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Heureusement on venait d'apprendre à Rome la victoire de Marius : il fut rappelé en toute hâte et envoyé au secours de son collègue. Sylla, blessé par son humeur hautaine, l'avait déjà quitté pour rejoindre Catulus, qui l'accueillit avec distinction. Il lui donna une division qu'il mena contre les montagnards des Alpes afin de les contenir, et avec laquelle il ramassa assez de vivres pour tenir dans l'abondance le camp de Catulus, tandis que celui de Marius souffrait de la disette.

Cependant les Cimbres attendaient toujours l'arrivée des Teutons; ils ne voulaient pas croire à leur défaite et envoyèrent même à Marius des ambassadeurs chargés de lui demander pour eux et pour leurs frères des terres et des villes où ils pussent s'établir. « Ne vous inquiétez pas de vos frères, leur dit le consul, ils ont la terre que nous leur avons donnée, et qu'ils conserveront à jamais.» Les Barbares s'emportèrent en injures et en menaces: il allait être puni de ses railleries, disaientils, d'abord par les Cimbres et ensuite par les Teutons, lorsqu'ils seraient arrivés. « Ils le sont, répliqua Marius, et il serait peu honnête de vous en aller sans avoir salué vos frères. » Et en même temps il ordonna qu'on amenât, chargés de chaînes, les rois des Teutons, que les Séquanes avaient faits prisonniers lorsqu'ils s'enfuyaient vers la Germanie.

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Aussitôt que les Cimbres eurent entendu le rapport de leurs ambassadeurs, ils marchèrent contre Marius. Boïorix, leur roi, s'approcha de son camp à la tête de quelques cavaliers et le provoqua à fixer le jour et le lieu du combat. Marius lui répondit que les Romains ne prenaient jamais conseil de leurs ennemis, que cependant il voulait bien satisfaire les Cimbres sur ce qu'ils demandaient. Ils convinrent que la bataille se donnerait à trois jours de là dans la plaine de Verceil. Les Barbares furent exacts au rendez-vous. Leur infanterie, rangée en bataille dans la plaine, forma une phalange carrée qui avait autant de front que de profon deur, et dont chaque côté couvrait 30 stades de terrain

(5500 mètres). Les cavaliers, au nombre de 15 000, étaient magnifiquement parés leurs casques se terminaient en gueules béantes et en mufles de bêtes. sauvages, surmontés de hauts panaches semblables à des ailes, ce qui ajoutait à leur taille; ils étaient couverts de cuirasses de fer et de boucliers resplendissants; ils avaient chacun deux javelots à lancer de loin, et dans la mêlée ils se servaient d'épées longues et pesantes.

A peine le combat était-il commencé qu'il s'éleva sous les pas de cette multitude un tel nuage de poussière, que les deux armées ne purent se voir. Marius, qui s'était avancé pour tomber le premier sur l'ennemi, le manqua dans cette obscurité, et poussa bien loin du champ de bataille, de sorte qu'il erra longtemps dans la plaine, tandis que Catulus avait seul à soutenir tout l'effort des Barbares. Une circonstance favorisa beaucoup les Romains les rayons brûlants du soleil donnaient dans le visage des Cimbres. Ces hommes, nourris dans des lieux froids et couverts, n'en pouvaient supporter la chaleur; inondés de sueur et tout haletants, ils se couvraient le visage de leurs boucliers et exposaient leurs corps sans défense aux coups de l'ennemi.

Les plus braves d'entre les Cimbres furent d'abord taillés en pièces, car, pour empêcher que ceux des premiers rangs ne rompissent leur ordonnance, ils s'étaient liés ensemble par de longues chaînes attachées à leurs baudriers. Les vainqueurs poussèrent les fuyards jusqu'à leurs retranchements, et ce fut là qu'on vit le spectacle le plus affreux. Les femmes, vêtues de noir et placées sur les chariots, tuaient elles-mêmes les fuyards; elles étouffaient leurs enfants, les jetaient sous les roues des chariots ou sous les pieds des chevaux et se tuaient ensuite elles-mêmes. Une d'entre elles, après avoir attaché ses deux enfants à ses deux talons, se pendit au timon de son chariot. Les hommes, faute d'arbres pour se pendre, se mettaient au cou des nœuds coulants qu'ils attachaient aux cornes ou aux jambes des bœufs, et, les piquant en

suite pour les faire courir, périssaient étranglés ou foulés aux pieds de ces animaux. Malgré le grand nombre de ceux qui se tuèrent ainsi de leurs propres mains, on fit plus de 60 000 prisonniers, et on en tua deux fois autant (101).

