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que celle qui ne voit dans l'État qu'un bien personnel du souverain, et qui soumet à ses prétentions et à ses avantages personnels l'ordre et le bien-être de l'État.

Si donc un pouvoir étranger maintient la tranquillité et ne compromet pas sérieusement l'existence et ies grands intérêts du pays qu'il a usurpé, le peuple de ce pays lui doit obéissance et fidélité, non en vertu d'un droit que lui aurait conféré l'usurpation, car force ou injustice ne sauraient produire un droit; mais, comme Grotius vient de l'affirmer, en vertu de la volonté et des ordres du Prince même injustement chassé; car en sa qualité de Prince légitime, il n'est et ne peut être que le ministre de Dieu pour le bien; Minister Dei est in bonum, et par conséquent, sous peine de se rendre coupable du crime de lèse-droit national, il doit vouloir, il est toujours présumé vouloir, lors même qu'il ne le veut pas en effet, qu'on obéisse au Prince étranger, conservateur de l'ordre social, comme à luimême, et même au préjudice de ses avantages personnels le premier et le plus essentiel des devoirs d'un Prince légitime étant de se dévouer, de servir et même de s'immoler, s'il le faut, au bien de son peuple, à l'exemple du Sauveur du monde, qui, comme il l'a dit lui-même, n'est pas venu dans ce monde pour être servi, mais pour servir, et donner sa vie pour la rédemption du monde : Principes gentium dominantur eorum, vos autem non sic, sed qui major est inter vos erit omnium minister; sicut Filius hominis venit ministrare, n on ministrari, et dare animam suam redemptionem pro multis (MATTH.).

De cette doctrine si conforme à la raison, au droit naturel et aux principes de l'Évangile, il résulte évi

demment, pour le cas que nous discutons dans ce moment, que le Pouvoir établi actuellement en France, qui y maintient l'ordre, et qui la gouverne au moins aussi bien que les Pouvoirs qui l'ont précédé, fût-il usurpateur, il n'a pas moins droit à la soumission et à la fidélité de tout bon Français; et cela par suite de la volonté, au moins présumée, du Pouvoir légitime luimême. A plus forte raison lui doit-on obéissance et fidélité, puisqu'il n'a pas renversé un Pouvoir existant, mais n'a fait qu'occuper une place vacante et saisir d'une main vigoureuse une autorité incertaine et errante à la recherche d'un maître; et que tout cela s'est fait du consentement plein et entier et à la grande satisfaction du pays.

On voit par là ce qu'on doit penser de cette autre circulaire, arrachée par surprise à la religion, à la justice et au bon sens de l'Exilé de Frohsdorff, par laquelle des conseillers aussi peu éclairés que bons Français l'ont engagé à interdirè aux hommes de son parti de prêter serment au gouvernement établi dans leur pays, et de lui donner appui de leurs lumières et de leur dévouement.

Heureusement, l'immense majorité des légitimistes n'a tenu aucun compte d'une pareille défense; et, prenant pour règle de leur conduite politique ce que le Prince aurait dû vouloir plutôt que ce qu'il a eu l'air d'avoir voulu, elle s'est ralliée au nouveau gouvernement, et par là a évité à la patrie la guerre civile et de grands malheurs.

Mais il n'en est pas moins vrai que les conseillers de l'auguste chef de la branche aînée, l'ayant engagé dans les démarches déplorables que nous venons d'in

diquer, ont fait disparaître jusqu'à la moindre trace de ses droits, ont démoli eux-mêmes et rendu désormais impossible le Prince et le principe (1), la personne et la chose, et ont aidé, sans s'en douter, à l'affermissement du pouvoir que la France s'est donné.

(1) Le plus intime de nos amis s'étant rencontré dans le mois de mars 1851 avec l'un des chefs du parti légitimiste dans le salon de feu M. Récamier, le dialogue suivant eut lieu entre ces deux interlocuteurs:

Quelle est, Monsieur, votre opinion sur les chances d'une restauration légitimiste? J'aime à vous entendre là-dessus; car, à l'abri des préjugés et des passions des partis, bien souvent les étrangers voient mieux que nous-mêmes dans nos propres affaires.

Je suis prêt à vous dire ce que je pense sur le sujet sur lequel vous m'invitez à me prononcer, mais à la condition que vous me permettiez de le faire avec toute la franchise qui m'est propre.

Je ne demande pas mieux.

