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autres royautés chancellent sur leurs trônes. Eh! mon Dieu! de quoi se plaignent-elles? Il ne dépendait que d'elles de placer, elles aussi, leur légitimité sur sa vraie base la constitution nationale et le consentement de la communauté parfaite, sans lequel, on ne saurait le répéter assez, nul pouvoir ne saurait être juste ou légitimé aux yeux de la raison et de la conscience. La révolution, aussi funeste aux rois qu'aux peuples, n'est que le droit public païen, fondant toute légitimité dans le droit de la force; révolution qui ne finira que par le rétablissement du droit public chrétien, fondant la légitimité sur la force du droit.

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§ 47. Résumé de l'histoire de la souveraineté anglaise dans les trois derniers siècles. Remarques sur la constitution de ce pays et sur la révolution qui l'a restaurée. La légitimité anglaise est fondée sur la forme républicaine, que ce pays s'était donnée, et à laquelle il a voulu revenir. · Même remarque sur les républiques des États-Unis et de la Suisse. - Important avertissement qui résulte de ces observations.

Nous devons maintenant jeter un coup d'œil sur l'histoire politique de l'Angleterre de ces derniers temps et sur la révolution qui y a été accomplie pour la restauration de l'ancien droit public et de la légitimité de ce pays. Cette étude servira à faire mieux comprendre le principe de la légitimité française, dont nous nous occuperons incontinent après, et qui est le but principal de cet ouvrage; car, écrire pour la France, c'est écrire pour l'Europe et même pour le monde.

La forme de la souveraineté anglaise n'est, comme nous l'avons fait remarquer plus haut (§ 15), que républicaine. L'Angleterre n'est qu'une véritable république aristocra

tique, s'appuyant sur une démocratie plus ou moins réelle, plus ou moins indépendante, et ayant à la tête de l'administration un chef héréditaire, qui de roi ne possède que le nom; car, dans ce pays de liberté, il n'y a pas de citoyen moins libre que son prétendu roi. On sait qu'il n'a pas même le droit de former sa maison d'après ses sympathies et ses goûts, et que, comme sur l'ordre de la chambre, il doit changer ses ministres, sur l'ordre des ministres il est obligé de changer les dignitaires et même les valets de sa cour. Et, ce qui est encore plus étrange, dans cette terre classique du protestantisme, du libre examen et de la liberté de conscience, où il est permis, jusqu'au dernier des citoyens, de croire ce qu'il lui plaît et de vivre comme il croit; il n'y a que le roi qui, sous peine de déchéance, soit obligé de professer les trente-neuf articles, et qui ne puisse contracter d'alliance de famille qu'avec les protestants (1).

Ce ne fut que sous Henri VIII que la république anglaise se donna, dans la personne de ce prince, un dictateur qui, par son libertinage, par son impiété et par sa cruauté, renouvela les crimes monstrueux des Néron, des Caligula, des Domitien et des Julien l'Apostat. Cependant, comme il n'avait aboli l'indissolubilité du mariage, le célibat ecclésiastique et les sacrements que dans l'intérêt des passions de l'aristocratie spirituelle et temporelle, et qu'il n'avait fait des

(1) On se souvient que lorsqu'il s'agit du mariage de la reine Victoria, le Parlement demanda des explications sur la religion du prince Albert, et qu'il n'a consenti à ce que ce prince devint l'époux de la reine qu'après que son premier ministre, foi de protestant, eût assuré à la Chambre des lords que le prince Albert était un bon protestant.

riches dépouilles de l'Église catholique que le prix de l'apostasie du clergé et des nobles, on le laissa faire: on lui pardonna toutes ses horreurs, ainsi qu'à Élisabeth, que l'inceste lui avait donnée, et fille tout à fait digne d'un tel père. Jacques Ier poussa les choses encore plus loin. Ses tristes prédécesseurs s'étaient contentés d'être, seulement par le fait, rois absolus au temporel, et papes absolus au spirituel; Jacques voulut l'être aussi par le droit. C'est lui qui le premier, comme nous l'avons observé ailleurs, érigea ce double absolutisme en doctrine, en dogme et en loi. Car dans son ouvrage sur le Serment de fidélité, il a foulé aux pieds tous les principes et tous les droits sociaux, en affirmant que le pouvoir des rois, venant immédiatement et uniquement de Dieu, comme le pouvoir du pape, n'était sujet à aucun contrôle humain, ni ecclésiastique, ni civil. Et c'est bien cet ouvrage que, en vaillant vengeur de la doctrine catholique, des droits des nations et de la dignité humaine, le docteur Eximius (Suarez) réfuta d'une manière triomphante et péremptoire, en lui opposant le droit naturel, qui attribue à la communauté parfaite la possession et la collation immédiate du pouvoir public, et la faculté de le reprendre ou d'en disposer autrement, dans l'intérêt de la conservation et du bien-être de l'État.

