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dans le poëme de Virgile. Il n'y a entr'eux de différence qu'en ce que Tite - Live a tiré les fiens de faits hiftoriques; au lieu que Virgile les a tirez d'une hiftoire fabuleufe. Ils font les uns & les autres également de la façon de l'écrivain.

Nous comprenons dans le genre didactique la Satire, l'Epitre en vers, l'Epigrame & les autres petits poemes où il s'agit moins de fiction que d'enfermer dans des rimes une penfée fine, un trait mordant, un fentiment gracieux.

Mais pour proceder proceder avec ordre, nous traiterons d'abord du Poëme didactique proprement dit; enfuite de la Satire, & en troifiéme lieu de l'Epigramme.

ARTICLE PREMIER.

DU POEME DIDACTIQUE.

Nous l'avons défini ci-dessus : c'est la vérité mise en vers. Nous allons en marquer les efpeces, & en tracer les regles de mots.

en peu

I.

Différentes efpeces de Poëmes didactiques.

ces que la vérité a de genres. Il y a des poëmes qui n'expofent que des actions & des événemens réels, & tels qu'ils font arrivez, dans l'ordre naturel, fans en arranger les parties felon les regles du goût, fans s'élever plus haut que les causes naturelles. On peut les nommer Poëmes hiftoriques. Tels font les so Livres de Nonnus fur la vie & les exploits de Bacchus, la Pharfale de Lucain, la Guerre Punique de Silius Italicus, & quelques autres.

Il y en a qui confiftent dans l'établiffement de principes, foit de phyfique, foit de morale, foit de métaphyfique. On y raifonne on y cite des autoritez, des exemples: on tire des conféquences. On peut les appeller poëmes philofophiques. Tel eft l'ouvrage de Lucréce.

Enfin il y en a qui ne contiennent que des obfervations qui ont rapport à la pratique, que des préceptes pour régler quelque opération dont le fuccès a befoin d'être affuré par des précautions. On les nomme fimplement Poëmes didactiques. Telles font les Géorgiques de Virgile, & l'Art poëtique d'Horace, celui de Boileau, &c.

Ces trois efpeces de poëmes ne font

point tellement féparées qu'elles ne fe prêtent quelquefois un fecours mutuel. Les Sciences & les Arts font freres & fœurs ; c'eft un principe qu'on ne fauroit trop répéter dans cette matiere. Leurs biens font communs entr'eux, & ils prennent par-tout ce qui peut leur convenir. Ainfi dans le poëme philofophique il entre quelquefois des faits hiftoriques & des obfervations tirées des arts. Pareillement dans les poëmes hiftoriques & didactiques, il entre fouvent des raifonnemens & des principes. Mais ces emprunts ne conftituent pas le fond du genre. Ils n'y viennent que comme auxiliaires, ou quelquefois comme délaffemens, parce que la variété eft le repos de l'efprit. Quand l'efprit eft las d'un genre, d'une couleur, on lui en offre une autre qui exerce une autre faculté, & qui donne à celle qui étoit fatiguée le tems de réparer fes forces.

Il y a plus: car quelles libertez ne se donnent pas les poëtes? quelquefois ils fe laiffent emporter au gré de leur imagination; & las de la vérité, qui femble leur faire porter le joug, ils le joug, ils prennent l'effor, s'abandonnent à la fiction, &

ils ceffent d'être hiftoriens, philofophes, artiftes. Ils ne font plus que poëtes. Ainfi Virgile ceffe d'être agriculteur, quand il raconte les fables d'Ariftée & d'Orphée. Il quitte la vérité pour le vraisemblable, il eft maître & créateur de fa matiere. Ce qui pourtant n'empêche pas que la totalité de fon poëme ne foit dans le didactique. Son épisode eft dans fon poëme ce qu'une ftatue eft dans une maison, c'est-à-dire, un morceau de pur ornement dans un édifice fait pour l'ufage.

genre

Les poëmes didactiques ont, comme tous les ouvrages, dès qu'ils font achevez & finis, un commencement, un milieu & une fin. On propofe le fujet, on le traite, on l'acheve. Les poëmes hiftoriques ont des actions & des paffions & des acteurs, auffi-bien que les poëmes de fiction. Mais les poëmes philofophiques & ceux de pratique n'en ont point. Ceux-là échauffent le cœur, ceux-ci éclairent l'efprit, ou dirigent les facultez qui agiffent. Voilà àpeu-près ce que nous avions à dire fur la matiere du Poëme didactique. Venons à la forme,

I I.

Forme de la Poëfie didactique.

Les Mufes favent tout, non-feulement ce qui eft, mais encore ce qui peut être, fur la terre, dans les enfers, dans le ciel, dans tous les efpaces foit réels, foit poffibles. Par conféquent, fi les poëtes, quand ils ont voulu feindre des chofes qui n'étoient pas, ont pû les mettre dans la bouche des Mufes, pour leur donner par-là plus de crédit; ils ont pû, à plus forte raifon, y mettre les chofes vraies & réelles, & leur faire dicter des vers, foit fur les fciences, foit fur l'hiftoire, foit fur la maniere d'élever & de perfectionner les Arts. C'est là-deffus qu'eft fondée la forme poëtique qui conftitue le poëme didactique, ou de doctrine.

Il a toujours été permis à tout auteur de choifir la forme de fon ouvrage. Et loin de lui faire un crime d'employer quelque tour adroit pour rendre le fujet qu'il traite plus agréable, on lui en fait gré, quand il foutient le ton qu'il a pris, & qu'il eft fidéle à fon plan. C'eft pour cela qu'on a obligation à Platon d'avoir

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