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son état natif, mais non son état naturel. La plante, nous le redisons toujours, tant qu'elle n'est qu'un faible arbrisseau, n'est que dans un état natif; et ce n'est que lorsque, par son développement naturel, elle a atteint les dimensions qui lui sont propres et est devenue arbre, qu'elle est dans son état naturel. Il en est absolument de même de l'homme enfant par rapport à l'homme adulte.

Or, il n'y a point de doute non plus que la nature des choses a été établie par l'auteur suprême de la nature. Mais la société civile est dans la nature de l'humanité, car, encore une fois, comme l'homme enfant tend naturellement à devenir adulte, toute famille tend naturellement, elle aussi, à devenir familles; et ces familles tendent toujours naturellement à s'établir, à se constituer, à se civiliser et à devenir une société parfaite. Donc, Dieu est l'auteur de la société civile et établie, et cette société n'est pas l'invention de l'homme, mais la pensée et l'institution de Dieu.

$ 11. Qu'est-ce que la société CONSTITUÉE et la société NON CONSTITUÉE?-La société n'est CONSTITUÉE que par la législation publique et le culte public. Énos, fils de Seth, a été le premier à inaugurer l'exercice public de la religion.- Si l'on a trouvé des peuples n'ayant pas de temples et de culte publics, cela prouve que ces peuples n'étaient pas constitués. Nécessité de l'idée de pour l'existence de la société. Réfutation du témoignage voyageurs philosophes affirmant avoir trouvé des sociétés publiques athées.

Dieu

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La société publique est, en second lieu, non-constituée ou constituée.

Tant qu'elle ne rend à Dieu qu'un culte purement

domestique et que la justice ne s'y exerce que par les chefs des familles et sur des maximes et des coutumes traditionnelles, elle n'est pas encore constituée. La société publique n'est vraiment constituée que lorsqu'un culte public, exercé par des hommes spéciaux ou par le sacerdoce, s'y trouve établi, et qu'en même temps elle n'est régie que par une législation écrite et uniforme, appliquée aux cas particuliers par le souverain ou par ses délégués.

Le peuple d'Israël ne fut au commencement qu'une famille. Par son accroissement, cette famille devint un grand nombre de familles; mais, demeurant sous un gouvernement étranger en Égypte, ce peuple y resta en quelque sorte à l'état domestique. Ce n'est que lorsque Dieu lui donna un chef à part et propre à lui, dans la personne de Moïse, qu'il devint une vraie société politique. Cette société fut nomade pendant quarante ans, et ne devint société établie que lorsqu'elle occupa définitivement la terre de Chanaan, qui avait été promise à ses pères.

A sa sortie de l'Égypte, le culte aussi bien que la justice ne s'y exerçaient que d'après des règles d'économique, d'une manière privée, et d'après les traditions. Elle n'était donc pas encore constituée. Elle ne le fut que lorsque, par l'organe de Moïse, Dieu lui donna une loi en même temps religieuse et civile, et qu'il institua le sacerdoce, le culte public, les magistrats et une procédure judiciaire stable et uniforme.

C'est aussi l'histoire de toute société publique : à moins qu'elle ne soit dispersée, fondue dans une autre société et détruite, elle finit toujours par se constituer aussi bien que par s'établir; mais au com

mencement elle n'est pas plus constituée qu'elle n'est établie.

Il est dit dans la Genèse que ce fut Énos, le premier fils de Seth, qui commença à invoquer le nom du Seigneur: Seth natus est filius quem vocavit Enos: iste cœpit invocare nomen Domini (GENES., IV). Or, il n'y a pas de doute que son père et son grand-père Adam, aussi bien qu'Ève sa grand'mère, avaient invoqué bien longtemps avant lui le nom du Seigneur. Il est donc évident qu'en disant que c'est par Énos que le Seigneur a été invoqué pour la première fois, l'Écriture sainte n'a point entendu parler d'une invocation quelconque, mais d'une invocation du nom du Seigneur, spéciale, solennelle, collective, publique. C'est nous apprendre que le culte public du Seigneur n'a été pour la première fois inauguré que par Énos, et que ce fut de son temps que la première société publique du genre humain fut définitivement constituée : puisque la constitution définitive d'une société publique implique l'établissement et l'exercice du culte public.