Mais, encore une fois, ce nouveau publiciste du droit païen, ce Salomon protestant, soutenait de pareilles doctrines moins en pratique qu'en théorie, moins en souverain qu'en sophiste et en pédant de la pire espèce; ce ne fut que son fils et successeur, Charles I, qui, d'après le célèbre historien Lingard, en fit le premier article de son credo héréditaire et la règle

pratique de son gouvernement. Dès le début de son règne, il essaya d'imposer, de sa seule autorité, plusieurs taxes à la nation; le Parlement fit des plaintes et des oppositions; Charles déclara qu'il pouvait bien se passer du Parlement, et voulut gouverner sans lui (Tome IX, ch. 4). En vain, par l'assassinat de son favori et principal ministre, on lui fit entrevoir le sort qui l'attendait; il n'en persista pas moins à multiplier ses coups d'État de despote, qu'on appellerait mieux des coups de tête de forcené. Après s'être aliéné l'Angleterre, il imagina d'indisposer contre lui l'Écosse. Il s'y rendit en personne, et il somma le Parlement écossais de reconnaître à la couronne le droit de régler l'Église et d'accepter les nouveaux statuts qu'il avait rédigés concernant la religion et l'établissement de la hiérarchie épiscopale anglicane en Écosse. Ces folies et bien d'autres encore soulevèrent contre lui les deux royaumes. On en vint aux armes des deux côtés, et le despote fut plusieurs fois battu. Devenu odieux par ses actes, il devint méprisable par sa facilité à manquer à sa parole. Il promettait, et le lendemain il agissait en opposition avec ses promesses; il en appelait au Parlement, et n'y trouvant que de l'opposition, il se hâtait de le dissoudre. Il prétendait gouverner tantôt avec les lords sans les communes, tantôt avec les communes sans les lords; tantôt avec le Parlement sans l'armée, tantôt avec l'armée sans le Parlement. Il improvisait des généraux dans son armée, et un instant après il leur refusait sa confiance. Il blessa successivement d'une manière si effrontée toutes les opinions, tous les intérêts, tous les partis et tous les caractères, qu'il n'y eut plus moyen de compter sur sa faveur, et

qu'il lui fut impossible d'avoir des amis. N'agissant donc que dans des vues de son intérêt personnel et de son absolutisme, contre les lois fondamentales du pays et contre toutes les règles reçues de la justice, ses coups d'État furent aussi peu légaux que peu légitimes. Si donc sa condamnation, commencée par la trahison et achevée par l'oubli de toutes les formes judiciaires, ne fut ni légitime ni légale, la déclaration de la déchéance de sa royauté usurpée, tout à fait légitime par le fond, fut aussi légale que possible par les formes; attendu que, par ses emportements et par ses caprices, il avait ruiné les finances; qu'il avait fait bon marché de la liberté et de tous les droits de ses sujets; qu'il avait foulé aux pieds toutes les lois; qu'il s'était fait un jeu de la constitution de l'État; et qu'évidemment rebelle contre la souveraineté nationale, il avait fait de sa personne un brandon de discorde, une cause permanente de perturbation et de désordre dans le pays, où il était considéré comme l'ennemi irréconciliable du repos public. En voilà donc assez pour le déclarer déchu d'une royauté dont il faisait un abus si détestable. Cependant ce qui restait encore de l'ancien Parlement refusa de signer l'ordonnance formulée par l'hypocrite Cromwell, et qui envoyait le roi devant un tribunal des Niveleurs fanatiques pour en être jugé. Des soldats révoltés furent ses juges; deux officiers masqués furent ses bourreaux.

Sa condamnation n'a donc pas été le fait des représentants légitimes du pays; commencée par la trahison, elle ne fut achevée que par la violence. Cet arrêt ne fut pas un jugement, mais un forfait; cette mort ne fut pas un supplice, mais un assassinat.

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