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la plus dévergondée; cette grande et puissante république disparut en quelques jours dans les bras d'une poignée de sans-culottes à qui elle se livra sans combat elle-même; tel un beau fruit atteint par la corruption se détache lui-même de l'arbre et tombe dans la boue.

On nous avait dit à Rome qu'au commencement du dernier siècle un pieux doge ayant renvoyé sur le continent les filles publiques qui inondaient la ville, le peuple, ne pouvant plus se livrer aux plaisirs, commença à s'occuper de politique, au point que le gouvernement en fut ébranlé; et qu'en conséquence le doge fut obligé de rappeler les prostituées qu'il avait chassées, par un décret conçu dans ces termes : « Nous rappelons nos filles publiques, qui ont bien mérité de la patrie Richiamamo le nostre benemerite meritrici. » Ce fait nous paraissait si exorbitant que nous n'avions pas voulu y croire; mais pendant notre séjour à Venise, de graves magistrats nous ont affirmé qu'il n'était malheureusement que trop vrai, et ils ont ajouté qu'à la suite du décret que nous venons de mentionner, on promena toute nue et couronnée de roses, en palanquin, par toute la ville, la plus belle de ces malheureuses, suivie d'un grand nombre de ses compagnes dans la même toilette, pour avertir le peuple qu'il pouvait avec la même facilité qu'auparavant revenir à

à nous rendre compte de la chute ignominieuse de cette république, des hommes graves nous ont dit: A la veille de l'occupation de notre ville par la soi-disant armée française, nous n'avons pas été médiocrement surpris de voir que déjà depuis bien des années nous n'avions plus de gouvernement et que nous n'existions que par la terreur dei piombi.

ses habitudes voluptueuses qui lui faisaient oublier son oppression politique. On nous assura, enfin, qu'un habile peintre avait perpétué, dans un grand tableau, le dégoûtant souvenir de ces bacchanales, qui ne s'étaient jamais vues dans aucun pays chrétien, et qui furent renouvelées plus tard dans les plus mauvais jours de la révolution française. Étonnez-vous donc que la république de Venise soit tombée, et celle de 93 aussi !

C'est, du reste, l'histoire de toutes les républiques anciennes et modernes; et si la république américaine subsiste encore, c'est que l'esprit chrétien de la race anglo-saxonne qui a présidé à sa formation ne s'y est pas entièrement éteint, et que la corruption des mœurs n'y est pas encore arrivée à son comble; mais lorsque la fureur de s'enrichir et la rage des voluptés qui ont envahi toutes les classes de ces peuples, composés des éléments les plus hétérogènes, auront atteint leur apogée et en auront chassé les dernières traces même du christianisme anglican, cette république si riche et si puissante tombera, elle aussi, en dissolution, et l'on verra ces farouches républicains, si jaloux de leur liberté, se soumettre à l'autorité d'un seul et se résigner, comme à un moindre mal, à la servitude.

Les vrais patriotes de ce pays font déjà entendre des plaintes bien significatives sur l'impuissance du pouvoir central à conjurer les orages de la révolte. A l'occasion du vote du Sénat américain, dont il sera question plus loin, les feuilles publiques de la localité, du mois de mars dernier, se sont ainsi exprimées :

« Le refus d'augmenter l'armée, selon le désir du président, est une chose déplorable, car les Mormons peuvent réunir dix mille hommes pour tomber sur notre

petite bande, enfermée aujourd'hui dans les défilés étroits des montagnes, et très-exposée à être exterminée avant qu'aucun secours puisse lui arriver. Si l'augmentation avait été accordée, une armée bien équipée serait partie aussitôt après la fonte des neiges et aurait rejoint le premier détachement; mais l'opposition maladroite des démagogues a fait suspendre toute mesure importante, et le gouvernement se trouve dans un trèsgrand embarras.

>> Les raisons alléguées par l'opposition sont futiles: le sénateur Hale a dit que cette addition à l'armée avait pour but de subjuguer le peuple du Kansas, et le sénateur Toombs. et son parti ont parlé du danger pour ce pays d'avoir une trop grande armée. Le peuple, selon lui, ne serait plus libre. Ces folies ont trouvé trop d'auditeurs, et voici notre gouvernement exposé peut-être au

MÉPRIS DES AUTRES NATIONS.