C'est ce qui est arrivé aussi après le déluge. La création de la magistrature, aussi bien que l'érection des temples et l'établissement du sacerdoce public, ne sont survenus que plus tard; et ce n'est que lorsque toutes ces choses ont été accomplies, que les différentes sociétés se sont complétement constituées.

Mais puisque, de ce qu'une société se soit établie, il ne s'ensuit pas qu'elle se soit constituée aussi, il a pu arriver, et il est arrivé, en effet, que des sociétés établies soient demeurées longtemps avec une législation et une religion à l'état domestique, et privées d'une législation et de magistrats publics, sans temples et sans

un sacerdoce à part, chargé de l'exercice du culte public en un mot, que, établies, elles soient restées longtemps sans être constituées..

Cette remarque est bien importante; c'est pour ne pas y avoir fait attention que certains voyageurs, voltairiens par leur légèreté et leur esprit, ont voulu faire accroire au monde le fait monstrueux contre lequel, au nom de toute l'antiquité, même païenne, Cicéron avait hautement protesté: c'est-à-dire d'avoir rencontré sur leur chemin des peuples complétement athées; fait monstrueux, disons-nous; car l'idée d'un Dieu, une fois introduite dans l'humanité par la révélation qu'en fit Dieu au premier homme, s'y est toujours propagée par le langage et par la tradition, et ne l'a jamais abandonnée. L'idée d'un Dieu forme l'un des éléments de la raison humaine; le mot sous lequel elle est formulée se trouve dans toutes les langues, comme la pensée s'en trouve dans tous les esprits, et le sentiment dans tous les cœurs. Même chez les peuples sauvages (ces enfants prodigues de l'humanité), qui, s'étant détachés de la souche de la civilisation, ont gaspillé le patrimoine paternel des traditions primitives et d'un langage complet qui les renfermait; même chez ces peuples, le nom de Dieu est resté toujours dans les débris de leurs langues, comme l'idée en est restée dans les débris de leurs croyances. Cette grande idée, principe de toute raison, qui est la première à resplendir dans l'esprit de l'homme par la raison et la parole, qui font l'homme; cette grande idée, fondement de tout ordre, qui se trouve en tête de toute société comme une inscription que la main même de Dieu y a tracée en caractères ineffaçables, est la dernière à disparaître de l'homme

et de la société. Et lorsque cela arrive, il n'y a plus de société ni d'hommes; car l'homme n'est qu'un monstre et la société n'est que le chaos (1).

Il est vrai qu'on trouve de temps en temps des êtres humains à l'esprit satanique, poussant le courage du blasphème jusqu'à la négation de Dieu; mais, comme l'Écriture sainte l'a remarqué, ils ne font que dire dans leur cœur que Dieu n'est pas : Dixit insipiens in corde suo: Non est Deus; c'est-à-dire qu'ils le disent sans le croire, qu'ils le disent dans la corruption de leur cœur bien plus que dans la démence de leur esprit; et cette négation est moins une croyance qu'un vœu sacrilége que Dieu ne soit pas.

Mais quoi qu'il en soit de ces monstres à forme humaine, ce qui est incontestable, c'est qu'il n'existe ni n'a jamais existé, ni n'existera jamais un peuple ou une société sans Dieu, pas plus qu'il n'existe pas ni ne saurait exister de corps organique sans âme, ni d'édifice sans fondements.

Ce qui a induit en erreur les voyageurs philosophes,

(1) On se rappelle que dès l'instant où les blasphémateurs imbéciles qui ont tyrannisé la France en 1793 effacèrent l'existence de Dieu du nombre de ses croyances officielles, tous les liens sociaux s'y trouvèrent brisés, et qu'elle se trouva tout à coup transformée en une horde d'anthropophages, dévorés par l'horrible instinct de se détruire mutuellement. Ce fut au point que les auteurs mêmes de ces crimes, uniques dans les fastes des forfaits de l'humanité, effrayés de leurs propres œuvres, revinrent sur leurs pas et se hâtèrent de déclarer « que la nation française reconnaissait l'Être suprême ». Et, chose étonnante! en compagnie du nom de Dieu, l'homme reparut, et la société fut arrachée à sa dissolution.

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