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«< culières sur les testaments et les héritages, en res<< pectant toutefois les droits essentiels de la nature. « C'est ainsi que pour soutenir les familles nobles il << est établi en plusieurs lieux que l'aîné soit de droit le principal héritier de son père. Les terres substituées « à perpétuité à l'aîné d'une maison lui parviennent << en vertu d'un autre droit, lequel a sa source dans la << volonté de celui qui, étant maître de ces terres, les «< a affectées à cette destination (Droit des gens', liv. I, « ch. 20, § 256), » Ces derniers mots sont bien à remarquer. Ce publiciste, qui, à cause de son protestantisme, est si cher à nos adversaires, reconnaît tout bonnement lui aussi, dans ce passage, que le droit naturel ne s'oppose pas à l'établissement des majorats; que tout père de famille peut en créer pour conserver et anoblir sa famille; que ses enfants n'ont pas le droit de s'en plaindre, et que, excepté la personne indiquée par le fondateur, tout autre individu de sa descendance n'y a pas le moindre droit.

Il n'y a que les cadets du fondateur du majorat qui seraient privés de la portion de la quotité disponible qui leur serait revenue, si le père eût voulu la partager comme tout le reste. Mais est-ce que, d'après la législation en vigueur, qui empêche le père de faire un majorat de sa quotité disponible, la portion de cette quotité leur est assurée ? Le père n'est-il pas libre de la léguer à des étrangers; d'en faire même la récompense des désordres de sa vie; de l'établir comme un prix d'encouragement pour les arts ou pour la vertu; ou enfin de la léguer en faveur de la commune, d'un hospice, d'une académie, où d'une corporation religieuse? Et, à de rares exceptions près, les pères ac

tuels n'usent-ils pas avec une parfaite indépendance de cette liberté ?

Et, qu'on le remarque bien, le père disposant de la part d'enfants, dont il est le maître, en faveur d'établissements publics qui ne meurent pas, ferait-il autre chose qu'un vrai majorat qui se substitue et se perpétue indéfiniment?

N'est-il donc pas étrange que la même loi qui accorde à tout père de créer des majorats en faveur des étrangers lui interdise la faculté d'en faire en faveur de ses descendants ? N'est-il pas étrange que la même loi qui autorise le père de famille à céder sa portion disponible à une mainmorte l'empêche de la faire servir à assurer la vie à sa propre famille? N'est-il pas étrange que la même loi qui accorde au père la liberté de convertir une portion de son bien en un fonds perpétuel de bienfaisance pour des êtres qui ne lui appartiennent pas lui interdise la faculté d'en faire une ressource impérissable, une bourse commune pour l'éducation des enfants, une caisse de secours, un fonds de réserve, pour les membres de sa famille qui pourront se trouver dans la gêne et dans la détresse ?

Bien plus, on vient d'accorder aux familles la perpétuité du tombeau; n'est-il donc pas souverainement injuste qu'on leur refuse la perpétuité du berceau? Le sentiment et la conscience publiques ne sont-ils pas tous les jours péniblement affectés de ces « ventes << scandaleuses qui, à chaque décès d'un père de fa« mille, brisent l'existence et les souvenirs d'affection << de la chaumière comme du château; qui livrent à << l'enchère du public meubles, tableaux, livres, et

« enfin qui, par cette exécution et cette dispersion lé<< gale de la maison du père, font succéder l'indiffé<< rence et l'oubli à l'affection fraternelle, et transfor«ment honneur et noblesse en égoïsme et personnalité?

« C'est ainsi surtout que les grands souvenirs s'effacent, mais, ce qui est encore plus triste, c'est ainsi << qu'à une honorable existence succède, « de par la « loi» la pauvreté et souvent la misère, et toutes ses << plaies morales et physiques (LE PRINCE DE CROUY<< CHANELLE, La Noblesse et les Titres nobiliaires). »

Loin donc qu'on puisse faire le moindre reproche d'injustice à la réforme que nous proposons, ce sont au contraire les principes opposés qui sont convaincus d'être contradictoires jusqu'à l'absurde, et injustes jusqu'à l'iniquité.