<< Les soldats américains, dit-on, ne sont même pas assez nombreux pour faire le service de la police sur les frontières, et le système de volontaires, qu'on sera réduit à adopter, fera peser lourdement les difficultés de l'Utah sur l'état civil, ce qu'il faudrait éviter.

« Toutes ces choses bien considérées, il faut avouer que le pouvoir du président est trop limité et que l'opposition que rencontrent ses justes désirs constitue une offense à la dignité de ses fonctions et au caractère du peuple américain, qu'on rendra ridicule aux yeux du monde entier. Le président est, pour ainsi dire, cerné par un parti qui s'oppose systématiquement à ses légitimes desseins pour le bien du pays, et sans cette opposition, qui n'a d'autre mobile que l'intérêt personnel de ses auteurs', le cabinet est assez bien composé, le président est assez

habile pour faire cesser le désordre et l'anarchie qui règnent depuis trop longtemps... »

On sait aussi que récemment, en plus d'un État de l'Union, pour punir des crimes qui n'étaient rien moins que flagrants, le peuple a fait juger et pendre les prétendus coupables par des juges improvisés par lui; et cela sous les yeux des magistrats légitimes, qui n'ont eu rien de mieux à faire que de laisser faire, et au mépris des lois existantes qui ont été foulées aux pieds. Or, de tels désordres, qui peuvent se traduire par ces mots: Il n'y a plus de gouvernement dans ce pays, sont, il faut l'avouer, de très-mauvais augure pour sa stabilité. C'est une machine qui se détraque de tous les côtés, et qui ne peut manquer de tomber en dissolution. Ainsi on peut, en toute vérité, appliquer à cette république ce qu'on a dit à tort de toute république en général que c'est un corps qui attend un chef, ou plutôt des chefs; parce que les causes de dissolution dans ce pays sont si profondes et si puissantes, qu'il ne peut plus désormais former une seule nation.

:

§ 17. Digression sur les principales causes qui menacent de ruine la république des États-Unis. Les horreurs de l'esclavage et la corruption des mœurs de ce pays. Tombé aussi bas que l'ancienne Rome, il périra comme elle.

Avant de passer outre, qu'il nous soit permis de faire ici une digression sur les deux principales maladies qui rongent la confédération américaine, et qui en préparent inévitablement la décomposition et la mort. Une pareille étude n'est pas sans importance dans l'intérêt de la vérité de notre thèse sur l'indifférence des formes du pouvoir politique.

Parmi les causes de décadence et de dissolution de cette célèbre république, il faut d'abord signaler l'infàme trafic et l'exploitation plus infâme encore des esclaves. Nous laisserons parler sur ce sujet le savant Docteur M. Boudin. Dans son consciencieux et savant ouvrage publié l'année dernière, et qui a excité un intérêt universel et bien mérité, il rapporte ces révoltants détails :

<< L'esclavage existe aujourd'hui aux États-Unis dans quatorze États: Delaware, Maryland, Virginie, Caroline du Nord, Caroline du Sud, Géorgie, Kentucky, Tennessee, Alabama, Mississipi, Louisiane, Missouri, Arkansas et Texas. Les États à esclaves se divisent en pays de production et de consommation. Dans les premiers on élève les esclaves; dans les seconds on les applique à la culture du sol. On évalue à 80,000 environ le nombre des esclaves qui sont annuellement transportés des États éleveurs (breeding States) dans les États consommateurs. Les États éleveurs sont le Delaware, le Maryland, la Virginie, la Caroline du Nord, le Kentucky, le Tennessee et le Missouri. Le sol de ces États n'étant pas propre aux grandes cultures du sucre et du coton, et les denrées qu'on y cultive, le tabac, le chanvre et les céréales, n'exigeant, en comparaison, qu'un nombre peu considérable de travailleurs, les esclaves y sont nourris principalement en vue de l'exportation. L'élève de cette espèce particulière de bétail est devenue une branche importante de la production. Les éleveurs l'ont organisée sur une échelle immense. Non-seulement ils s'attachent à le développer de manière à proportionner leurs approvisionnements aux demandes croissantes des États du Sud, mais encore ils

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