Les honneurs rendus à Marius après cette victoire témoignèrent de la crainte des Romains. Il fut surnommé le troisième Romulus. Chaque citoyen, à la nouvelle de sa victoire, répandit des libations en son nom. Lui-même s'imagina avoir égalé les exploits de Bacchus dans l'Inde, et fit ciseler sur son bouclier la tête d'un Barbare tirant la langue. Rome croyait, en effet, avoir étouffé la barbarie dans ses bras puissants.

CHAPITRE XVII.

LA GUERRE SOCIALE. MARIUS ET SYLLA.

1. Troubles à Rome; Saturninus. 2. Seconde guerre servile (1033. Causes de la guerre sociale.

100).

- 4. Projets de Drusus. 5. Violences de l'ordre équestre. 6. Soulèvement des Italiens (90). 7. Rôle peu glorieux de Marius; services éclatants de Sylla (90-88). 8. Résultats de la guerre sociale. - 9. Rivalité de Marius et de Sylla; proscription et fuite de Marius (88). — 10. Retour de Marius (87); proscriptions; sa mort (86). — 11. Retour de Sylla (83). 12. Proscriptions de Sylla. 13. Constitution aristocratique de Sylla. — 14. Abdication (79) et mort de Sylla (78).

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1. Troubles à Rome; Saturninus. Marius avait été déjà cinq fois consul; son ambition n'était cependant pas rassasiée. Quand il rentra dans la ville, après la bataille de Verceil, il voulut un sixième consulat; mais les grands trouvèrent qu'il avait eu assez d'honneurs : ils lui opposèrent son ennemi personnel, Metellus le Numidique. Marius fut réduit cette fois à acheter les suffrages. Il ne le leur pardonna pas et les laissa attaquer par un démagogue de bas étage, Saturninus. Celui-ci briguait le tribunat; un ami des nobles avait été élu : Saturninus l'égorgea et prit sa place. Aussitôt il proposa une loi agraire pour les vétérans de Marius, et, Metellus s'étant opposé à cette loi, il le fit exiler.

Marius avait satisfait son ambition et sa haine : il était tout-puissant; mais il ne sut que faire de ce pouvoir, et Saturninus, enhardi par sa faiblesse, prit le premier rôle. Ses desseins sont mal connus: peut-être qu'il n'en eut pas. Cependant les Italiens, les étrangers, l'entouraient, et une fois on les entendit le saluer du nom de roi. Pour faire arriver au consulat un de ses complices, le préteur Glaucia, il fit tuer un des consuls élus; mais le peuple

s'indigna, et Marius fut contraint d'assiéger, dans le Capitole, puis de laisser lapider ceux qu'il avait peut-être secrètement soutenus. Ce jeu double tourna tout le monde contre lui on rappela Metellus, et, pour ne pas voir son retour triomphant, Marius, sous prétexte d'aller accomplir des sacrifices qu'il avait voués à Cybèle, partit pour l'Asie dans la secrète espérance d'amener, entre Mithridate et la république, une rupture que Saturninus avait déjà provoquée par ses insultes (98). Il avait besoin d'une guerre pour se relever aux yeux de ses concitoyens. Il disait lui-même : « Ils me regardent comme une épée qui se rouille pendant la paix. »

Tandis que

2. Seconde guerre servile (103-100). Marius arrêtait la première invasion germanique, la Sicile avait été le théâtre d'une nouvelle révolte des esclaves. Un de leurs chefs, Salvius, après avoir battu un préteur, fut vaincu par Lucullus; un autre chef, Athénion, réduisit le consul Servilius à l'inaction, mais il fut tué dans un combat singulier par M. Aquilius, et l'armée des esclaves se dissipa. Ceux qu'on saisit furent envoyés à Rome et livrés aux bêtes; ils trompèrent les plaisirs du peuple en se tuant les uns les autres; leur chef égorgea le dernier survivant, puis se frappa luimême. Un million d'esclaves, dit-on, avaient péri dans les deux guerres. Des règlements atroces les continrent à l'avenir : il leur fut défendu, sous peine de mort, d'avoir des armes, même l'épieu qui servait aux pâtres à se défendre contre les bêtes fauves.

3. Causes de la guerre sociale. Comme les plébéiens, les alliés n'avaient été respectés qu'autant qu'ils avaient paru nécessaires; quand Rome n'eut plus de grande guerre à conduire, elle les négligea, puis les traita comme des sujets, et foula aux pieds les priviléges qui leur avaient été jadis accordés. Longtemps ils ne trouvèrent pour se mettre à l'abri contre ces violences d'autre protection que le titre de citoyen romain, et ils cherchèrent par tous les moyens à l'obtenir. Quand la reprise de la loi agraire par les Gracques eut effrayé les

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