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Le Romain, le Luthérien,
Finit fa course vagabonde
Par n'être pas même Chrétien.
Rarement, à courir le monde,
On devient plus homme de bien.

(Defmarets.)

Dans maint Auteur de fcience profonde,
J'ai lu qu'on perd à trop courir le monde:
Très-rarement en devient-on meilleur :
Un fort errant ne conduit qu'à l'erreur.

(Greffet.)

Les voyageurs font femblables aux fleuves, qui croiffent à mesure qu'ils s'éloignent de leur fource; & aux fontaines, qui, dans leur cours, paffent par des veines précieufes, d'où elles tirent d'excellentes qualités.

VUE.

La vue eft le premier des fens qui fe révolte contre la raifon. C'eft la mère de nos paffions déreglées; c'eft elle qui donna la première atteinte à la béatitude d'Eve dans le Paradis terreftre. Les yeux trahiffent le cœur ; ce font eux qui donnent la naissance à nos defirs criminels; ils parlent & s'expliquent, fans employer l'ufage de la langue.

VULGAIRE.

Le vulgaire ftupide

Ne fuit jamais que le plus mauvais guide;
Et ne voit rien qu'à travers les faux jours
D'un verre obfcur qui le trompe toujours.
D'un œil confus il cherche, il developpe
Quelques objets. Tournez le telescope;

Ce qui d'abord lui parut un géant,
Semble, à fes yeux, rentrer dans le néant,
Toute vertu qui veut être admirée,
De quelque vice eft toujours bigarrée :
Et, quand par elle on fonge à s'élever;
D'un peu de fard il faut l'enjoliver.
Sans vermillon, fans clinquant, fans affiche;
Le Saint tout nud fe morfond dans fa niche:
On veut le voir paré de ses habits,
Tout brillant d'or, tout chargé de rubis.
Du peuple alors le zèle s'évertue :
Mais il lui faut décorer fa ftatue.

(Rousseau ; Épitre 5, à M. le Comte du Luc.)

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YEUX.

Puiffance de deux beaux yeux.

Ne vous figurez pas que, dans l'âge où vous êtes;

E

Pour feindre d'ignorer les meurtres que vous faites
Un cœur en fente moins les traits qu'il en reçoit.
Ne vous excufez point dessus votre innocence:
Ceux que l'on a tués, même fans qu'on y pense
Sont tout auffi bien morts que fi l'on y pensoit.
Vos yeux, mal affurés, ne viennent que de naître ;
Leurs rayons, tout tremblants, à peine ofent paroître,
Et déja cent amants s'en voyent enflammés.
Ces deux jeunes foleils font en leur matinée;
Et s'ils ont tant d'ardeur commençant leur journée,
Quand leur midi viendra, nous ferons confumés.
Avant que leur pouvoir ait le temps de s'accroître,
Votre père devroit vous mettre dans un Cloître ;
Il fauveroit tous ceux que vous ferez mourir.
La ville attend de lui cet acte de juftice:
Il en eft Sénéchal, il y fait la police;
Et s'il vous laisse au monde, il le laiffe périr.

(Montreuil.)

Un jour, aux beaux yeux d'une Brune,
L'Amour voulut forger fes traits;
Mais, hélas ! pour mon infortune,
Je voulus regarder l'ouvrage de trop près;
Il en fortit tant d'étincelles

Que l'Amour même, en redoutant l'ardeur,
Voulut s'enfuir auprès de cette Belle;
Mais, en fuyant, il fe brûla les aîles,
Et ne put voler qu'à mon cœur.

Vous avez, Belle Iris, des yeux à tout charmer :
Si-tôt que l'on vous voit, on fe laiffe enflammer "
Et par raifon, & par délicateffe;
Mais, hélas ! quelle cruauté!

On eft furpris, quand on y penfe:
Vous infpirez l'amour & la fidélité,
Et vous banniffez l'efpérance.

(Chaulieu.)

Dans un projet plein de difficultés, Quand les plus fürs moyens font vainement tentés, Faites intervenir une femme jolie,

Et voilà, fur-le-champ, votre affaire finie.

(Deftouches.)

Mes yeux, que vos plaifirs coûtent cher à mon cœur Vous avez voulu voir Silvie.

Si j'ai fatisfait votre envie,

Ah! c'eft aux dépens de ma vie.

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Mes yeux, que vos plaifirs coûtent cher à mon coeur !
Allons, allons revoir l'objet de mon tourment.
Ses yeux, d'un feul regard, peuvent, en un moment
Soulager l'ardeur qui me tue,

Mais je me flatte en vain d'un fi charmant espoir:
Pour guérir je cherche à la voir;

Et tout mon mal ne vient que de l'avoir trop vue.

(Mad. de la Suze. )

Là, ce fier vainqueur des vainqueurs,
Qui porte le fceptre des cœurs,

Serre fes dards trempés de larmes!
Et, poliffant maint trait fatal,
Dans ce petit fort de crystal
Fait le magafin de fes armes.

(Duperron.)

YVRESSE.

Ses avantages.

Eft-il rien d'égal aux bouteilles?

Eft-il rien de fi beau que nos trognes vermeilles ? Toujours, comme un printemps, on nous voit boutonnés. Que peut la pauvreté nous faire entre les brindes ? * Ces rubis que Bacchus alloit chercher aux Indes, Nous viennent jufques fur le nez.

YVROGNES.

Paffion des yvrognes.

(De Cailly.)

Quand l'yvrogne Boivin fut vieux,

Il avoit l'œil humide & bordé d'écarlate;
Un Médecin lui dit, de la part d'Hippocrate,
Ou renoncez à boire, ou vous perdrez les yeux.
Lors Boivin, fermant la paupière,
Adieu, dit-il, adieu lumière ;
Jufqu'ici Boivin a trop vu,
Et n'a pas encore affez bu.
Aveugle je ferai connoître
Que j'obéis à la raifon :
Il faut condamner la fenêtre
Afin de fauver la maison.

Un Médecin, fort âpre à faire quelque cure;
Voyant d'un gros Roger-Bontemps
La trop brillante enluminure,

Lui dit que, par de prompts & fûrs médicaments;
Il décoloreroit fa trogne,

I

S'il vouloit feulement lui donner cent écus.
A quoi le fuppôt de Bacchus,
Ce vénérable yvrogne,
Répartit Monfieur le Docteur;

Je ne vous pense point du-tout affez habile

C'eft boire à la fanté les uns des autres.

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