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$61. Triste effet de la loi qui règle les successions, par rapport aux mœurs publiques. - Interdire au père de famille la faculté de perpétuer une portion de sa propriété après sa mort, c'est l'engager à la gaspiller pendant sa vie. L'affaiblissement de l'autorité paternelle et de tous les principes d'honnêteté et d'honneur est aussi une des conséquences obligées de la même loi. La prospérité matérielle n'a jamais empêché le bouleversement et la ruine des nations. L'ancienne Rome, la France en 1848, le royaume de Naples en 1820. Triste courage de certains publicistes, osant parler des profits que le fisc retire du changement des propriétés, qui est la perte de la moralité publique. L'augmentation de la population est bien un effet de la même loi, mais ce n'est que pour multiplier la misère et l'esclavage. Les émigrations à l'intérieur. Les esclaves blancs des chemins de fer.

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Nous devons maintenant examiner le système qui règle dans ce moment les successions au point de vue

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de la morale, des intérêts matériels et de la politique. Et comme c'est en France qu'il s'est implanté à la fin du dernier siècle, et s'y est développé dans toute sa triste réalité, c'est particulièrement en France que nous allons l'étudier. Seulement, afin qu'on ne nous reproche pas qu'en notre qualité d'étranger, nous ne connaissons pas bien ce pays, nous laisserons parler à notre place, le plus que possible, des écrivains français et même contemporains à qui il est impossible de contester la science, la loyauté et le patriotisme.

Au point de vue de la morale publique, d'abord il est évident, pour tous ceux qui ont des yeux pour voir et de l'esprit pour comprendre, que la loi qui interdit les substitutions est une raison de plus pour tout ce qui a de la fortune d'en faire l'usage le plus déplorable.

Voyez ces richards que produit à chaque instant le mouvement de la spéculation et la rouerie du vol, vivant, à des exceptions près, dans le plus affreux désordre et jetant de tous les côtés des millions avec la même facilité avec laquelle ils les ont gagnés. C'est que la faculté de fonder une maison, de perpétuer leur famille par le moyen des substitutions et de s'occuper de l'avenir, leur étant interdite, ils sont forcés en quelque sorte de concentrer toutes leurs pensées et toutes leurs sollicitudes dans le présent. Ainsi, il est bien naturel que, n'ayant pas à se préoccuper de leur race, ils se bornent à faire une existence fort modeste (ce qui n'arrive pas toujours) aux enfants qu'ils ont sous leurs yeux, et qu'ils croient faire acte de sagesse en vivant au jour le jour et en gaspillant le reste dans le jeu et dans les plaisirs.

Mais s'il leur était permis de perpétuer leur famille

par les substitutions de leur fortune, nul doute que cette pensée d'avenir ne détournât au moins le plus grand nombre parmi eux de ce fol empressement avec lequel ils ne cherchent qu'à se faire une vie heureuse dans le présent; et tant mieux pour l'esprit d'économie, d'ordre, et pour les mœurs publiques.

Dans un beau travail sur la famille française, qu'il a naguère publié dans la Patrie, l'honorable M. le Play s'exprime dans ces termes : « La principale cause << d'affaiblissement de la famille est l'atteinte portée << aux mœurs privées par le droit à l'héritage, appliqué << fatalement par la loi et par des officiers publics, au « lieu d'être réglé par le père, conformément aux con<< venances propres à chaque enfant, aux intérêts géné<< raux de la famille et aux lois de l'affection. Le par<< tage forcé des biens entre les deux sexes, sans rien ajouter au fond au bien-être et à l'indépendance des <«< femmes, conduit chaque homme prévoyant à fonder << son avenir sur l'éventualité d'une riche alliance. Ce << régime subordonne au calcul l'acte de la vie qui de<< vrait être réglé le plus exclusivement par les inspi<«<rations du cœur; il dégrade également les deux <«< époux; il supprime les principales garanties du << bonheur domestique et introduit dans l'institution << du mariage une véritable désorganisation. Lorsque « de telles mœurs sont devenues générales, on peut ignorer le dommage qui en résulte pour la nationa« lité; mais le mal apparaît dès qu'on peut constater la supériorité morale des peuples qui s'inspirent d'autres principes.

«

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<< Parmi les causes de démoralisation, ajoute toujours << M. le Play, ayant pour origine le partage forcé des hé

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