gens, et assurer au monde les avantages de la terre, sans l'exposer à perdre les biens du ciel.

$9. Digression sur le projet d'une nouvelle croisade des nations catholiques pour aller conquérir l'Asie à la civilisation chrétienne. - Importance de ce projet et éloge de son auteur. —— Première difficulté à ce qu'on le réalise, sortant de ce fait que, quel que soit le catholicisme des princes, leurs gouvernements ne sont pas plus catholiques que leurs peuples, en tant que peuples. Deuxième difficulté à laquelle donne lieu l'esprit de défiance de ces mêmes gouvernements à l'égard du chef de l'Église, sans lequel on ne peut marcher dans les voies du catholicisme. Ces difficultés reconnues même par les honorables partisans de ce projet. En les signalant ici, on n'a prétendu qu'engager ces mêmes partisans à les combattre. Cette discussion répand une lumière nouvelle sur le sujet de ce chapitre.

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Sur ces données, on verra ce qu'on doit penser de ce noble projet, que le plus fort, le plus éloquent et le

plus zélé parmi les publicistes du catholicisme vient de proposer à l'Europe catholique de s'entendre et de se lever pour aller conquérir l'Asie païenne au christianisme et à la civilisation (1). Cet éminent publiciste a certainement rendu un immense service à la cause des peuples malheureux, plongés dans les ténèbres et assis à l'ombre de la mort, en excitant les souverains catholiques à vouloir bien prendre leur part dans le partage du monde païen, pour la rendre et la soumettre à Jésus-Christ. De nos jours on n'a rien écrit de plus beau, de plus sérieux et de plus important au point de vue de la religion et de la politique. C'est un de ces écrits exceptionnels où l'éloquence et le charme du style le disputent à l'élévation des sentiments et à la solidité des idées, et où la vraie foi et le vrai patriotisme trouvent de quoi se consoler du dévergondage des sophismes et des blasphèmes auxquels se livrent dans ce moment, dans tous leurs écrits, les ennemis de la religion et de la Patrie.

Certainement, comme l'a remarqué un publiciste catholique de Vienne, l'un de ses honorables partisans (2), cette alliance catholique réunit toutes les qualités nécessaires à une alliance modèle, c'est-à-dire naturelle, durable, anti-révolutionnaire, charitable et ouvrant aux peuples qui y prennent part la large perspective d'un bien-être sans cesse croissant. Et le grand écrivain qui le premier de nos jours a senti ce grand besoin des nations catholiques, et en a montré l'im

(1) M. VEUILLOT, De l'Europe en Asie.

(2) Voyez l'importante lettre du 22 mai dernier, écrite de Vienne à l'Univers, et insérée dans le n° 142 de ce journal.

portance avec une logique si pénétrante et si invincible, a fait, nous le répétons, une bonne et admirable action. Mais une telle alliance, dans un tel but, est-elle facile, est-elle même possible dans la situation que le philosophisme et l'esprit de révolte ont faite même à l'Europe catholique?

Comme nous l'avons remarqué vers la fin de notre III Discours, si c'est la foi qui fait l'homme catholique, ce ne sont que les institutions et les lois qui font les nations catholiques. Or, nous ne connaissons pas de gouvernement, même catholique, dont les institutions et les lois ne soient pas entachées de ce qu'on appelle l'esprit moderne, c'est-à-dire l'esprit de l'intérêt matériel, du socialisme et de la révolution. Les princes catholiques, nous aimons à le reconnaître, sont aujourd'hui très-catholiques; mais leurs gouvernements le sont bien peu ou point du tout; c'est même l'un des phénomènes les plus inexplicables et l'un des plus frappants indices de grands malheurs, que de voir ces mêmes gouvernements faire la guerre aux Rouges, tandis que presque tous leurs actes présentent des marques d'un rouge foncé et prétendre fermer l'ère des révolutions, tandis qu'ils laissent enseigner les doctrines révolutionnaires dans leurs colléges; et tandis qu'ils trouvent bon que ces doctrines soient professées par leurs publicistes et même recommandées aux sympathies publiques par leurs journaux.

On a dit : « Si les classes éclairées ne sont pas la << nation tout entière, elles la caractérisent. Leurs vices, leurs qualités, leurs penchants, bons ou mauvais, sont bientôt ceux de la nation tout entière; << elles font le peuple lui-même par la contagion de

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