Dans ce cas, souffrez que je vous dise que vous êtes dans la plus complète erreur en croyant à la possibilité d'une restauration de la branche aînée, dont vous avez démoli et rendu impossible le prince et le principe. Vous avez perdu un temps précieux; vous pouviez faire quelque chose, car on vous en a laissé la liberté, et vous n'avez rien fait dans l'intérêt de la cause que vous espérez voir triompher.

Je vous croyais mieux au fait de notre situation. Ne savezvous donc pas que nous avons pour nous vingt départements? Les comités de la Chambre feront le reste.

- Vraiment? Vous avez, Monsieur, vingt départements pour vous? Je vous en félicite. C'est beaucoup; mais, relativement à la question dont il s'agit, ce n'est presque rien. D'abord vous comptez sans doute parmi ces départements à vous ceux du Midi. J'en arrive, Monsieur, et je puis vous assurer que dans ces départements, si l'on est à vous par une moitié, par l'autre

$ 50. On répond à cette objection qu'on a élevée contre le Pouvoir actuel de la France: QU'IL A PROPOSÉ LUI-MÊME A LA NATION LE CAS DE SON ÉLECTION DE MANIÈRE QU'ON NE PUT CHOISIR QUE LUI. Encore des autorités empruntées à l'histoire de France et à l'opinion légitimiste elle-même, en faveur du droit de la nation de décider à elle seule les questions de légitimité, et de la nécessité de son consentement pour que le Pouvoir public soit légitime. — Doctrine du DROIT A LA CHOSE et du DROIT DANS LA CHOSE. On ne peut tout au plus reconnaître à l'honorable Prétendant de Frohsdorff que le droit A LA CHOSE; quant au droit DANS LA CHOSE, il n'appartient incontestablement qu'au Prince régnant.

Maintenant, pour en finir avec le sujet de ce chapitre, nous devons faire justice de quelques reproches qu'on a faits au Pouvoir établi en France et par lesquels on a prétendu en contester la légitimité.

On lui reproche d'abord que, dans la circonstance où il en a appelé au peuple, et soumis au jugement du peuple son élection, il a posé la question en de tels termes, devant le tribunal du pays, qu'il n'en pouvait

on y est entièrement à la république. Vous avez donc tort de compter ces départements comme inféodés tout à fait à l'opinion légitimiste. Mais le fussent-ils, vingt départements, si je ne me trompe, ne font pas même le quart de la France. Comment ferezvous pour vous imposer à ses soixante-six autres départements, qui, de votre propre aveu, ne sont pas à vous? Ce sera le fait, dites-vous, des comités royalistes de la Chambre! en d'autres termes, vous comptez sur une intrigue parlementaire, sur un coup d'État. Tenez, Monsieur, il est évident que la Chambre est divisée en quatre partis : le parti légitimiste, le parti orléaniste, le parti républicain et le parti impérialiste. Il est évident aussi qu'aucun de ces partis, pris isolément, n'a pour

sortir que ce qui en est sorti en effet. Mais rien n'est moins exact; car, quoi qu'il en soit de ces termes, il est indubitable que le pays a été libre de refuser son vote à ce qu'on lui a proposé.

Les habitants, par exemple, de la petite commune de Villerville, voisine d'Honfleur, avaient jadis voté d'enthousiasme pour l'Empereur et pour son gouvernement; mais depuis qu'un arrêt de la cour de cassation, plus conforme à la lettre qu'à l'esprit du décret sur la pêche côtière, les a dépossédés des places où, depuis plusieurs siècles, ils tendaient leurs filets, qui formaient une grande partie de leurs ressources, se croyant injustement frappés, leur enthousiasme s'est sensiblement modifié. Aux élections de 1857, sur 244 électeurs inscrits de cette même commune, 31 seulement ont voté pour le candidat que l'administration locale avait non-seulement proposé, mais en quelque sorte imposé; les autres se sont abstenus, ou ont voté avec l'opposition.

Nulle part l'action de l'administration ne s'exerce d'une manière plus triomphante qu'à Paris. Eh bien, cela n'a

lui la majorité dans l'Assemblée législative, et que chacun d'eux n'espère triompher que par un coup de main. Or, le problème réduit à ces termes, il me paraît évident que, dans une pareille lutte, la victoire ne peut rester qu'au parti dont le chef dispose du gouvernement et de la force publique.

Ah! quant à cela, il n'en sera rien. Je vous donne ma parole d'honneur qu'avant la fin de l'année le président logera à Vincennes et le comte de Chambord aux Tuileries.

Et moi, je vous donne ma parole d'honneur qu'avant la fin de l'année, c'est le président qui logera aux Tuileries, après vous avoir fait empoigner tous; mais ce ne sera pas, je l'espère, pour vous jeter à la Seine.

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